L’esprit de 46
75e Anniversaire de la grève de Stelco de 1946
Il y a 75 ans, le 15 juillet 1946, les métallos de Hamilton, en Ontario, ont affronté le plus grand producteur d’acier du pays dans une grève cruciale pour la reconnaissance syndicale. Grâce à un solide soutien de la communauté, ils ont tenu bon pendant près de trois mois pour remporter une victoire historique le 4 octobre 1946.
Dans le monde entier, à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, des centaines de millions de travailleurs et d’opprimés aspiraient au changement et le réclamaient. Le système socio-économique impérialiste était affaibli. Un nouvel État socialiste existait sur un sixième du globe. Dans les pays industrialisés, on assistait à une recrudescence des mouvements pour les droits, l’indépendance nationale et la libération nationale en Asie, en Afrique et en Amérique latine.
Aux États-Unis et au Canada, le grand capital s’engraissait des profits de la guerre. L’économie de guerre ne profitait pas aux travailleurs, que ce soit au pays ou à l’étranger. Un mouvement de grève massif a éclaté, connu sous le nom de « Spirit of ’46 », qui incarnait cette lutte. Aux États-Unis, selon le Bureau of Labor Statistics, au cours des 18 mois qui ont suivi, quelque 7 millions de travailleurs ont participé à la vague de grèves la plus importante et la plus soutenue de l’histoire américaine. Environ 144 millions de jours de travail ont été perdus au cours de ces 18 mois, soit plus que pendant toute la décennie des années 1980 ou 1990 et à peine moins que le total des « jours d’arrêt de travail » de ces deux décennies combinées. Au Canada, 70 688 travailleurs ont participé à 36 grèves en juin 1946[1].
L’esprit de 46 annonçait au monde entier la réclamation des travailleurs à la richesse qu’ils créent et la position de leurs collectives, y compris la reconnaissance du syndicat en vertu de la loi.
Les travailleurs de l’acier de Stelco ont mené une grève historique à Hamilton, au Canada, en 1946 pour forcer le gouvernement à reconnaître leur syndicat, la section locale 1005 du Syndicat des Métallos, et pour améliorer leurs salaires et leurs avantages sociaux, ainsi que pour établir leurs pensions. Lorsque l’entreprise s’est arrangée pour que la Police provinciale de l’Ontario et la GRC attaquent les lignes de piquetage, les résidents de Hamilton de tous les secteurs se sont ralliés à la défense des travailleurs en grève. À un moment crucial de la grève, des centaines d’anciens combattants de la Deuxième Guerre mondiale ont défilé du parc Woodlawns jusqu’aux portes de Stelco. Le fort contingent italien des grévistes organisait souvent des buffets de masse, les hommes et les femmes préparant la nourriture pour des milliers de grévistes affamés. Un soir, plus de 6 000 dollars de dons ont été recueillis et « l’argent a servi à poursuivre la grève en fournissant davantage de nourriture et d’autres produits de première nécessité. Certains commerçants et agriculteurs locaux manifestaient leur sympathie en accordant un crédit et en donnant des tonnes de nourriture. Des artistes se rendaient régulièrement sur les piquets de grève »[2].C’était un appui public concret qui a grandement assisté les travailleurs.
En 1946, les travailleurs et leur communauté ont pu faire des gains parce que le syndicat s’est battu et qu’ils avaient le soutien d’une masse critique de travailleurs face à de grandes difficultés. Tout au long de son histoire, la section locale 1005 a fait face à des attaques constantes de la part de directeurs et de cadres supérieurs qui voulaient la démolir et imposer leur volonté aux travailleurs en toute impunité. Les travailleurs ont toujours lutté pour défendre leurs droits et les droits de tous, surtout depuis le lancement de l’offensive antisociale dont l’un des objectifs est de démanteler le syndicat, de refuser de négocier de bonne foi et de traiter les travailleurs comme des personnes non indispensables. Les métallos de Hamilton ont montré à maintes reprises que la sécurité est dans la lutte pour les droits de tous. Sur cette base, ils peuvent réussir. Ils ont inspiré le mouvement des travailleurs et tous les Canadiens à l’échelle nationale.
Notes
1. Tiré de It Started with a Whisper : A History of the 1946 Strike, publié par la section 1005 du Syndicat des Métallos le 1er janvier 1996 à l’occasion de son 50e anniversaire, page 26.
2. « The Siege of ’46 », sur l’histoire de la grève de 1946 chez Stelco, qui fait partie d’une collection numérique sur l’histoire du travail et de la technologie à Hamilton et dans le district, affichée sur le site Web de l’Université McMaster, dans le cadre du programme SchoolNet Digital Collections d’Industrie Canada.
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