Les militants et les résidents de la région de Peel continuent de réclamer la fin de l'impunité policière


Action de Mississauga pour exiger que la police rende des comptes, 20 octobre 2020

Des militants et des résidents du quartier de Malton dans la Région de Peel, à l'ouest de Toronto, continuent de réclamer la fin de l'impunité policière face au retard inexcusable pris pour rendre justice aux familles des trois hommes qui ont été tués par balle par la Police régionale de Peel plus tôt cette année.

Jamal Francique, âgé de 28 ans, a été tué lors d'une « interaction » avec des agents de la Police régionale de Peel (PRP) le 7 janvier 2020 à Mississauga, qui fait partie de la Municipalité régionale de Peel. L'affaire a immédiatement été transférée à l'Unité des enquêtes spéciales (UES), l'organisme ontarien responsable d'enquêter sur les incidents à l'origine de décès ou de blessures pouvant avoir été causés par un crime commis par un agent de police. Un communiqué de presse publié par l'UES le 24 juillet 2020 indique que « le travail sur le terrain est pratiquement achevé » et que l'identité de « l'agent impliqué », celui qui a effectivement tiré et tué M. Francique, est connue.

La Loi sur les services policiers de l'Ontario impose au directeur de l'UES l'obligation de recommander des accusations criminelles contre un agent en service dont on sait qu'il a tué ou blessé quelqu'un dans tous les cas où il existe des « motifs raisonnables » de porter des accusations. Cependant, cela fait plus de neuf mois que M. Francique a été tué et au moins deux mois depuis que le travail sur le terrain a été « pratiquement achevé » et que le tueur a été identifié. Pourtant, aucune raison n'a été donnée à la famille ou au public pour expliquer pourquoi les accusations n'ont pas été annoncées.

D'Andre Campbell, 26 ans, a également été tué lors d'une « interaction » avec la Police régionale de Peel à Brampton, qui fait également partie de la Municipalité régionale de Peel, le 6 avril 2020. Dans un communiqué de presse publié par l'UES le 11 juin 2020, il est indiqué que l'identité de l'« agent impliqué » est connue et que l'UES dispose des déclarations des quatre autres agents de police présents ainsi que de quatre membres de la famille de M. Campbell. Cela fait maintenant plus de six mois que M. Campbell a été tué et plus de quatre mois que l'UES a des « motifs raisonnables » d'inculper le tireur. Pourtant, aucune explication n'a été donnée à la famille ou au public pour le retard dans la mise en accusation.

Ejaz Choudry, 62 ans, père de quatre enfants, était seul dans son appartement à Malton, un quartier de Mississauga, lorsqu'il a été tué lors d'une « interaction » avec la Police régionale de Peel le 20 juin 2020. Trois agents de la Police régionale de Peel ont grimpé une échelle menant au balcon du deuxième étage, ont poussé la porte de l'appartement et, en quelques secondes, ont commencé à tirer dans l'entrée. Ils sont ensuite entrés dans l'appartement où l'un d'eux a tiré sur M. Choudry à deux reprises et l'a tué, même si la victime ne présentait aucun danger pour personne. L'événement a été filmé sur vidéo par un voisin qui habite de l'autre côté de la rue. Dans un communiqué de presse publié par l'UES le 21 juin 2020, l'UES a reconnu être en possession de la séquence vidéo. Le communiqué de presse a également confirmé que l'« agent impliqué » avait été identifié et que les deux autres avaient été interrogés. Cela fait maintenant quatre mois que l'UES dispose de preuves suffisantes pour porter des accusations contre l'agent qui a tué M. Choudry, mais aucune réponse n'a été donnée à la famille ou à la communauté quant aux raisons pour lesquelles le tireur continue d'échapper à toute poursuite criminelle et, vraisemblablement, a été autorisé à continuer à exercer ses fonctions dans la communauté.

Un autre incident scandaleux s'est produit le 10 mai dernier, qui a cette fois causé des blessures graves à une autre victime innocente. Deux agents de Peel ont répondu à un appel de violence familiale dans une résidence de Mississauga. Au cours de l'interaction avec la police, les policiers ont déchargé leurs armes à impulsions électriques sur Chantelle Krupka et son conjoint Michael Headley.

Alors qu'elle était au sol, Mme Krupka a reçu une balle dans l'abdomen d'un des policiers sans raison valable. Mme Krupka a pu être opérée pour une fracture à la hanche et est devenue une ardente défenseure de la justice pour toutes les victimes. En représailles, la police a porté des accusations criminelles douteuses contre elle et M. Headley, pour lesquelles aucun jugement n'a encore été prononcé.

Depuis la mort de M. Choudry le 20 juin, des militants de la communauté et des membres des familles des victimes ont tenu une série d'actions pour exiger justice pour les victimes et pour unir la communauté afin de prendre position contre l'impunité policière. Depuis le 21 juin, des militants ont occupé l'intersection de Goreway Drive et Morningstar Drive à Malton, où M. Choudry habitait, pour attirer l'attention sur le nombre alarmant d'interactions mortelles avec la Police régionale de Peel cette année.


Manifestation devant le quartier général de la Police régionale de Peel pour exiger justice pour Ejaz Choudry, 27 juin 2020

Par la suite, le 27 juin, une manifestation de 300 personnes a eu lieu devant le nouveau quartier général de la police de la région de Peel pour dénoncer les morts aux mains de la police. Les amis et les familles des victimes ont pris la parole pour exprimer leur chagrin et exiger justice. Deux imams de mosquées de la région où M. Choudry était connu pour sa gentillesse et sa douceur se sont joints à cette manifestation.


Les résidents de la communauté au rassemblement du 1er juillet 2020

Le 1er juillet, un rassemblement auquel ont participé des centaines de personnes du quartier s'est tenu de nouveau au même coin de rue à Malton où M. Choudry habitait. Les porte-parole des familles des victimes ont décrit comment elles ont été confrontées au silence de l'UES et aux vaines promesses d'indemnisation des autorités locales. Les orateurs ont exigé que l'identité des tireurs soit révélée et qu'ils soient renvoyés afin que la communauté puisse commencer à se sentir en sécurité sachant que les tueurs ne seraient plus libres de poursuivre en toute impunité leurs agissements criminels.


Manifestation devant la 22e division de la police de Peel, 16 juillet 2020

Le 16 juillet, des militants ont tenu une manifestation devant 22e division de la police de Peel pour exiger l'abandon des accusations concoctées contre Mme Krupka et M. Headley. Au moment où la manifestation allait commencer, Mme Krupka a appris de l'UES que la policière qui lui a tiré dessus, Valerie Briffa, avait été accusée de négligence criminelle causant des lésions corporelles, d'agression armée et de négligence lors de l'utilisation d'une arme à feu (mais pas de tentative de meurtre). Mme Briffa, policière en probation depuis huit mois, a déjà démissionné de la police.


La marche et la vigile du 20 juillet 2020

Le 20 juillet, un mois après la mort aux mains de la police de M. Choudry, une marche et une veillée ont été organisées à Malton, encore une fois pour exiger la fin de l'impunité policière, surtout compte tenu de l'absence de réponse de l'UES dans les cas des trois morts par balles.

Une autre manifestation pour exiger que la police rende des comptes a eu lieu à Brampton le 23 août, au cours de laquelle les familles des victimes ont à nouveau expliqué à la communauté et aux médias comment elles avaient été traitées. Deux membres de la famille de M. Francique ont présenté une chanson de rap dédiée à sa mémoire et une jeune femme a également chanté une chanson de rap qu'elle avait écrite pour dénoncer les fausses préoccupations officielles bidon au sujet du racisme systémique, intitulée « Why is It Taking So Long ? » Des membres de la famille de deux autres personnes qui sont mortes, dans des incidents distincts, sous la garde de l'État dans l'Est de l'Ontario, au Centre de détention du Centre-Est à Lindsay, ont présenté leurs témoignages émouvants.

Exigeant des comptes des politiciens lors de la rencontre du 2 septembre 2020

En réponse à une campagne d'affichage exigeant une action des autorités locales, les militants ont été contactés par le bureau de la mairesse de Mississauga, Bonnie Crombie, qui a accepté de les rencontrer pour discuter de la violence policière. Le 2 septembre, une rencontre a eu lieu au centre communautaire de Malton, à laquelle ont participé Mme Crombie, le maire de Brampton, Patrick Brown, et le député provincial local, Deepak Anand. Lors de cette rencontre, les membres des familles des victimes ont exprimé leur indignation directement aux trois politiciens, en particulier aux maires, qui ont écouté poliment et ont déclaré qu'ils seraient heureux de faire une déclaration publique de soutien. Cependant, les maires ont refusé d'inclure la moindre condamnation des morts aux mains de la police en invoquant leur conviction que cela compromettrait leurs positions au sein de la commission des services de police de la région. Bien que les documents de l'UES montrant qu'il y avait des motifs d'inculper sans plus tarder les policiers qui avaient tirés leur aient été remis, les politiciens ont refusé de faire une déclaration qui reconnaît que les policiers impliqués dans ces morts et qui ont été identifiés devraient être tenus responsables de leurs crimes.

Marche de Mississauga pour exiger que la police rende des comptes, 20 octobre 2020

Face au silence persistant de l'UES et à la trahison des maires, une manifestation militante de plus de 30 résidents a eu lieu à l'heure de pointe du soir à Malton le 20 octobre dernier pour exiger une nouvelle fois la fin de l'impunité policière et la justice pour les victimes. Les piqueteurs ont déployé des pancartes sur lesquelles on pouvait lire « Punissez les criminels de la police », « Inculpez les tueurs de la police », « Mettez fin à l'impunité des brutalités policières », « Arrêtez la violence policière » et « Indemnisez les familles des victimes ».

De nombreux automobilistes en signe de soutien ont klaxonné en passant et levé le poing, et des résidents du quartier ont laissé leur nom et leurs coordonnées pour être informés des actions futures. L'événement s'est tenu à l'occasion du quatrième mois depuis la mort par balle d'Ejaz Choudry. Des membres de la famille de M. Choudry se sont joints à la manifestation, apportant avec eux leurs propres pancartes, dont « Le silence, c'est de la violence ».

En date du 22 octobre, l'Unité des enquêtes spéciales n'a toujours pas annoncé les accusations qui seront portées contre les tueurs des trois morts par balles, ni donné de raison pour ce retard inadmissible. Les militants et les membres de la communauté prévoient de continuer à faire entendre leur voix pour que la police rende des comptes. Des actions de sensibilisation sont menées en vue d'une nouvelle manifestation en novembre pour exiger la fin de l'impunité et obtenir des compensations pour les familles des victimes.

(Photo : LML)


Cet article est paru dans

Volume 50 Numéro 65 - 24 octobre 2020

Lien de l'article:
Les militants et les résidents de la région de Peel continuent de réclamer la fin de l'impunité policière - Lorne Gershuny


    

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