Les Premières Nations du Manitoba tiennent un blocus justifié au barrage de Keeyask


Le 21 mai 2020, la nation crie Tataskweyak continue de bloquer la route provinciale 280 pour protéger la communauté contre l'exposition à la COVID-19.

Les quatre Premières Nations manitobaines partenaires d'Hydro Manitoba dans le Partenariat de l'hydroélectricité Keeyask Limitée (PHKL) appuient les actions prises par la nation crie de Tataskweyak le 14 mai pour barrer la route provinciale 280 et la principale barrière et le point d'accès nord de Keeyask. Keeyask est une centrale hydroélectrique de 695 mégawatts qui est en voie de construction sur la rivière Nelson à 725 kilomètres au nord de Winnipeg et qui doit être complétée en 2021. Les quatre Premières Nations membres du partenariat avec Hydro Manitoba sont la nation crie de Tataskweyak, la nation crie du lac Fox, la Première Nation du lac War, et la nation crie de York Factory.

La barricade a été dressée pour arrêter la propagation du virus de la COVID-19 dans leur communauté. Le 18 mai, Hydro Manitoba a servi une injonction de dix jours à la nation crie de Tatskweyak de la Cour du Banc de la Reine du Manitoba pour démanteler la barricade. Le lendemain, Manitoba Keewatinowi Okimakanak (MKO) Inc., qui représente 26 Premières Nations signataires des traités 4, 5, 6 et 10, a publié une déclaration d'appui au barrage routier. Aussi le 19 mai, la nation crie du lac Fox a déclaré un état d'urgence et a mis sa communauté en confinement tout en dressant une autre barricade au niveau de l'accès sud du site de construction. Le 20 mai, plus de cent personnes se sont rassemblées sur les lieux de la législature manitobaine pour contester l'injonction, se joignant aux activistes qui étaient campés sur les lieux depuis le 14 mai en solidarité avec le barrage routier.

L'action de la nation crie de Tataskweyak est une réponse à la décision d'Hydro Manitoba de faire entrer 1 200 nouveaux travailleurs sur le site au cours des prochains mois, y compris des travailleurs des quatre coins du Canada et d'autres des États-Unis. L'arrivée de ces travailleurs permettra aux 600 à 700 travailleurs qui sont sur le site depuis le mois de mars de partir. Ces derniers se sont portés volontaires pour rester sur le site pour arrêter la rotation normale des travailleurs et le va-et-vient au site dans les conditions de la pandémie de la COVID-19. Maintenant, avec l'approbation du médecin-hygiéniste en chef du Manitoba, Hydro Manitoba compte restaurer les rotations régulières de travail, malgré le fait que le nord du Manitoba soit fermé aux déplacements non essentiels.

Les Premières Nations partenaires du PHKL n'ont jamais été d'accord avec la décision de poursuivre la construction. Elles ont proposé que Keeyask soit mis en mode « entretien et maintenance » avec environ 250 travailleurs. Le chef de la Première Nation de York Factory, Leroy Constant, dans un reportage d'APTN du 19 mai, affirme : « Nous discutons de ces questions depuis plusieurs semaines, mais il semble que nos partenaires d'Hydro Manitoba ne sont pas intéressés à entendre nos préoccupations. Ce n'est pas comme ça que fonctionne un partenariat... Si Hydro Manitoba devait réduire le nombre de gens travaillant au projet en attendant que nous venions à bout de cette pandémie, ce serait une expression de respect envers les préoccupations que nous avons pour la santé et le bien-être de nos peuples. »

Les Premières Nations du nord du Manitoba sont passées à l'action pour protéger leurs communautés en gérant l'accès dans le but de prévenir l'introduction et la propagation de la COVID-19. Elles devraient être épaulées par les gouvernements fédéral et provinciaux et les autorités de la santé, mais au Manitoba, comme dans d'autres provinces, les grands projets de construction ont été exemptés des restrictions aux déplacements et seraient donc « essentiels ». Les inquiétudes engendrées par cette décision ont été confirmées par la transmission de la COVID-19 en raison des déplacements provenant du projet de sables bitumineux de Kearl Lake près de Fort McMurray en Alberta. Selon les Services de la santé de l'Alberta en date du 20 mai, l'éclosion sur le site de Kearl Lake est liée à 84 cas en Alberta, 19 en Colombie-Britannique et un en Nouvelle-Écosse, Terre-Neuve et au Labrador respectivement.

Tout au cours de la pandémie et des mesures d'urgence qui ont été prises par les gouvernements provinciaux pour restreindre les déplacements et fermer tout sauf les services et la production essentiels, les Premières Nations et les communautés éloignées ont agi conformément à leurs propres circonstances, tenant compte du niveau des services de santé et des conditions qui augmentent la vulnérabilité des gens de ces communautés. Les préoccupations liées à la classification des camps industriels en tant qu'« essentiels » avec des centaines de travailleurs sur les projets comme Kearl Lake et d'autres en Alberta, Keesyask, le site C, LNG Canada et Coastal GasLink en Colombie-Britannique, Muskrat Falls au Labrador et d'autres ont été soulevées par les organisations autochtones, les professionnels de la santé et les syndicats, y compris des syndicats des métiers de la construction qui représentent certains des travailleurs dans les camps.

Le 29 avril, l'Union des chefs indiens de la Colombie-Britannique a publié une déclaration portant le titre : « Les gouvernements doivent respecter les compétences des Premières nations
 », dans laquelle le Conseil des leaders des Premières nations exhorte « tous les ordres de gouvernement, fédéral, provincial et municipal, à reconnaître et à respecter les compétences et les décisions des Premières Nations lorsqu'ils prennent des mesures pour protéger leurs collectivités pendant la pandémie de la COVID-19. Il est essentiel que tous les ordres de gouvernement incluent et collaborent avec les Premières Nations voisines dans leurs efforts collectifs de lutte contre la COVID-19. »

(Photos : Manitoba Keewatinowi Okimakanak, L. Beardy, N. Nechoway)


Cet article est paru dans

Volume 50 Numéro 35 - 23 mai 2020

Lien de l'article:
Les Premières Nations du Manitoba tiennent un blocus justifié au barrage de Keeyask - Barbara Biley


    

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