74e anniversaire de la République de l’Inde
26 janvier 1950
Le peuple indien réclame ses droits
Le 26 janvier est le 74e anniversaire de la promulgation de la Constitution indienne, le Jour de la République de l’Inde. Le président, le premier ministre et d’autres représentants de l’élite dirigeante, dont beaucoup sont des milliardaires, ont fait, comme d’habitude, de grandes déclarations pour tromper le peuple et cacher les faits fondamentaux concernant la Constitution, l’élaboration de la Constitution et le conflit entre les conditions et l’autorité. Alors que la désinformation et la tromperie étaient diffusées en grande pompe, les fermiers et les agriculteurs de tout le pays ont organisé des mahapanchayats et des rassemblements pour protester contre l’élite au pouvoir, leur État et leur gouvernement, en scandant : Kisan mazdoor ekta indabad, faslon de faisle kisan karega (les fermiers prendront les décisions concernant leurs cultures).
Une Assemblée constituante a été créée en 1946 sur ordre des Britanniques. Seuls 10 % de la population avaient le droit de vote établi en fonction de la propriété, de la position sociale et du niveau d’éducation. Parmi ces électeurs désignés, près de 50 % n’ont pas voté. Des élections ont eu lieu pour les assemblées et les membres des assemblées ont élu les membres de l’Assemblée constituante. La plupart des membres étaient des collaborateurs des Britanniques ou leurs représentants tels que les zamindars qu’ils ont créés, les propriétaires terriens, les rajas, les maharajahs, les prêteurs, les Tata et les Birla, qui ont voté pour créer une constitution pour 400 millions de personnes. Ce n’était pas un organe représentatif du peuple indien, loin s’en faut. L’effectif total de l’assemblée était de 389 soi-disant représentants, la plupart issus des castes supérieures et partisans de la suprématie des brahmanes. Le peuple indien n’a pas eu son mot à dire dans l’élaboration de la Constitution.
Il n’est pas étonnant de constater que la nouvelle constitution est composée à plus de 90 % de l’ancien Acte du gouvernement de l’Inde de 1935 imposé par le Parlement impérial britannique. Les lois coloniales et le système pénal sont restés intacts. En raison de la force du mouvement d’indépendance, les rédacteurs ont été contraints de faire certaines concessions, comme le suffrage universel, les réservations, le droit de se syndiquer et certains autres droits civils dans les articles 19 et 21. Le préambule pompeux et les principes directeurs ont tous été amalgamés à partir des constitutions des démocraties libérales d’ici et d’ailleurs, mais ils ne sont pas justiciables – ils ne peuvent pas être utilisés pour demander des comptes aux représentants du gouvernement, car ils ne sont que des objectifs de politique.
Toutes les concessions et tous les droits que le peuple a obtenus depuis lors en versant des rivières de sang sont attaqués par l’élite dirigeante sous différents prétextes. Par exemple, les quotas de réservation (un système visant à assurer aux groupes historiquement défavorisés une représentation dans l’éducation, l’emploi, les programmes gouvernementaux, les bourses d’études et la politique) n’ont jamais été respectés, mais ils sont maintenant attaqués par l’élite dirigeante. Le droit d’être et le droit de conscience ne sont pas inscrits dans la Constitution. Bien que ces droits appartiennent à tous les Indiens du fait de leur humanité, ils sont violés de manière systématique.
La conscience du peuple a été continuellement criminalisée depuis l’époque du premier ministre Nehru jusqu’à aujourd’hui. Il suffit de lire les rapports officiels du ministère de l’Intérieur pour constater que Delhi s’est toujours comporté comme l’empereur moghol Aurangzeb. Plus de 200 000 personnes ont été tuées en Hyderabad lors d’une opération de police de 1948-1951. Nehru a dissous un gouvernement dûment élu au Kerala en 1959 et Indira Gandhi a traité les États comme ses vassaux, déclaré l’état d’urgence et perpétré un génocide au Pendjab. Rajiv Gandhi a poursuivi le génocide et a même interdit des poèmes et des chansons en vertu de lois noires comme la Loi sur les activités terroristes et perturbatrices (prévention). Manmohan Singh a mené l’opération Green Hunt et, comme Aurangzeb, le régime actuel, en plus des autres crimes qu’il a commis contre le peuple, a interdit les dessins animés, les livres et les films.
Dans une déclaration qui indiquait clairement qui la Constitution indienne allait servir, le premier ministre britannique, Clement Attlee, a déclaré en 1947 que « les intérêts commerciaux et industriels britanniques peuvent s’attendre à un champ d’action équitable pour leur entreprise dans les nouvelles conditions ». Autrement dit, la domination coloniale se poursuivra sans les colonialistes. En 1947, l’investissement britannique en Inde était de 4 milliards de dollars. Il est passé à 32 milliards de dollars au cours des 74 dernières années et les collaborateurs des Britanniques en Inde ont investi en Grande-Bretagne avec un chiffre d’affaires de 68 milliards de dollars au fil des ans. Il n’est pas étonnant que cela ait été appelé « du Raj britannique au Raj milliardaire ». Aujourd’hui, cela se fait sous la bannière de l’Hindutva – un concept d’« identité culturelle, nationale et religieuse indienne » selon lequel le « véritable Indien » est celui qui participe à cette « hindouité ». La constitution de la république s’est faite sous le slogan « sécularisme et socialisme » mais aux mains de la classe dirigeante cela a ouvert la voie à ce qui existe aujourd’hui.
Les derniers rapports soulignent que dans ce Raj milliardaire, 21 personnes en Inde possèdent plus de richesses que 700 millions de personnes et près de 800 millions de personnes reçoivent des rations du gouvernement parce qu’elles sont démunies. Elles ont été réduites à l’état de mendiants. L’élite dirigeante de l’Inde et de la Grande-Bretagne prévoit un accord de libre-échange pour continuer à dépouiller le peuple indien et piller ses ressources naturelles. Les économistes estiment que l’élite dirigeante britannique a volé plus de 45 000 milliards de dollars à l’Inde, mais les dirigeants indiens, qui ne se lassent pas de crier des slogans contre le colonialisme, leur donnent à nouveau carte blanche pour piller l’Inde. De même, les États-Unis et le Canada ont déclaré une stratégie indo-pacifique dans laquelle les relations avec l’Inde sont un moyen de l’opposer à la Chine et d’isoler cette dernière.
Les 74 dernières années de la République ont été marquées par plus de 65 000 événements de violence communautaire sanctionnée par l’État et d’innombrables atrocités à l’encontre des femmes et des hommes dalits. Des violations massives des droits dans tout le pays continuent de se produire en toute impunité. La République de l’Inde est devenue une prison pour les nations, les nationalités et les peuples des forêts, qui doivent céder leurs ressources aux Adani, Ambani, Tata et aux autres membres de l’élite dirigeante. De nombreuses régions sont sous occupation militaire depuis des décennies. La dégradation de l’environnement naturel, l’empoisonnement de l’air, de l’eau et du sol mettent en danger la santé de millions de personnes.
Ces conditions ont donné lieu à des révoltes massives de la population, comme en témoignent les morchas des fermiers aux frontières de Delhi pendant 14 mois et la détermination des fermiers à poursuivre leurs luttes jusqu’à ce qu’ils atteignent leur objectif de Faslon ke faisley kisan karega. Les travailleurs, les femmes, les Dalits, les enseignants, les employés de bureau, les jeunes, les artistes et tous les travailleurs ont hissé le drapeau de la lutte pour l’affirmation de leurs droits.
La crise de crédibilité et de légitimité du processus politique, le manque de confiance et le rejet des partis cartellisés de l’élite dirigeante et des institutions gouvernées par des intérêts privés étroits se sont également aggravés. Dans chaque manifestation, les gens ne veulent pas des dirigeants de ce qu’on appelle des partis politiques qui agissent comme des gangs mafieux. Après les 14 mois de l’Université Kisan aux frontières de Delhi, les gens ont pris conscience qu’ils devaient prendre les choses en main, résoudre leurs problèmes et affirmer leurs droits. Ils le font sur la base de la démocratie de masse, où tous prennent part à la discussion et décident de la ligne de conduite à adopter. Ils saluent le 74e anniversaire de la République avec une grande détermination à poursuivre leurs luttes pour le renouveau.
Des kisan mahapanchayats de masse à Jind Haryana et à Kokri Kalan au Pendjab ont rassemblé des centaines de milliers de fermiers et d’autres personnes pour protester contre la trahison des promesses du gouvernement Modi. Ils ont réitéré leur demande d’un prix de soutien minimum (MSP) pour toute l’Inde et d’une loi stipulant que les produits doivent être achetés au MSP. Kokari Kalan est un lieu historique. Je le connais très bien. C’est à seulement huit kilomètres du village de mon grand-père. C’était un centre du Parti Ghadar. Les fermiers et autres travailleurs, les enseignants, les artistes, les médecins et les scientifiques ont discuté des principaux problèmes auxquels ils sont confrontés. Ils ont exprimé leur méfiance totale envers les dirigeants des partis politiques et ont appelé le peuple à prendre les choses en main. Les Indiens refusent d’être réduits à une simple masse votante et de devenir impuissants au moment du dépôt du bulletin de vote. Ils veulent renouveler le processus politique et tous les autres rapports entre les humains et entre les humains et la nature. Je me souviens de Maithali Sharan Gupt, le grand poète hindi, qui a écrit :
Aao Vicharen Rashtra Ki Samasayen Sabhi
(Délibérons tous sur les problèmes de notre pays.)
(Photos : R. Azad, K. Sundar.)
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