124e anniversaire de la naissance de Paul Robeson
9 avril 1898
Une personnalité exceptionnelle du Xxe siècle
« Comme tout autre peuple, comme les pères, les mères, les fils et les filles de tous les pays, lorsque la question de la paix ou de la guerre a été posée sans détour au peuple américain, celui-ci s’est inscrit pour la paix. […] En fait, en raison de ce profond désir de paix, ceux à la tête de la classe dirigeante de ce pays, à partir de 1945, ont intensifié l’hystérie et la propagande pour faire entrer dans l’esprit des Américains la fausse idée que le danger les menaçait de l’Est. Cette propagande a commencé avant que le sang de précieux êtres humains ne cesse de couler dans la puissante bataille contre le fascisme. » — Réflexions sur l’obtention du Prix Staline de la paix, Paul Robeson, Freedom, janvier 1953 |
Le 9 avril 2022 est célébré le 124e anniversaire de la naissance de Paul Robeson, l’une des personnalités exceptionnelles du XXe siècle. Paul Robeson n’était pas seulement un grand universitaire, un athlète, un avocat, un acteur et un chanteur américain, mais surtout un ardent combattant pour les droits de toutes et de tous qui a toujours défendu les causes sacrées de la paix, de la liberté et de la démocratie pour son propre peuple et pour les peuples du monde.
En cette occasion, une appréciation du documentaire sur sa vie, The Tallest Tree in Our Forest – L’arbre le plus haut de notre forêt, et le documentaire lui-même, sont affichés pour l’intérêt des jeunes qui cherchent à connaître la vie et les actes des héros de la classe ouvrière et du mouvement des peuples pour l’émancipation au XXe siècle. Nous les dédions également à la génération qui a grandi avec Paul Robeson et qui l’admire beaucoup pour ses magnifiques accomplissements dans divers domaines d’activité et qui à contribué à ces accomplissements au mieux de leurs capacités. Paul Robeson était très apprécié et admiré par la classe ouvrière et les peuples des États-Unis, du Canada et du monde entier pour l’amour et le dévouement dont il a toujours fait preuve pour les causes justes, dans lesquelles il plaçait son propre peuple au premier plan et contribué de la même manière à la cause des peuples du monde.
Paul Robeson a refusé de se laisser intimider lorsqu’il a été persécuté par l’État américain, en particulier lorsqu’il a été traîné devant l’inquisition McCarthy. Sa fidélité aux principes a inspiré tous ceux qui le connaissaient ou qui avaient entendu parler de sa lutte pour atteindre des sommets toujours plus élevés de paix, de liberté et de démocratie.
À l’heure où l’État américain se livre à nouveau à des activités criminelles contre toutes celles et ceux qui refusent de se soumettre à son diktat, l’exemple de Paul Robeson est plus important que jamais.
L’arbre le plus haut de notre forêt
Un documentaire
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The Tallest Tree in Our Forest – L’arbre le plus haut de notre forêt est un documentaire de 1977 réalisé et écrit par Gil Noble sur le chanteur, acteur et militant Paul Robeson. Cette biographie a été tournée en un film de 16 mm et est composée d’entrevues, de séquences filmées et de photographies.
Le film, dans l’ordre chronologique, montre comment Paul Robeson a fréquenté l’université Rutgers grâce à une bourse d’études, où il a été membre du College All-American de football, major de sa promotion, champion de débat et a reçu cinq fois les honneurs de la société d’honneur universitaire Phi Beta Kappa ; Il a obtenu un diplôme de la faculté de Droit de l’Université Columbia, a joué dans la Ligue nationale de football américain, a parlé une vingtaine de langues, a découvert des liens communs dans la musique à travers l’échelle pentatonique, a joué dans 11 films, a été chanteur de concert baryton-basse, a joué le premier Othello afro-américain et, surtout, a été un militant politique.
Son premier rôle est dans Emperor Jones, une pièce écrite par Eugene O’Neill. En 1922, alors qu’il jouait dans une pièce à Liverpool, en Angleterre, Paul Robeson a déclaré : « J’ai découvert que j’étais un chanteur. Je ne voulais pas être un chanteur d’opéra wagnérien mais chanter les chansons populaires de mon peuple. Je voulais que ma voix sorte de ce que j’étais. »
Nous apprenons qu’en 1935, sa carrière de chanteur était lancée et qu’en 15 ans, elle ferait de lui « l’homme le plus connu au monde ».
« Mes concerts montrent l’unité, la relation de la musique noire à la musique du monde entier, l’idée que tous les hommes sont frères à cause de leur musique. Les chansons folkloriques de tous les pays ont des similitudes parce qu’elles ont des aspirations similaires », a déclaré Paul Robeson dans une entrevue.
Un autre acteur, chanteur et militant des droits civiques, Harry Belafonte, comédien, chanteur et militant des droits civiques, a dit au sujet de l’étude de la musique par Paul Robeson : « Il était conscient de la forme la plus élevée de l’art pour en saisir les nuances afin que les gens pensent qu’il venait de là. »
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Paul Robeson a changé les paroles de la chanson pour laquelle il est le plus célèbre, Ol’ Man River, de « Halant les chalands, soulevant les balles, / Et pour un verre de trop tu te retrouves au cachot » pour « Halant les chalands, soulevant les balles/ Vous montrez un peu de cran et tu te retrouves au cachot ». Et le vers « Je suis fatigué et j’ai peur de mourir » devient « Je dois continuer à me battre jusqu’à la mort ».
Nous apprenons : « Paul Robeson est devenu le premier Afro-Américain à jouer Othello de William Shakespeare, avec Uta Hagen dans le rôle de Desdemona, dans la production du Theatre Guild de New York en 1943. C’est devenu la pièce de Shakespeare à tenir l’affiche le plus longtemps de l’histoire de Broadway. » Dans une entrevue au sujet du rôle, Paul Robeson a déclaré : « Ce qui a provoqué Othello, c’est la destruction de lui-même en tant qu’être humain, de sa dignité humaine. J’ai lié cette dignité à tout mon peuple dans ce que Othello appelle ‘ son honneur, sa dignité ‘. »
C’est à cette époque qu’il visite l’Union soviétique. « Paul Robeson a été particulièrement impressionné par la Russie à cette époque, car il n’y a pas trouvé de barrière raciale. Il a été séduit par le système politique de l’Union soviétique », dit le narrateur.
Le film précise : « Il est allé en Espagne, il était parmi les combattants loyalistes et il a joué son rôle dans la lutte antifasciste en donnant des concerts. »
Ensuite, « Il était en colère parce que, dans les années 1930, aucun Noir ne jouait encore dans la ligue majeure de baseball, alors il a dirigé une délégation devant les propriétaires de clubs de la ligue majeure pour exiger que la barrière de couleur soit brisée. Peu de temps après, Jackie Robinson est devenu le premier Afro-Américain à jouer dans la Ligue majeure de baseball. »
Après la Deuxième Guerre mondiale, la chasse aux sorcières anticommuniste a commencé et visait Paul Robeson et bien d’autres personnes. À cette persécution, il a répondu : « Personne ne me fait peur. » Citant son père, il a déclaré : « Ne compromettez jamais vos principes, quoi qu’il arrive, ne vous rabaissez jamais. »
Paul Robeson devait chanter lors du concert pour le Congrès des droits civiques à Peekskill, New York, en août 1949. Des nazis et des membres du Ku Klux Klan ont attaqué et battu des Afro-Américains et des Juifs, brûlé des croix et lynché des effigies de Paul Robeson, perturbant le concert alors que la police restait là sans rien faire.
Un deuxième concert en septembre est organisé avec succès par le Parti communiste des États-Unis, les anciens combattants de la Deuxième Guerre mondiale et les syndicats, qui protègent Paul Robeson et les 20 000 personnes qui y assistent.
À cette époque, Harry Belafonte a déclaré : « [L]e communisme est devenu clairement la cible et ils ont mis en place des instruments pour l’attaquer, le plus puissant étant l’HUAC [Commission de la Chambre sur les activités anti-américaines]. »
« […] alors il a refusé de faire des déclarations disant qu’il n’était pas communiste, car cela était utilisé contre des gens – refus de passeport etc… – il a refusé de prêter serment car il était opposé à cela par principe », a déclaré Lloyd Brown, ami et biographe de Paul Robeson au sujet de la position qu’il a prise lors des audiences.
Le gouvernement a confisqué son passeport, il s’est vu refuser des salles de concert et des théâtres et l’a empêché d’apparaître à la télévision américaine. « J’ai été mis sur liste noire, comme beaucoup de mes collègues », a déclaré Paul Robeson. Mais ensuite, dit-il, « Ma carrière a été relancée par la communauté noire, en particulier les églises où j’ai donné de nombreux concerts. »
Une grande partie du matériel du film provient du bureau des archives de Robeson, créé en 1973 et dirigé par son fils Paul Robeson, Jr, qui raconte l’histoire de deux musiciens de jazz renommés : « Dizzy Gillespie et Charlie Parker sont montés sur scène lors d’un rassemblement et ont dit : ‘Paul est mon ami, je me fiche de ce qu’ils disent de lui.’ »
Paul était un internationaliste et une figure marquante du mouvement ouvrier, qui chantait partout où les travailleurs luttaient pour leurs droits. Parmi les occasions mémorables, citons le concert à guichets fermés organisé par la section écossaise de l’Union nationale des mineurs au Usher Hall d’Édimbourg, le concert pour les ouvriers de la construction sur le chantier de l’Opéra de Sydney, les célèbres concerts de l’Arche de la paix à la frontière entre les États-Unis et le Canada, au sud de Vancouver, en 1951 et à nouveau en 1952, devant des dizaines de milliers de personnes, le concert transatlantique organisé par les mineurs du sud du pays de Galles, alors que Paul Robeson n’avait toujours pas de passeport. Il a tissé des liens privilégiés avec les mineurs gallois après avoir joué dans The Proud Valley, un film de 1940 sur les mineurs de charbon gallois.
En 1958, après avoir récupéré son passeport, Paul Robeson a fait une tournée mondiale mémorable – « l’homme aux principes inflexibles était de retour ».
La CIA a empoisonné Robeson en 1961 dans le cadre de leur programme MK-Ultra. Paul Robeson était à Moscou et prévoyait de rencontrer Fidel Castro à Cuba avant de retourner aux États-Unis pour rejoindre Martin Luther King Jr. et Malcolm X dans le mouvement des droits civiques. Il a été invité à une « fête surprise » à Moscou, organisée par la CIA et remplie de dissidents antisoviétiques, au cours de laquelle il a été drogué au LSD à son insu. Peu après son départ de Moscou, il a été admis au Priory Hospital de Londres, en Angleterre. Dans les 36 heures qui suivirent son arrivée à Londres, et contre l’avis des médecins soviétiques, Paul Robeson est soumis à la première des 54 séances de thérapie par électrochocs. Il ne s’en est jamais complètement remis et cela a mis fin à ses activités de chanteur et de politicien à l’âge de 63 ans.
En septembre 2021, Turner Classic Movies (TCM) a organisé une rétrospective d’un mois des films de Robeson, intitulée Star of the Month. Les films projetés étaient Borderline (1930), The Emperor Jones (1933), Sanders of the River (1935), Show Boat (1936), Song of Freedom (1936), Big Fella (1937), King Solomon’s Mines (1937), Jericho (alias Dark Sands, 1937), The Proud Valley (1940) et Paul Robeson : Tribute to an Artist (1979), une première de TCM.
Le communiqué de TCM annonçant la rétrospective se lit : « Paul Robeson était un homme d’un immense talent et d’une grande capacité – acteur, chanteur, universitaire, athlète, orateur et militant des droits civiques. Ce sont ses efforts dans ce dernier domaine, ainsi que sa politique de gauche, qui ont nui à sa carrière à une époque où les possibilités pour les artistes noirs étaient déjà limitées. »
Un mois après la mort de Joseph Staline, en 1953, Paul Robeson a écrit une lettre intitulée « À vous camarade bien-aimé ».
Paul Robeson écrit : « Les peuples coloniaux d’aujourd’hui se tournent vers les républiques socialistes soviétiques. Ils voient comment, sous le grand Staline, des millions de personnes comme eux ont trouvé une nouvelle vie. Ils voient les nations de l’Europe de l’Est, autrefois semi-coloniales, construire de nouvelles démocraties populaires, fondées sur le pouvoir du peuple qui façonne sa propre destinée. Une grande partie de ce progrès découle de la magnifique direction, théorique et pratique, donnée par leur ami Joseph Staline.
« Dans toutes les sphères de la vie moderne, l’influence de Staline est large et profonde. Depuis son dernier document, écrit simplement, mais d’une grande perspicacité et d’une grande exhaustivité, et à travers les années, ses contributions à la science de notre société mondiale restent inestimables. On parle avec révérence de Marx, Engels, Lénine et Staline – les façonneurs du présent et de l’avenir les plus riches de l’humanité.
« Oui, par sa profonde humanité, par sa sage compréhension, il nous laisse un héritage riche et monumental. Plus important encore, il a tracé la direction de nos luttes présentes et futures. Il a montré la voie de la paix – de la coexistence amicale, de l’échange de contributions scientifiques et culturelles réciproques, de la fin de la guerre et de la destruction. Avec quelle constance, quelle patience, il a oeuvré pour la paix et l’abondance toujours croissante, avec quelle profonde bonté et sagesse. Il laisse des dizaines de millions de personnes sur toute la terre, inclinées dans un chagrin déchirant. »
Paul Robeson termine sa lettre par un vers d’une chanson de Lewis Allan :
À Vous, camarade bien-aimé, nous faisons ce voeu solennel
Le combat continuera – le combat continuera toujours.
Dormez bien, camarade bien-aimé, notre travail ne fait que commencer.
Le combat continuera – jusqu’à ce que nous gagnions – jusqu’à ce que nous gagnions.
Paul était marié à Eslanda Goode, une anthropologue américaine, auteure, actrice et militante des droits civiques. Le titre du film, The Tallest Tree in Our Forest, est tiré d’une déclaration au sujet de Paul Robeson de Mary Jane McLeod Bethune, éducatrice, philanthrope, humanitaire et militante des droits civiques.
Le film apporte une contribution réelle à l’héritage du grand Paul Robeson alors que le réalisateur termine le film en disant : « Nous n’avons trouvé que très peu d’images d’actualité de cet homme tournées dans ce pays. Même la Bibliothèque du Congrès n’a pas grand-chose à offrir sur pellicule. Nous demandons : où sont ces films ? »
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