76e anniversaire du soulèvement populaire de l’île de Jeju
L’affirmation historique de la souveraineté coréenne se poursuit aujourd’hui par une opposition militante aux impérialistes américains
Il y a soixante-seize ans, le 3 avril 1948, les habitants de l’île de Jeju se sont héroïquement soulevés contre l’occupation américaine et la division de leur pays pour affirmer leur droit à la souveraineté, à l’indépendance et à la paix. L’île de Jeju est la plus grande île de Corée, située à 80 kilomètres au large de la côte sud-est de la péninsule coréenne. Cet événement reste gravé dans la mémoire de tout le peuple coréen et continue d’inspirer sa ferme détermination à expulser les occupants militaires américains de la Corée du sud (République de Corée), à mettre fin aux exercices de guerre menés par les États-Unis contre la République populaire démocratique de Corée (RPDC) et à réaliser la paix et la réunification de sa nation divisée.
Le peuple coréen, qui a joué un rôle sans égal dans la défaite du Japon et des forces de l’Axe à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, a été brutalement privé par les États-Unis de son droit, en tant que vainqueur, de jouir des fruits de sa victoire. Les Coréens avaient résisté avec acharnement à l’occupation de leur pays pendant 35 ans (1910-1945) par les militaristes japonais qui avaient fait de la Corée leur colonie et asservi le peuple coréen.
Avant la libération de la Corée le 15 août 1945, les impérialistes américains ont unilatéralement divisé le pays en deux afin d’établir leur base sur le continent asiatique et de réaliser leur rêve de domination mondiale après la Deuxième Guerre mondiale. À l’époque, une étude conjointe des services de renseignement de l’armée américaine et de la marine indiquait que la grande majorité des Coréens exprimaient un fort désir d’indépendance et d’autonomie, et s’opposaient avec véhémence à tout contrôle par un successeur des Japonais qui les gouvernaient depuis 1910. Une étude américaine a montré que près de 80 % des Coréens souhaitaient un système de gouvernance fondé sur des principes socialistes, plutôt que sur le capitalisme.
|
Après sa victoire sur les Japonais le 15 août 1945, le peuple coréen, regroupé en comités populaires dans tout le pays, s’est rapidement mobilisé pour consolider sa victoire en établissant la République populaire de Corée, qu’il a proclamée à Séoul le 6 septembre 1945. Cette république naissante a été démantelée par la force par les impérialistes américains qui sont arrivés dans le sud de la Corée deux jours plus tard pour recevoir officiellement la capitulation japonaise. Ils ont procédé à l’imposition unilatérale d’un gouvernement jugé « démocratique » et soumis aux intérêts américains en Corée. Dans le nord, où la capitulation japonaise a été reçue par l’Armée rouge soviétique qui avait participé à la libération de la Corée de l’occupation japonaise à la fin de la guerre, l’Armée rouge a aidé les comités populaires et leurs dirigeants élus à mettre en place un gouvernement provisoire qui a appliqué des réformes à grande échelle telles que la redistribution des terres, un système de santé et d’éducation public et d’autres mesures. En 1948, les derniers éléments de l’Armée rouge se retiraient du territoire coréen.
Dans le sud, les Coréens ont résisté au gouvernement militaire établi par l’armée américaine (USAMGIK) qui gouvernait d’une main de fer. L’une des premières mesures prises par l’USAMGIK a été de placer au pouvoir d’anciens officiers japonais et des Coréens qui avaient collaboré avec les occupants militaires japonais. Il a interdit les rassemblements contre l’occupation américaine, persécuté et massacré les civils considérés comme communistes ou socialistes et emprisonné des dizaines de milliers de patriotes coréens.
Pour tenter de légitimer leur domination, les États-Unis ont créé la Commission temporaire des Nations unies en Corée, dans laquelle le Canada a joué un rôle de premier plan, afin d’organiser des élections « libres et équitables » dans tout le pays en mai 1948, élections que le peuple a rejetées. Ce n’est que lorsqu’il est devenu évident que l’unification du pays n’était pas immédiatement possible en raison de l’occupation militaire américaine que Kim Il Sung, le leader de la résistance du peuple coréen à l’occupation japonaise, a déclaré la fondation de la RPDC le 9 septembre 1948 afin de garantir que le peuple coréen dispose d’une base révolutionnaire pour réaliser son indépendance et sa souveraineté complètes.
Selon les informations de l’Institut de recherche du 3 avril, le soulèvement populaire de Jeju a commencé le 3 avril 1948 et a duré près de deux ans à la grandeur de l’île, se poursuivant sous diverses formes jusqu’en septembre 1954.
L’événement qui a déclenché le soulèvement populaire de Jeju a eu lieu le 1er mars 1948, lorsque les insulaires ont non seulement célébré le Jour du mouvement pour l’indépendance, mais aussi dénoncé les élections frauduleuses prévues le 10 mai par les États-Unis avec le soutien de la commission temporaire de l’ONU.
Le mouvement de protestation de l’île de Jeju a été accueilli avec une force brutale par la police qui, agissant sous les ordres directs de l’USAMGIK, a tiré sur la foule, faisant six morts et plusieurs blessés. En réponse, les insulaires ont attaqué les postes de police, brûlé les bureaux de vote préparés pour les élections du 10 mai et attaqué les fonctionnaires réactionnaires du gouvernement et de l’armée. Le gouvernement militaire américain et ses forces paramilitaires locales ont riposté avec force, tuant et emprisonnant des personnes soupçonnées d’être des « gauchistes » et des « communistes », ainsi que d’autres forces patriotiques de l’île. Le 3 avril, une véritable rébellion a éclaté. Dès lors, le peuple s’est organisé en bandes de guérilla pour former l’« Armée du peuple » et a résisté à la répression la plus sauvage des États-Unis et du gouvernement fantoche de Syngman Rhee.
|
Sur les 250 000 habitants de l’île de Jeju, on estime que 80 000 personnes ont été tuées. Plus de 5 000 personnes se sont réfugiées au Japon. D’innombrables autres ont disparu. Plus de 40 000 maisons ont été détruites et sur 400 villages, seuls 170 n’ont pas été détruits. On trouve encore aujourd’hui les corps des personnes tuées et enterrées dans des fosses communes.
Pendant plus de 50 ans, il a été interdit aux habitants de l’île de Jeju ou à quiconque en Corée du sud de parler ouvertement du soulèvement populaire de Jeju, sous peine d’emprisonnement. En janvier 2000, sous la présidence de Kim Dae-jung en République de Corée, une loi spéciale a été adoptée pour obliger le gouvernement à rechercher la vérité sur ce qu’on appelle l’incident du 4.3. Le soulèvement populaire de Jeju et la répression sanglante qui s’en est suivie ont également fait l’objet d’enquêtes par plusieurs tribunaux pour crimes de guerre de la Commission de la vérité sur la Corée, qui ont conclu que les États-Unis et leurs alliés étaient coupables de crimes contre le peuple coréen, de crimes contre l’humanité, de crimes contre la paix et de crimes de guerre. En 2017, le gouvernement du président Moon Jae-in a présenté des excuses publiques aux victimes du massacre de l’île de Jeju et à leurs familles et a inauguré le parc de la Paix Jeju 4.3, où les dépouilles des victimes retrouvées à ce jour ont été inhumées. Chaque année, les Coréens tiennent des vigiles et d’autres événements pour marquer le 3 avril et rendre hommage aux personnes qui ont donné leur vie pour la liberté de la Corée.
Aujourd’hui, l’esprit du soulèvement populaire de Jeju se perpétue dans les manifestations quotidiennes qui ont lieu sur l’île devant la base navale américaine dans le village de Gangjeong, pour exiger la fermeture de la base navale et le départ de l’armée américaine de l’île et de la Corée. La base, dont la construction a duré 23 ans, a été imposée aux habitants de Jeju, qui en ont interrompu la construction à sept reprises. La base sert la stratégie militaire américaine dans l’Indopacifique, qui consiste à contenir et à menacer la Chine et à contrôler les eaux autour de la péninsule coréenne et de la mer de Chine méridionale. Il convient de noter que des navires de guerre canadiens participant à des exercices militaires américains visant la RPDC ont également accosté à la base.
Aujourd’hui, les habitants de l’île de Jeju sont en première ligne du mouvement pour exiger le départ des troupes américaines de Corée et la fin des exercices militaires américano-sud-coréens qui menacent l’existence même du peuple coréen et des peuples de la région.
|
|