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« Le Convoi de la liberté »
Les leçons à tirer de la grève des travailleurs de Ford à Windsor, en Ontario
Il y a de cela 77 ans, les travailleurs de Ford à Windsor, en Ontario, ont dressé une barricade pour défendre leur grève contre une attaque de la police provinciale. Comme quoi la question n’est pas les barricades en soi, mais plutôt à qui et à quoi elles servent.
L’Encyclopédie canadienne écrit :
« Les grévistes utilisent environ 2 000 véhicules – certains volés, d’autres obtenus le jour même – pour créer une barricade et ainsi se prémunir contre une attaque de la Police provinciale de l’Ontario et de la Gendarmerie royale du Canada ordonnée par les gouvernements provincial et fédéral. Le 5 novembre, le conseil municipal de Windsor exige le démantèlement de la barricade, menaçant de faire intervenir l’armée. Un autre syndicat, la section locale 195, organise alors une grève de solidarité en réponse à l’agitation qui règne. Quelque 8 000 travailleurs de 25 usines d’automobiles viennent grossir les rangs des grévistes pendant un mois, sans qu’aucune allocation de grève ne leur soit versée. Parmi la population de Windsor, nombreux sont ceux qui appuient la grève ; c’est le cas, notamment, des soldats récemment revenus au pays, d’organisations religieuses et de certaines entreprises locales. »
Le regretté Lyle Dotzert, un travailleur de l’automobile et un des fondateurs de la section locale 200 des Travailleurs unis de l’automobile (TUA) à Windsor, a joué un rôle important dans cette grève qui a duré 99 jours en 1945. En pensant rétrospectivement à ces événements, il a écrit : « J’ai commencé à travailler à l’usine Ford en 1941 et j’y ai travaillé jusqu’en 1972, plus de 31 ans… [En 1945], on m’a envoyé à Brantford pour mobiliser l’appui à la lutte et recueillir des fonds pour les grévistes. J’ai appelé chez moi et j’ai appris que les travailleurs de Ford avaient débrayé et qu’ils avaient dressé une barricade d’autos, etc. […] Un des facteurs importants qui a permis de remporter cette bataille était l’unité des travailleurs de Ford, peu importe leur nationalité. Un autre facteur à retenir est l’appui des autres travailleurs, plus particulièrement les travailleurs d’usines de la section locale 195. Ils ont débrayé d’une douzaine d’usines pour se joindre à la ligne de piquetage, fermant ainsi la production dans leurs propres usines. Ils ont tout risqué à une époque où il n’y avait pas de sécurité d’emploi, où rien ne garantissait que votre emploi serait toujours là au retour, et où les compagnies avaient des listes noires et avaient à leur disposition un énorme réseau d’espionnage industriel. »
Un ami de longue date et collègue de travail a écrit sous la rubrique « Lives Lived » (Vies vécues) du Globe and Mail :
« À un stade critique de la grève pour la syndicalisation de 99 jours à l’usine en 1945, on aurait dit que l’État se préparait à faire venir des policiers à cheval de la GRC et de la police provinciale de l’Ontario, puisque le service de police de Windsor était perçu comme n’étant pas digne de confiance pour écraser la grève. Lyle, qui était très persuasif, a hérité de la lourde responsabilité d’aller d’un bout à l’autre de l’Ontario pour mobiliser l’appui aux grévistes et éviter une confrontation potentiellement violente avec la police. Grâce aux efforts de Lyle et d’autres, une vague d’appuis et de moyens de pression ont déferlé de tous les coins de la province et cela a empêché la police de passer à l’action. »
(Le Renouveau, affiché le 15 février 2022)
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