In MemoriamAjit Singh Bains1922-2022 |
Éminente personnalité du monde du judiciaire, Ajit Singh Bains est décédé paisiblement à Chandigarh, au Pendjab, le 11 février. Des expressions de chagrin et d’admiration affluent du monde entier.
Ajit Singh est né dans une famille patriotique de Mahilpur, dans le district de Hoshiarpur, au Pendjab, en 1922, il y a cent ans, alors que l’Inde et le monde vivaient de grands bouleversements. Il a grandi dans les conditions de la lutte contre la domination britannique. Son père, Gurbakhsh Singh, était continuellement en prison ; il a été torturé et forcé de vivre dans la clandestinité parce qu’il combattait les Britanniques. Il est plus tard devenu sarpanch de Mahilpur et, à ce titre, il a veillé à ce que Mahilpur garde le droit chemin et se tienne à l’écart des tueries qui ont caractérisé la partition de l’Inde. On lui attribue le fait qu’il n’y a pas eu un seul cas de tuerie sectaire à Mahilpur durant cette période.
Sa mère a élevé Ajit et ses six frères et soeurs courageusement, en l’absence de leur père, et leur a inculqué des traditions patriotiques et la culture du peuple. Malgré les temps difficiles, elle laissait toujours une portion de nourriture au cas où un voyageur aurait besoin d’un refuge pendant la nuit. Elle encourageait ses enfants à étudier. Ajit a obtenu un diplôme d’études supérieures malgré de nombreuses difficultés et ses soeurs sont allées au collège, les premières femmes à aller au collège Khalsa de Mahilpur et à gagner leur vie comme femmes indépendantes.
Le courage de ses parents et celui des combattants de la liberté, leur intégrité et leur approche fondée sur des principes face aux problèmes de la vie ont marqué Ajit. Le soutien qu’il a apporté à la famille et l’accent qu’il mettait sans relâche sur l’importance de l’éducation ont porté leurs fruits dans les carrières distinguées de ses jeunes frères et soeurs, dont son illustre frère Yashdip Singh, qui a été premier tout au long de ses études au Pendjab et est devenu un éminent spécialiste des oeuvres de Shakespeare, et Hardial Singh, homme de science et leader communiste d’un courage inébranlable, et ses filles, fils et petits-enfants.
Ajit a commencé sa carrière comme chargé de cours au département d’économie au collège Khalsa de Jalandhar. Se voyant nier la possibilité d’obtenir un poste permanent d’enseignant en raison de sa politique progressiste, il a fait des études de droit à Lucknow, où un oncle paternel était en poste dans l’armée. Pendant ces années, il a participé activement à la défense des droits du peuple et c’est ce qui le caractérisera jusqu’à sa mort.
Ajit a ouvert un cabinet d’avocats à Hoshiarpur en 1954, avant de passer à la Haute Cour en 1961. Le juge Bains a été élu au Conseil du barreau du Pendjab en 1964 et a été nommé juge-avocat général adjoint par le gouvernement du Pendjab. Il est devenu président du Conseil du barreau du Pendjab et de l’Haryana en 1972 et juge à la Haute Cour du Pendjab et de l’Haryana en 1974 jusqu’à sa retraite en 1984.
Le gouvernement du Pendjab a nommé le juge Ajit Singh Bains à la tête de la Commission Bains en octobre 1985, qui avait pour mandat d’examiner les cas de personnes faisant l’objet d’un procès ou d’une enquête en rapport avec l’agitation politique entre 1981 et 1985. Il a également été nommé membre du Comité de réforme du système carcéral du Pendjab, poste duquel il a ensuite démissionné pour protester contre l’entrée des forces paramilitaires dans le Temple d’Or le 30 avril 1986, dans le cadre de l’opération Black Thunder. Le juge Bains s’est élevé contre les actions des autorités, de la Garde de la sécurité nationale et de ses commandos frontaliers, et contre ceux qui se disaient « leaders sikhs modérés » et d’autres qui louaient l’action de la police pour avoir « débusqué les terroristes, les séparatistes et les éléments anti-religieux ».
Le juge Bains a ensuite été le fondateur et président de l’Organisation des droits humains du Pendjab. En 1987 et 1988, il a effectué de nombreux voyages au Canada, aux États-Unis et en Europe pour faire connaître la situation au Pendjab et la violation des droits humains dans cette région. Il a donné des conférences dans de nombreuses universités et a été conférencier invité de nombreuses organisations professionnelles et communautaires. Il a également rencontré des législateurs de divers pays, des membres de la Commission internationale des juristes à Genève et des journalistes de partout pour donner son point de vue sur la situation en Inde.
En tant qu’avocat, puis en tant que juge de la Haute Cour, le juge Bains s’est occupé de nombreuses affaires controversées, notamment celles touchant aux droits humains. Il est devenu célèbre pour son intégrité, ses principes élevés et son refus de se laisser influencer dans ses jugements, y compris lorsqu’il a rendu une décision condamnant Beant Singh à une peine de prison. Lorsque Beant Singh est ensuite devenu ministre en chef du Pendjab, il a cherché à se venger, mais il a été reconnu coupable d’avoir causé la mort de 25 000 citoyens, crime pour lequel il a été assassiné le 31 août 1995 par deux hommes qui ont ensuite été déclarés martyrs de la nation.
Le juge Bains a écrit de nombreux discours et ouvrages importants, dont le livre Le siège des sikhs en 1988, apportant des informations précieuses et tirant les conclusions qui s’imposaient concernant la violation des droits humains au Pendjab. Il a également écrit une importante brochure intitulée Le terrorisme d’État et les droits de l’homme, alors qu’il était incarcéré à la prison de Burail, au Chandigarh, en 1992. Il a été enlevé, maltraité et maintenu en détention sans recours du 3 avril 1992 au 19 août 1992, date à laquelle les autorités ont été contraintes de le libérer en raison du tollé national et international. Dans cette brochure, Ajit Singh Bains donne une définition inégalée du terrorisme individuel et d’État et explique comment les États utilisent le terrorisme comme méthode pour saper les luttes justes, qu’elles soient armées ou non.
Tout au long d’une vie longue et productive au service des tribunaux indiens et après sa retraite, Ajit Singh a maintenu des liens familiaux étroits et affectueux. Il est décédé très aimé et respecté, un vrai fils du peuple courageux du Pendjab.
Centre de ressources Hardial Bains
secretariat@hbrc-crhb.org
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