Numéro 14
22 août 2023
Ne touchez pas à l’Amérique latine et aux Caraïbes !
Non à l’intervention étrangère en Haïti ! Core Group, hors d’Haïti !
Le Core Group sur Haïti, composé de représentants des Nations unies, du Brésil, du Canada, de la France, de l’Allemagne, de l’Espagne, de l’Union européenne, des États-Unis et de l’Organisation des États américains, se prépare à une intervention militaire en Haïti au nom de la lutte contre la « violence des gangs ». Le Core Group est le successeur de l’Initiative d’Ottawa sur Haïti qui a orchestré le coup d’État de 2004 contre le gouvernement démocratiquement élu de Jean-Bertrand Aristide. C’est un groupe autoproclamé et intéressé qui s’est arrogé le droit de dicter au peuple haïtien et de détruire constamment toutes ses tentatives de reprendre le contrôle de ses propres affaires, afin de pouvoir exploiter sans limites les richesses du pays. Si le Core Group envisage une intervention militaire en Haïti, la cible ne peut être que le peuple haïtien lui-même, dont la nation est fondée sur sa lutte héroïque pour exercer son droit d’être libre de toute domination étrangère.
Le journal Métropole HT écrit le 16 août :
« La force multinationale pourrait être déployée à la fin de l’année si tout se passe bien, a déclaré l’ambassadeur du Canada à Port-au-Prince, Sébastien Carrière. Avant il faudra réussir les diverses étapes dans la préparation de la mission.
« Les trois prochaines semaines seront cruciales pour Haïti, ajoute le diplomate évoquant l’effort diplomatique devant être réalisé pour favoriser le déploiement d’une force multinationale en Haïti. Il donne l’assurance que le Canada apportera son appui afin de faciliter l’adoption d’une résolution autorisant le déploiement de la force. Obtenir le mandat du conseil de sécurité de l’ONU n’est pas une mince, affaire », confie Sébastien Carrière.
« Ensuite le Kenya doit évaluer la situation sur le terrain et faire un rapport au Conseil de sécurité. Le Canada est disposé à aider le Kenya dans la coordination de l’aide des divers pays contributeurs. Des experts canadiens à Ottawa, à Santo Domingo et à Port-au-Prince sont déjà impliqués dans la coordination de l’assistance à la PNH. »
Le 15 août, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a soumis au Conseil de sécurité un rapport présentant des « options » que l’ONU devrait envisager pour intensifier l’ingérence étrangère en Haïti au nom de l’assistance à la sécurité. Reuters rapporte que M. Guterres a déclaré que le contexte actuel d’Haïti « n’était pas propice au maintien de la paix » et que l’ordre public devait être rétabli « en dissuadant, en neutralisant et en désarmant les gangs lourdement armés capables d’opposer une forte résistance aux opérations de police antigang ». Pour ce faire, il a déclaré que « rien de moins qu’un recours énergique à la force, complété par une série de mesures non cinétiques, par une force de police multinationale spécialisée, dotée de moyens militaires et coordonnée avec la police nationale » n’était nécessaire. Il a appelé les pays à « agir maintenant » pour contribuer au déploiement d’une telle force et a demandé au Conseil de sécurité de la soutenir.
Le 1er août, deux semaines avant le rapport d’Antonio Guterres, les États-Unis, qui assurent la présidence tournante du Conseil de sécurité de l’ONU ce mois-ci et qui cherchent depuis presqu’un an à rassembler la force que propose le secrétaire général de l’ONU, ont annoncé qu’ils présenteraient une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU autorisant le Kenya à diriger une force de police multinationale pour « combattre les gangs » qui, selon eux, ont pris le contrôle du pays. L’ambassadrice des États-Unis auprès des Nations unies, Linda Thomas-Greenfield, a déclaré : « Nous saluons la décision du Kenya de diriger une force multinationale et nous travaillerons sur une résolution pour soutenir cet effort » et qui « donnera aux Kényans ce dont ils ont besoin pour établir leur présence en Haïti ».
Les forces qui font la promotion d’une intervention craignent que la Russie et/ou la Chine exercent leur droit de veto au Conseil de sécurité pour bloquer la résolution si les États-Unis décident d’en soumettre une. Lors d’une séance d’information du Conseil de sécurité sur Haïti en juillet, le représentant de la Fédération de Russie a notamment déclaré : « La crise systémique en Haïti a été précédée par de nombreuses années d’ingérence extérieure destructrice, à la fois par des interventions directes et par des manipulations politiques. La pratique condamnable qui consiste à imposer à Haïti des modèles politiques étrangers qui ne tiennent pas compte des intérêts politiques nationaux du pays a érodé les fondations fragiles de l’État haïtien […]. » « Nous ne comprenons pas très bien pourquoi, avec un dialogue politique bloqué et une crise de légitimité, sans aucun contrôle sur le trafic d’armes et un plan humanitaire sous-financé, l’idée d’envoyer une force militaire multinationale en Haïti est considérée par certaines parties prenantes comme une solution miracle à tous les problèmes d’Haïti ». L’histoire des interventions extérieures en Haïti montre que les modèles imposés de l’extérieur ne s’enracinent pas dans la société haïtienne. Ils apportent beaucoup plus de problèmes que de bienfaits et ne servent que de couverture pour promouvoir les intérêts d’autres nations. Ce n’est pas un hasard si, aujourd’hui encore, malgré tous les problèmes, des voix s’élèvent en Haïti contre toute forme d’ingérence étrangère. Il est de notre devoir d’écouter ces voix plutôt que d’essayer de les faire taire ou de les ignorer », a ajouté le représentant de la Russie.
Toujours en juillet, le représentant permanent de la Chine auprès des Nations Unies, Zhang Jun, a déclaré : « Nous avons entendu de nombreux discours en faveur de cette force multinationale, mais aucun pays n’a annoncé d’actions concrètes, il semble donc qu’une analyse plus approfondie sera nécessaire avant d’arriver à une proposition viable. » Il a souligné que les Haïtiens doivent décider de leur propre destin.
En cas de blocage au Conseil de sécurité de l’ONU, les États-Unis et le Core Group pourraient tout simplement intervenir sans mandat de l’ONU, tout en déclarant qu’ils sont en faveur d’une action humanitaire et de l’ordre international fondé sur des règles
Le 4 août, le journal Haïti Libre a indiqué que cinq pays ont exprimé leur soutien à une intervention militaire en Haïti, apparemment dirigée par la police kenyane : les États-Unis, le Canada, la Jamaïque, les Bahamas et l’Équateur. Le journal jamaïcain The Gleaner a indiqué le 3 août que les forces de défense jamaïcaines avaient commencé à se préparer pour la mission en Haïti. « Dans l’état actuel des choses, l’engagement de la Jamaïque tient toujours. Nous ne pouvons certainement pas atteindre les 1 000 soldats […] Mais nous donnerons ce que nous pouvons », a déclaré le premier ministre Andrew Holness lors d’une conférence de presse.
La demande d’intervention étrangère auprès de l’ONU est supposée provenir du premier ministre Ariel Henry, une marionnette illégitime installée par les États-Unis que le peuple haïtien tente de destituer depuis des mois avec des manifestations militantes. Le récit que Henry et le Core Group présentent au sujet d’Haïti est que le pays est ravagé par la « violence des gangs » et que la seule solution est d’envoyer une force militaire extérieure pour mettre de l’ordre et aider la police nationale haïtienne. Cette police a toujours été un instrument empêchant le peuple haïtien d’exercer un contrôle sur ses propres affaires et il la déteste.
Le 14 juillet, le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté à l’unanimité la résolution 2692 visant à proroger le mandat du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH) jusqu’au 15 juillet 2024, pour lequel il est décidé « que le groupe du BINUH chargé des questions touchant à la police et aux services pénitentiaires intégrera jusqu’à 70 civils et agents en détachement, qui exerceront des fonctions de conseillers pour les questions de police et pour les affaires pénitentiaires sous la direction d’un chef de la police civile des Nations Unies, et qu’il intensifiera son appui stratégique et consultatif aux moyens de formation et d’enquête de la Police nationale d’Haïti » et « que le groupe des droits humains du BINUH disposerait d’une capacité particulière de lutte contre la violence sexuelle et fondée sur le genre, notamment des moyens de repérer les conseillers pour la protection des femmes. »
Frantz André, de Solidarité Québec-Haïti, a expliqué l’origine de ces gangs au LML en juillet 2021, peu après l’assassinat du président Jovenel Moïse :
« Il faut saisir que ce qui se passe maintenant en Haïti, depuis la venue de Jovenel Moïse et avant, pendant la présidence de Michel Martelly, c’est une guerre civile par procuration, qui se fait à travers des gangs armés qui se sont fédérés récemment, sous le nom de ‘G9’ , et avec qui Jovenel Moïse avait accepté de dialoguer officiellement, espérant contrôler l’insécurité, mais malheureusement ces gangs ont aussi terrorisé la population, servant l’intérêt de qui les arme et les paie. Les groupes de l’oligarchie haïtienne et de l’élite politique se font la guerre entre eux au moyen de ces gangs armés. Ces groupes sont aussi liés à l’international, notamment au Core Group et c’est avec ce soutien international que ces groupes oligarchiques sont devenus multimillionnaires au fil des décennies. Ils l’ont fait et le font par la corruption, entre autres par le détournement des fonds du programme PetroCaribe du Venezuela, qui devaient servir au financement d’infrastructures publiques et à la mise en place de programmes sociaux.
« Le Core Group qui soutient cette élite mercantile a contribué notamment à ‘sélectionner’ les présidents ou futurs présidents du pays. Cette élite, ainsi que des partis de l’opposition, ont armé et arment différents gangs pour défendre leurs intérêts, tout comme le gouvernement de Jovenel Moise a lui aussi armé des gangs […] »
L’Associated Press indique que 1 000 policiers kenyans pourraient être déployés en Haïti. L’agence de presse souligne que la police kenyane est depuis « longtemps accusée par les organismes de surveillance des droits de meurtres et de torture, notamment d’avoir abattu des civils pendant le couvre-feu COVID-19 au Kenya. Un groupe local a confirmé que des policiers avaient abattu plus de 30 personnes en juillet, toutes dans les quartiers les plus pauvres du Kenya, lors de manifestations appelées par l’opposition contre la hausse du coût de la vie ».
Alors qu’historiquement, les peuples d’Amérique latine et des Caraïbes ont toujours été solidaires du peuple haïtien et de sa lutte pour l’indépendance, et vice versa, la Communauté des Caraïbes (CARICOM) a été soumise à une pression intense et implacable pour diviser ses rangs au sujet d’Haïti. A.T. Freeman, écrivant pour la Caribbean Organization for Peoples Empowerment (COPE) le 9 juillet, a expliqué :
« Réuni à Trinité-et-Tobago, du 3 au 5 juillet, pour sa 45e conférence des chefs de gouvernement, qui marquait également le 50e anniversaire de l’organisation, le CARICOM a abandonné son opposition de plusieurs mois à l’assaut militaire des États-Unis contre son État membre et a publié une déclaration en faveur de la ‘création immédiate d’un corridor de stabilisation humanitaire et sécuritaire sous le mandat d’une résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies (CSNU), et a convenu de rechercher le soutien de partenaires internationaux pour aider à financer sa mise en place et le renforcement de la sécurité en Haïti’.
« Ce changement d’avis de la CARICOM a sans doute été influencé par la présence non seulement d’une délégation bipartisane du Congrès américain dirigée par le démocrate Hakeem Jeffries, mais également par celle d’Antony Blinken, secrétaire d’État des États-Unis.
« Le lendemain de la réunion de la CARICOM, le 6 juillet, la séance d’information du Conseil de sécurité des Nations Unies sur Haïti a montré clairement ce que le corridor de stabilisation humanitaire et de sécurité signifierait réellement pour le peuple haïtien. Maria Isabel Salvador, représentante spéciale du secrétaire général des Nations unies et chef du Bureau intégré des Nations unies en Haïti (BINUH), a lancé un appel à l’envoi en Haïti d’une ‘force internationale robuste’. Cet appel fait écho à celui de son patron, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, qui mène depuis quelque temps une campagne active en faveur de l’attaque militaire américaine.
« Pour confondre l’opinion publique et dissimuler leurs véritables objectifs en Haïti, les États-Unis et leurs partisans ont mis au point une propagande mensongère qui prétend qu’ils veulent attaquer militairement Haïti pour ‘aider le peuple haïtien qui souffre terriblement aux mains de gangs criminels’. Cette justification est vieille comme le monde et a été utilisée pendant des siècles par les puissances esclavagistes et coloniales qui ont toujours présenté leurs attaques criminelles contre les autres comme une bonne action de l’attaquant pour l’attaqué. Nous avons parcouru des milliers de kilomètres pour arriver dans votre pays, nous vous avons tué, nous avons volé votre terre sous la menace d’une arme et nous nous sommes emparés de toutes vos ressources, mais nous voulons que vous compreniez que nous l’avons fait par souci humanitaire pour vous. C’est l’essence même du récit raciste de la ‘mission civilisatrice de l’homme blanc’ que les États-Unis colportent pour justifier leur attaque contre Haïti. Il n’a aucune crédibilité mais, malheureusement, le CARICOM y a adhéré. »
Alors que les États-Unis font pression sur d’autres pays pour qu’ils participent aux plans d’une nouvelle intervention militaire en Haïti, le Canada est totalement impliqué dans les crimes perpétrés contre le peuple haïtien au cours des 20 dernières années. Il ne fait aucun doute que les idéaux les plus élevés seront invoqués pour expliquer pourquoi le Canada doit soutenir et participer à l’intervention prévue en Haïti. Cela ne doit pas passer ! Les Canadiens et les Québécois rejettent le rôle néfaste du Canada en Haïti et veulent que le Canada soit une zone de paix, en accord avec les efforts des peuples d’Amérique latine et des Caraïbes qui veulent la même chose pour leur région.
Opération Tradewinds : Nous devons élever nos voix pour défendre notre région !
La menace imminente d’une invasion militaire des États-Unis en Haïti, désormais soutenue par la CARICOM, exige que les peuples des Caraïbes élèvent leur voix contre une telle menace et contre la militarisation incessante de la région dirigée par les États-Unis. Cette militarisation sape la déclaration de 2014 de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC) selon laquelle notre région devrait être une zone de paix.
Les États-Unis et leur Core Group, qui opèrent comme des seigneurs coloniaux d’Haïti, violent délibérément l’indépendance et la souveraineté d’Haïti, alors qu’ils poursuivent leur politique malveillante vieille de plusieurs siècles de punition du peuple haïtien pour avoir utilisé la force des armes pour mettre fin à l’esclavage des peuples africains et avoir fait pression pour obtenir le même résultat dans d’autres territoires dans les Caraïbes et dans les Amériques. Aujourd’hui, les dirigeants haïtiens fantoches, installés par le Core Group, sont incapables de réprimer le peuple haïtien et les États-Unis envisagent d’intervenir militairement pour atteindre cet objectif. À sa grande honte, la CARICOM a soutenu la menace américaine.
En plus de la menace qui pèse sur Haïti, le commandement Sud des États-Unis a donné le coup d’envoi, le 14 juillet de cette année, de son exercice militaire régional annuel Tradewinds. Cette année, l’exercice se déroule en Guyane et doit durer deux semaines, jusqu’au 28 juillet. L’opération Tradewinds rassemble 1 500 soldats des États membres de la CARICOM, des anciennes puissances coloniales, à savoir la Grande-Bretagne, la France et la Hollande, et des nouvelles puissances coloniales, à savoir les États-Unis et le Canada. En plus, le Brésil, qui a dirigé la précédente occupation militaire d’Haïti par l’ONU, participe à l’exercice. L’exercice militaire Tradewinds a été lancé en 1984, un an après l’invasion des États-Unis de la Grenade. Il a pour but de s’assurer que les peuples des Caraïbes restent dans les paramètres fixés pour eux par les anciennes et les nouvelles puissances coloniales. Il nous rappelle que ces puissances utiliseront la force militaire contre nous, comme elles l’ont fait à maintes reprises dans le passé, si nous osons sortir des limites qu’elles nous ont imposées.
La menace militaire qui pèse actuellement sur Haïti et l’exercice militaire Tradewinds en cours démontrent clairement que les puissances coloniales et esclavagistes ne considèrent pas les Caraïbes comme une zone de paix. Au contraire, elles ne cessent d’intensifier les activités militaires et les menaces dans la région pour atteindre leur objectif de maintenir leur contrôle sur nous et nos pays.
Les peuples des Caraïbes doivent élever leur voix pour défendre Haïti contre les attaques, pour exiger la fin de la militarisation de la région et pour réclamer la cessation de l’exercice militaire annuel Tradewinds.
Caribbean Organisation for People’s Empowerment – Sainte-Lucie
Organization for the Victory of the People (OVP) – Guyane
Caribbean Pan Afrikan and Indigenous Movement – Trinité-et-Tobago
Caribbean Movement for Peace and Integration – Barbade
Pan African Coalition of Organizations – Barbade
Cuba rejette la présence d’un sous-marin nucléaire des États-Unis dans la baie de Guantanamo
Le ministère des Relations extérieures rejette catégoriquement l’entrée à Guantanamo le 5 juillet 2023 d’un sous-marin à propulsion nucléaire qui est resté jusqu’au 8 juillet dans cette base militaire étasunienne, ce qui constitue une escalade provocatrice de la part des États-Unis, dont les motivations politiques ou stratégiques sont inconnues.
Comme chacun sait, cette base militaire des États-Unis occupe ce territoire de 117 kilomètres carrés depuis 121 ans, contre la volonté du peuple cubain et en tant que vestige colonial de l’occupation militaire illégitime de notre pays qui a commencé en 1898, après l’intervention expansionniste lors de la guerre d’indépendance des Cubains contre la puissance coloniale espagnole.
Il s’agit d’une enclave qui, depuis de nombreuses années, n’a aucune importance stratégique ou militaire pour les États-Unis. Sa permanence ne répond qu’à l’objectif politique de tenter d’outrager les droits souverains de Cuba. Son utilisation pratique au cours des dernières décennies s’est réduite à servir de centre de détention, de torture et de violation systématique des droits de l’Homme de dizaines de citoyens de différents pays.
La présence d’un sous-marin nucléaire sur ce site à l’heure actuelle soulève la question de la justification militaire de sa présence dans cette partie pacifique du monde, de sa cible et de son objectif stratégique.
Il convient de rappeler que les 33 nations de la région sont signataires de la Déclaration de l’Amérique latine et des Caraïbes comme Zone de paix, signée à La Havane en janvier 2014.
Il est également important de tenir compte du fait que les États-Unis, qui menacent la souveraineté et les intérêts des peuples d’Amérique latine et des Caraïbes, ont établi plus de 70 bases militaires dans la région, avec différents degrés de permanence, ainsi que d’autres formes opérationnelles de présence militaire. Ces derniers temps, leurs hauts responsables militaires ont publiquement fait référence à l’intention d’utiliser leur puissance militaire pour garantir les ambitions des États-Unis sur les ressources naturelles de l’Amérique latine et des Caraïbes.
Notre ministère, tout en réitérant le rejet de la présence militaire étasunienne à Cuba et la demande de restitution du territoire illégalement occupé dans la province de Guantanamo, met en garde contre le danger que représentent la présence et le déplacement de sous-marins nucléaires des forces armées des États-Unis dans la région des Caraïbes.
La Havane, le 11 juillet 2023
Mission d’enquête au Venezuela : déclaration préliminaire et conclusions
La déclaration qui suit a été publiée par la Mission d’enquête au Venezuela du Tribunal populaire international sur l’impérialisme américain, menée du 24 au 28 juillet en compagnie de la National Lawyers Guild (Guilde nationale des avocats) et de l’International Association of Democratic Lawyers (Association internationale des avocats démocratiques).
En notre qualité de Mission d’enquête du Tribunal populaire international, nous dénonçons sans équivoque la guerre hybride de l’impérialisme américain contre le peuple, l’économie et l’État du Venezuela. Tout au long de notre mission, nous avons assisté aux effets brutaux d’un régime de mesures économiques coercitives unilatérales. Nos rencontres, interviews et discussions ont clairement dénoncé les mensonges du gouvernement américain et la propagande des médias institutionnels tendant à définir le Venezuela comme un « État voyou ». Nous avons conclu notre mission le 28 juillet, date anniversaire de la naissance du commandant Hugo Chávez, par notre Session sur le Venezuela et la diffusion publique de notre déclaration.
À l’occasion du 200e anniversaire de la doctrine Monroe, nous rappelons que le blocus économique fait partie de la longue histoire d’asservissement, de colonisation et de soumission des peuples des pays du Sud. Nos rencontres ont contribué à comprendre comment les sanctions visent non seulement à exacerber les contradictions internes au sein de la base sociale organique d’un projet révolutionnaire, mais à détruire les conditions matérielles nécessaires au socialisme. Le régime des sanctions tente de créer la confusion politique parmi la population pour qu’elle se tourne contre son gouvernement, en raison de frustrations légitimes face à un manque de services sociaux et d’accès aux biens publics, plutôt que contre le véritable coupable, l’impérialisme américain. Ce qui apparaît comme une austérité néolibérale est en fait un VOL CRIMINEL occasionné par les sanctions. L’une de nos oratrices, Laura Franco, coordinatrice des échanges et de la coopération à l’Institut Simon Bolivar, nous a dit : « Ceci n’est pas une économie néolibérale, c’est une économie de guerre. »
Les sanctions en tant que politique de « changement de régime »
La confusion politique n’est ni une conséquence accidentelle ni une résultante secondaire du régime de sanctions et de blocus. Elle est destinée à créer un environnement de chaos, prélude à un changement de régime et à fournir des scénarios aux forces de l’opposition, surtout aux sympathisants et complices des États-Unis qui s’emploient à étendre et intensifier le régime des sanctions. Par exemple, la reconnaissance de Juan Guaido en tant que faux « président du Venezuela » par les États-Unis, le Canada et autres puissances impérialistes a servi à fabriquer la propagande ainsi qu’à faire appliquer les sanctions en confisquant les propriétés de l’État vénézuélien (la seule organisation politique légitime du peuple vénézuélien) et en les transférant sous la garde d’une série de forces de « l’opposition » soutenues par les États-Unis, ce qui constitue une autre forme de blocus imposé aux avoirs du peuple vénézuélien.
Nous voyons l’incitation la plus récente à un « changement de régime » dans l’annonce d’une récompense de 15 millions de dollars US pour des informations susceptibles de mener à l’arrestation et/ou la condamnation du président vénézuélien Nicolas Maduro. Cette prime rappelle celles proposées pour les chefs d’État de l’Irak et de la Libye peu avant leur destitution par la violence, puis leur assassinat, et la destruction, la déstabilisation et le pillage de ces États par les forces impérialistes. Ajoutons-y les trois projets de loi introduits au Congrès américain, qui visent à réaliser les mêmes objectifs par des moyens législatifs : la Loi de prohibition des transactions et baux avec le régime autoritaire illégitime du Venezuela, la Loi sur l’atteinte aux droits humains vénézuéliens et la Loi portant sur la démocratie vénézuélienne. Ces projets de loi ont un dénominateur commun : intensifier la pression du blocus et lui imposer une façade d’« assistance humanitaire ». Ceci constitue une escalade de l’ingérence impérialiste dans les préparatifs des élections présidentielles de l’an prochain.
La résistance bolivarienne à l’impérialisme américain
Dans notre mission, nous avons appris bien des choses sur la souffrance du peuple vénézuélien provoquée par le régime impérialiste de sanctions. Mais nous avons également tiré des leçons et de l’inspiration de sa résistance. Nous avons assisté à la résilience et à la créativité des communautés, qui mettent sur pied une capacité et un développement économiques indépendants s’appuyant sur des formes de production de savoir collectives, non capitalistes. Nous avons vu l’ingéniosité et la passion des médecins de l’Hôpital de cardiologie des enfants de l’Amérique latine, qui traitent les cas les plus difficiles tout en faisant face aux pénuries de fournitures et d’équipements médicaux, confirmant ainsi la cruauté et les intentions génocidaires du régime des sanctions. Nous avons aussi été profondément inspirés et édifiés par l’engagement de l’hôpital, non seulement à soigner des patients venus d’en dehors du Venezuela, mais aussi à fournir un enseignement gratuit à de nouvelles générations de médecins au niveau international. Cela est la preuve indubitable de la culture de compassion, de valeurs socialistes et de solidarité de la nation vénézuélienne.
Nous avons été particulièrement frappés par la centralité des femmes dans la résistance. De la lutte en vue de concrétiser la souveraineté alimentaire aux initiatives d’éducation politique, à la défense juridique en ligne de front, aux projets révolutionnaires afro-vénézuéliens de lutte contre la gentrification et la déportation coloniales capitalistes et à leur direction politique à tous les niveaux, les femmes sont la colonne vertébrale de la Révolution bolivarienne.
La mission internationale d’enquête
Notre délégation comprend des avocats, des spécialistes du droit, des universitaires et des animateurs en provenance des États-Unis, du Canada, des Philippines, du Kenya, du Liban, de l’Algérie et de l’Iran. Cette délégation fait partie du Tribunal populaire international sur l’impérialisme américain, un effort international qui enquête sur les régimes de sanctions en tant qu’outils clés de l’impérialisme, lesquels sont utilisés pour saper la souveraineté — surtout économique — des nations des pays du Sud, dans le but de maintenir en place l’ordre capitaliste mondial. Le Venezuela et tous les pays visés par les sanctions américaines ont défié l’impérialisme américain et cherchent à préserver leur indépendance et leur souveraineté face à l’hégémonie américaine. Nous organisons des sessions sur l’impact des sanctions, des mesures économiques coercitives dans 16 pays de l’Amérique latine et des Caraïbes, de l’Afrique et de l’Asie.
Notre mission a examiné les intentions, l’histoire et le cadre juridique du régime des sanctions. Elle consistait entre autres à observer, analyser et entretenir un dialogue sérieux avec des individus impactés, des travailleurs de divers secteurs de l’économie, des communautés, des analystes, des organisateurs politiques et des responsables du gouvernement.
Tout au long de notre mission, nous avons rencontré de nombreuses personnes et organisations, toutes profondément impliquées dans la défense de la Révolution bolivarienne et dans la progression vers le socialisme, en dépit des crimes terribles des États-Unis contre le peuple vénézuélien, et plus particulièrement au cours des huit années écoulées. « Nous refusons de négocier notre révolution sous la menace des sanctions », a déclaré Robert Longa, de la Comuna Socialista El Panal.
Nos rencontres comportaient une réunion avec le vice-ministre vénézuélien des mesures anti-blocus, l’Observatoire vénézuélien contre le blocus, la Comuna d’El Panal, Venezuela Analysis, SURES, le Plan Pueblo a Pueblo, le Mouvement Libérez Alex Saab, la fondation Rompiendo la Norma (Rompre la norme), la fondation Género con Clase (Genre et Classe), l’Hôpital de cardiologie des enfants de l’Amérique latine, le CONADECAFRO (Conseil national pour le développement des communautés de descendance africaine du Venezuela) et le Cumbe Nacional AFROvenezolano.
Notre objectif consistait à mettre en évidence les conséquences des sanctions, telles que vécues et comprises depuis la base, et à délivrer un compte rendu complet de leurs effets socioéconomiques, politiques, culturels et individuels. L’enquête a informé notre compréhension collective et nous a armés de preuves qui ont été présentées ensuite lors de la Session Venezuela du 28 juillet.
Tenir l’impérialisme américain pour responsable
Au moment où nous terminons notre mission au Venezuela, notre tribunal va de l’avant dans son travail de recherche, tant juridique que politique, afin de contester l’impérialisme américain et le blocus qu’il impose au peuple et à la nation du Venezuela. Nous terminerons nos délibérations et communiquerons notre verdict et nos conclusions lors de la clôture des 29 et 30 septembre au Forum du Peuple dans la ville de New York, en marge de l’ouverture de l’Assemblée générale des Nations unies. Aujourd’hui, nous déclarons sans équivoque que les sanctions, les blocus et les mesures économiques coercitives imposées au Venezuela constituent des crimes contre l’humanité, dont le crime de génocide. Le fait que les États-Unis n’ont pas mené à bien leurs efforts de soumission du peuple vénézuélien témoigne de la résistance, de la créativité et de la détermination de ce dernier en développant de nouvelles formes d’action et de production en vue de faire face au blocus.
Nous concluons le travail de notre mission à Caracas avec inspiration, motivation et en nous engageant à mettre tout en oeuvre pour nous opposer à ces crimes contre l’humanité, aux côtés des peuples du Venezuela, de Cuba, de l’Iran, de la Syrie, de la Palestine, du Zimbabwe, de la Libye, de l’Irak, du Yémen, de l’Érythrée et de tous les peuples et nations du monde visés parce qu’ils affrontent l’impérialisme en avançant tous les jours de la résistance à la dignité, à la libération collective, à l’autodétermination et à l’émancipation.
De la Palestine au Venezuela, les crimes impérialistes ne pourront jamais être arrêtés en cédant à ses exigences : C’est la RÉSISTANCE qui l’emportera ! Il est clair, plus que jamais, que l’Empire américain n’est pas capable de réaliser ses objectifs en commettant ces crimes et que nous sommes témoins d’une tentative brutale en vue de maintenir l’hégémonie américaine au sein d’un monde multipolaire émergent.
Il y a un surcroît de responsabilité pour les gens vivant dans le ventre de la bête, consistant à défier les sanctions impérialistes et à tenir l’impérialisme des États-Unis pour responsable de leurs crimes contre l’humanité et du pillage de la richesse des peuples du monde. Nous dénonçons avec force la promotion délibérée de la migration des jeunes populations vénézuéliennes vers les États-Unis et l’imposition d’un faux « rêve américain ». En réalité, cette tendance vise à pousser les Vénézuéliens à rallier les classes laborieuses appauvries, en particulier les communautés noires et de couleur dépossédées, criminalisées et en lutte aux États-Unis, en même temps que les mesures américaines cherchent à appauvrir le Venezuela.
La dévastation orchestrée par l’impérialisme américain est substantielle et évidente dans toute une série d’indicateurs et de domaines, depuis la migration forcée jusqu’à la confiscation des avoirs publics, depuis l’arrestation, l’enlèvement et l’emprisonnement illégal du diplomate vénézuélien Alex Saab jusqu’à l’attaque contre la production et les revenus du pétrole. Dans un même temps, au moment où nous concluons notre mission, nous sommes frappés non seulement par l’énormité des crimes contre l’humanité commis par les États-Unis au Venezuela, mais aussi par la force de la résistance du peuple vénézuélien et de ses organes légitimes de gouvernance et de représentation ainsi que par ses perspectives internationalistes et la clarté de sa vision politique.
Les crimes qui ont lieu au Venezuela sont inséparables de l’impérialisme américain et du capitalisme. S’opposer à ces crimes ne peut se limiter à la sphère juridique, mais requiert un engagement politique clair à vouloir affronter, vaincre et démanteler l’impérialisme et le capitalisme. L’ordre mondial doit changer, de l’unipolarité vers la multipolarité, d’un ordre hostile au peuple à un ordre favorable au peuple, avec la dignité, l’émancipation et l’autodétermination pour tous. Ensemble, nous déclarons : Ces crimes contre l’humanité ne passeront pas ! Nous nous engageons à nous dresser avec le peuple du Venezuela et du monde entier, à faire notre travail dans nos sphères d’action juridique, d’éducation politique et d’organisation populaire pour venir à bout des sanctions, des blocus et des mesures économiques coercitives, à soutenir le peuple vénézuélien et tous ceux qui s’opposent aux sanctions afin de faire progresser le potentiel de la victoire révolutionnaire pour tous nos peuples en lutte.
En lutte jusqu’à la victoire,
Les membres de la mission d’enquête du Tribunal populaire international sur l’impérialisme américain : sanctions, blocus et mesures économiques coercitives
(sanctionstribunal.org, 3 août 2023)
Plein appui à la lutte du peuple péruvien !
Un vigoureux piquetage en appui à la lutte du peuple péruvien qui réclame justice s’est tenu le 19 juillet à 18 h devant les bureaux de Radio-Canada à Montréal. Le même jour un rassemblement a eu lieu à l’heure du midi devant le consulat péruvien au centre-ville de Montréal. Ces actions font partie d’une journée internationale d’appui au peuple péruvien qui, ce même jour, arrivant en autobus, en autos et à pied des quatre coins du pays, a convergé à Lima, la capitale du Pérou. La mobilisation au Pérou, appelée « Troisième prise de Lima », a été convoquée par une large coalition de syndicats, d’organisations paysannes et indigènes, de partis et de groupes artistiques dans le but de poursuivre la lutte contre le régime putschiste de Dina Boluarte.
Des rassemblements se sont tenus également devant les consulats et ambassades du Pérou à New York, Washington DC, Dallas, New Jersey, Buenos Aires, Madrid, Barcelone, le Pays basque, Paris, Milan et ailleurs,
À Montréal, les manifestants ont dénoncé le coup d’État du 7 décembre 2022 contre le président légitimement élu, Pedro Castillo, et la corruption sans bornes du gouvernement actuel. Ils ont demandé la fin de toute ingérence étrangère dans leur pays dont celle des États-Unis et du Canada. Ils ont également exigé du gouvernement canadien qu’il cesse toutes ventes d’armes au Pérou. Selon des données publiées par le gouvernement canadien, le Canada a exporté au Pérou des biens et de la technologie militaires pour une valeur de 81,4 millions de dollars, entre 2014 et 2021[1].
Ils ont réitéré leur appui aux demandes du peuple péruvien : la mise en place d’une assemblée constituante pour réécrire la constitution du pays, la démission de Dina Boluarte, la libération immédiate de Pedro Castillo, la restitution à son poste de président et la justice pour les centaines de victimes de la répression policière.
Note
1. Amnistie internationale, communiqué du 3 mai 2023
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