Le Marxiste-Léniniste

Supplément

11 novembre 2018

Numéro 5

Poèmes à l'occasion du centenaire
de la fin de la Première Guerre mondiale

Un moment de réflexion tranquille

Monuments en Alberta (à gauche) et en Saskatchewan détiés aux personnes injustement internées par le gouvernement canadien au cours de la Première Guerre mondiale, rappels de la répression au pays qui accompagne la guerre impérialiste à l'étranger

Aujourd'hui, nous entendrons beaucoup parler du jour du Souvenir et de ce qu'il faut retenir en ce jour du Souvenir. Par exemple, on nous dit que le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, est à Paris pour une commémoration spéciale du centenaire de l'Armistice, suivi d'un « Forum de la paix ». La première ministre britannique Teresa May, le premier ministre belge Charles Michel, le président américain Donald Trump et « plus de 70 autres dirigeants mondiaux » sont également invités. Le « Forum de la paix » discutera des « questions de sécurité internationale ».

Utiliser les commémorations de la fin du plus grand massacre interimpérialiste qu'a connu l'humanité pour promouvoir les préparatifs de guerre interimpérialistes aujourd'hui est inacceptable, mais pourtant c'est ce qui se produit.

La France est le pays sur le sol duquel se sont déroulées nombre des plus grandes batailles de la Première Guerre mondiale. Nombre des 61 000 Canadiens tués en sol étranger ont été inhumés aux côtés des autres tués dans des cimitières en France et dans toute l'Europe. Les Canadiens de tous les horizons se souviendront d'eux aujourd'hui d'une manière qui ne glorifie ni ne justifie les guerres interimpérialistes, ni n'en prépare de nouvelles, comme le font en cette occasion les dirigeants actuels des grandes puissances qui se sont battues durant la Première Guerre mondiale. Ces forces prétendent que le sacrifice des Canadiens pendant la guerre « a contribué à forger une nation ». Ils répètent la phrase du poète officiel de l'empire Rudyard Kipling, « N'oublions pas », avec comme message que, malgré nos pertes et nos souffrances, n'oublions pas qu'ils ont fait leur devoir « pour le pays et pour le roi ». « Ils ne sont pas morts en vain. »

En réponse, LML attire votre attention sur les mots du grand patriote et internationaliste canadien Norman Bethune : « Je refuse de vivre dans un monde qui engendre la corruption et le meurtre, sans lever le petit doigt. Je refuse d'approuver, par inaction ou par insouciance, les guerres que des hommes avides font contre d'autres. »

Nous publions en cette occasion quelques-uns des nombreux poèmes qui expriment la conscience antiguerre et les sentiments de millions d'hommes et de femmes du monde entier au moment de la Première Guerre mondiale. Ils donnent à réfléchir en cette journée du Souvenir, cent ans après la fin de la Première Guerre mondiale

Veuillez noter que cette semaine l'édition régulière du LML est remplacée par les suppléments 1 à 5 sur les commémorations de la fin de la Première Guerre mondiale.


Installation artistique sur un champ de bataille à Ypres en Belgique, commémorant le centenaire de la Première Guerre mondiale, de Koen Vanchchelen : des sculptures individuelles en argile représentent ceux qui sont morts pendant la Première Guerre mondiale.

To What God?
- Harold Monro -

To what God
Shall we chant
Our songs of Battle?
Oh, to whom shall a song of battle be chanted?
Not to our lord of the hosts on his ancient throne,
Drowsing the ages out in Heaven alone.
The celestial choirs are mute, the angels have fled:
Word is gone forth abroad that our lord is dead.

To what God
Shall we chant
Our songs of Battle?
Oh, to whom shall a song of battle be chanted?
If you had only recognised on this day the things that make for peace!
But now they are hidden from your eyes.
Oh, to whom shall a song of battle be chanted?

(Angleterre, 1914)

Summer's Pioneers
- Rabindranath Tagore -

Tired of waiting, you burst your bonds.
Impatient flowers, before the winter had gone.
Glimpses of the unseen comer came into your wayside watch
And you rushed out running and panting.
O restless jasmines, O troop of riotous roses!

You were the first to march to the breach of death.
Your clamour of colour, perfume troubled the air.
You laughed and pressed and pushed each other.
Bared your breasts and dropped to the ground in heaps.

The summer will come in time
Sailing in the flood tide of the South Wind.

(Inde, 1915)

The Gift of India
- Sarojini Naidu -

Is there ought you need that my hands withhold,
Rich gifts of raiment or grain or gold ?
Lo! I have flung to the East and the West
Priceless treasures torn from my breast,
And yielded the sons of my stricken womb
To the drum-beats of the duty, the sabers of doom.
Gathered like pearls in their alien graves
Silent they sleep by the Persian waves,
Scattered like shells on Egyptian sands,
They lie with pale brows and brave, broken hands,
they are strewn like blossoms mown down by chance
On the blood-brown meadows of Flanders and France
Can ye measure the grief of the tears I weep
Or compass the woe of the watch I keep?
Or the pride that thrills thro' my heart's despair
And the hope that comforts the anguish of prayer?
And the far sad glorious vision I see
Of the torn red banners of victory?
when the terror and the tumult of hate shall cease
And life be refashioned on anvils of peace,
And your love shall offer memorial thanks
To the comrades who fought on the dauntless ranks,
And you honour the deeds of the dauntless ones,
Remember the blood of my martyred sons!

(Indie, 1915)


Mes ennemis
- Marc de Larréguy de Civrieux -

Ce n'est, certes, pas vous ! ô soldats étrangers !
Que séparent les monts, les forêts ou les fleuves,
Vous qui fraternisez dans les mêmes épreuves,
Laissant derrière vous orphelins, parents, veuves...
Lorsque vous succombez après d'affreux dangers !

Pendant que nos tyrans convoitent des lambeaux,
Dans l'État de la Mort il n'est nulles frontières...
Nous gisons, côte à côte, aux mêmes cimetières,
Après avoir lutté pendant des nuits entières
Pour conquérir la Paix au fond de nos tombeaux !

Mes ennemis ? c'est vous ! gouvernants timorés,
Qui prenez sans péril une pose de gloire,
Et, dans cette moisson sanglante de l'Histoire,
Ne songez qu'à vous seuls en parlant de victoire,
Ô vous, dont les vertus sont des vices dorés !

Vous qui poussez au meurtre et nous assassinez !
— Hypocrites dévots au coeur de frénésie !
Je voudrais démasquer toutes vos hérésies
Et faire palpiter — parmi mes poésies—
La vengeance de ceux que vous avez damnés !

(France, février 1916, au front)

Le drapeau de révolte
- Marc de Larréguy de Civrieux -

— Je parle en votre nom, ô Frères ignorés,
Qui n'osez pas clamer votre amère souffrance
Et mourez, sans un mot et sans une espérance ;
Pour une humanité aux Chefs déshonorés

Je parle en votre nom, ô Parents qui pleurez
La mort d'un fils, qui fut pour lui sa délivrance,
Et ne pouvez plus croire, après cette navrance,
En vos Bourreaux menteurs qui vous ont tant leurrés

Je parle en votre nom, muets amis de la tombe,
Qui sans cesse accroissez l'inutile hécatombe,
Et surgirez de terre au Jour de Vérité

— En votre nom à tous, je m'adresse à la foule
Pour qu'elle arbore enfin, sur l'Univers qui croule,
Le Drapeau de Révolte et de Fraternité !

(France, mars 1916, au front)

À bas le veau d'or !
- Marc de Larréguy de Civrieux -

A Romain Rolland.

Je hais les lieux communs des mots patriotiques
Et le banal encens des hymnes officiels...
Je veux chanter la Guerre aux visions chaotiques
Qu'ignore maint poète aux vers artificiels !...

Je combats le mensonge et son idolâtrie,
Le joug de la Censure et de l'Inquisition !
Mon passé me rend quitte envers notre Patrie
Et la libre Pensée éclaire ma mission !
Qu'un autre de la gloire ou de l'or soit l'esclave !
Au nom de ma Conscience et de la Vérité
J'arrache le bâillon, je déchire l'entrave
Et proclame crûment mon coeur de Révolté !

Et si, dans le troupeau des Moutons de Panurge
Qui bêlent veulement lorsqu'ils sont fustigés,
Je n'en trouve qu'un seul, qui, comme moi, s'insurge,
Je prêcherai l'exil de nos mauvais Bergers !

D'abord les profiteurs de l'anonyme État,
Qui font, sans en souffrir, acte de stoïcisme,
En hurlant : Jusqu'au bout ! comme leur Gambetta,
Et vouent l'esprit du Sage au plus dur ostracisme !

Ensuite les valets, au Pouvoir prostitués,
(Dont la seule Campagne est celle de la Presse !)
Qui excitent partout les gens à s'entretuer
Sans que rien ne les touche ou que rien ne les presse !

Enfin tous ces gobeurs et tous ces Tartarins,
Qui rêvent de lauriers, de héros, d'épopée,
Sans voir notre existence au fond de souterrains,
Et dont tout le lyrisme aurait peur d'une épée !...

Eh bien ! ces faux bergers, il faut les exiler
Si nous voulons que vive une France nouvelle...
Le peuple, je l'espère, a les yeux dessillés
Et n'attend plus qu'un homme en lui qui se révèle !

C'est pour cet homme-là que je pense et j'écris
Ce livre dans lequel s'insufflera ma vie !
Qu'il ameute la foule et réduise en débris
La Guerre, ce Veau d'or, à gueule inassouvie !

(France, mars 1916, au front)

En temps de guerre
- Stephan G. Stephansson -

Dans les clos d'abattoirs pestilentiels d'Europe
Ils dépècent les corps des hommes assassinés,
Tandis que les marchands ignobles, le groin dans l'auge,
Se gavent des profits ensanglantés!

(Canada, 1916)


Le Feu (extrait)
- Henri Barbusse -

« Voilà que dans les lueurs sinistres de l'orage, au-dessous des nuages noirs échevelés,
étirés et déployés sur la terre comme de mauvais anges, il leur semble voir s'étendre
une grande plaine livide. Dans leur vision, des formes sortent de la plaine, qui est faite de
boue et d'eau, et se cramponnent à la surface du sol, aveuglées et écrasées de fange,
comme des naufragés monstrueux. Et il leur semble que ce sont des soldats. La plaine,
qui ruisselle, striée de longs canaux parallèles, creusée de trous d'eau est immense, et ces
naufragés qui cherchent à se déterrer d'elle sont une multitude... Mais les trente millions
d'esclaves jetés les uns sur les autres par le crime et l'erreur, dans la boue, lèvent leurs
faces humaines où germe enfin une volonté. L'avenir est dans les mains des esclaves,
et on voit bien que le vieux monde sera changé par l'alliance que bâtiront un jour entre
eux ceux dont le nombre et la misère sont infinis. »

(France, 1916)


La chanson de Craonne
- Anonyme -

Quand au bout de huit jours, le repos terminé,
On va reprendre les tranchées,
Notre place est si utile
Que sans nous on prend la pile.
Mais c'est bien fini, on en a assez,
Personne ne veut plus marcher,
Et le coeur bien gros, comme dans un sanglot
On dit adieu aux civilots.Même sans tambour, même sans trompette,
On s'en va là-haut en baissant la tête.

Refrain :

Adieu la vie, adieu l'amour,
Adieu toutes les femmes.
C'est bien fini, c'est pour toujours,
De cette guerre infâme.
C'est à Craonne, sur le plateau,
Qu'on doit laisser sa peau
Car nous sommes tous condamnés
Nous sommes les sacrifiés !

C'est malheureux de voir sur les grands boulevards
Tous ces gros qui font leur foire ;
Si pour eux la vie est rose,
Pour nous c'est pas la même chose.
Au lieu de se cacher, tous ces embusqués,
Feraient mieux de monter aux tranchées
Pour défendre leurs biens, car nous n'avons rien,
Nous autres, les pauvres purotins.
Tous les camarades sont enterrés là,
Pour défendre les biens de ces messieurs-là.

(Refrain)

Huit jours de tranchées, huit jours de souffrance,
Pourtant on a l'espérance
Que ce soir viendra la relève
Que nous attendons sans trêve.
Soudain, dans la nuit et dans le silence,
On voit quelqu'un qui s'avance,
C'est un officier de chasseurs à pied,
Qui vient pour nous remplacer.
Doucement dans l'ombre, sous la pluie qui tombe
Les petits chasseurs vont chercher leurs tombes.

(Refrain)

Ceux qu'ont le pognon, ceux-là reviendront,
Car c'est pour eux qu'on crève.
Mais c'est fini, car les trouffions
Vont tous se mettre en grève.
Ce sera votre tour, messieurs les gros,
De monter sur le plateau,
Car si vous voulez la guerre,
Payez-la de votre peau !

(France, 1917)


Recruited-Poplar
- Margaret Postgate -

They say - they say

(And that's the bugles going all the day
Past Cooper's Arms and round by Stepney way
Till you'll be mad for hearing of them play)

They say - they say

You were the finest stuff men ever had
To make into a soldier. And they say
They put the needed strength and spirit in you,
Straightened your shoulders, made you clean and true,
And fit for England's service - I can say
They clothed you warm, and fed and worked you fair
The first time in your life, on Derby Day;
Maybe that did a little - Anyway
They made a man of you this year, the sort
That England's rich and proud to own, they say

They say - they say

And so they went and killed you. That's their way.

(Angleterre, 1916)

Five Souls
- William Norman Ewer -

First Soul
I was a peasant of the Polish plain;
I left my plough because the message ran: -
Russia, in danger, needed every man
To save her from the Teuton; and was slain.
I gave my life for freedom - This I know
For those who bade me fight had told me so.

Second Soul
I was a Tyrolese, a mountaineer;
I gladly left my mountain home to fight
Against the brutal treacherous Muscovite;
And died in Poland on a Cossack spear.
I gave my life for freedom - This I know
For those who bade me fight had told me so.

Third Soul
I worked in Lyons at my weaver's loom,
When suddenly the Prussian despot hurled
His felon blow at France and at the world;
Then I went forth to Belgium and my doom.
I gave my life for freedom - This I know
For those who bade me fight had told me so.

Fourth Soul
I owned a vineyard by the wooded Main,
Until the Fatherland, begirt by foes
Lusting her downfall, called me, and I rose
Swift to the call - and died in far Lorraine.
I gave my life for freedom - This I know
For those who bade me fight had told me so.

Fifth Soul
I worked in a great shipyard by the Clyde;
There came a sudden word of wars declared,
Of Belgium, peaceful, helpless, unprepared,
Asking our aid: I joined the ranks, and died.
I gave my life for freedom - This I know
For those who bade me fight had told me so.

(Angleterre, 1916)

Who Made The Law?
- Leslie Coulson -

Who spake the word that blood should splash in lanes?
Who gave it forth that gardens should be bone-yards?
Who spread the hills with flesh, and blood, and brains ?
Who made the Law?

Who made the Law that Death should stalk the village?
Who spake the word to kill among the sheaves,
Who gave it forth that death should lurk in hedgerows,
Who flung the dead among the fallen leaves?
Who made the Law?

But who made the Law? the Trees shall whisper to him:
'See, see the blood - the splashes on our bark!'
Walking the meadows, he shall hear bones crackle,
And fleshless mouths shall gibber in silent lanes at dark.
Who made the Law? At noon upon the hillside
His ears shall hear a moan, his cheeks shall feel a breath,
And all along the valleys, past gardens, croft, and homesteads,
He who made the Law,
He who made the Law,
He who made the Law
shall walk along with Death.
WHO made the Law?

(Angleterre, 1916)

Anthem for Doomed Youth
- Wilfred Owen -

What passing - bells for these who die as cattle?
- Only the monstrous anger of the guns.
Only the stuttering rifles' rapid rattle
Can patter out their hasty orisons.
No mockeries now for them; no prayers nor bells;
Nor any voice of mourning save the choirs, -
The shrill, demented choirs of wailing shells;
And bugles calling for them from sad shires.

What candles may be held to speed them all?
Not in the hands of boys, but in their eyes
Shall shine the holy glimmers of goodbyes.
The pallor of girls' brows shall be their pall;
Their flowers the tenderness of patient minds,
And each slow dusk a drawing - down of blinds.

(Angleterre, 1917)

Dulce et Decorum Est
- Wilfred Owen -

Bent double, like old beggars under sacks,
Knock - kneed, coughing like hags, we cursed through sludge,
Till on the haunting flares we turned our backs,
And towards our distant rest began to trudge.
Men marched asleep. Many had lost their boots,
But limped on, blood - shod. All went lame; all blind;
Drunk with fatigue; deaf even to the hoots
Of gas-shells dropping softly behind.

Gas! GAS! Quick, boys! - An ecstasy of fumbling
Fitting the clumsy helmets just in time,
But someone still was yelling out and stumbling
And flound'ring like a man in fire or lime. -
Dim through the misty panes and thick green light,
As under a green sea, I saw him drowning.

In all my dreams before my helpless sight,
He plunges at me, guttering, choking, drowning.

If in some smothering dreams, you too could pace
Behind the wagon that we flung him in,
And watch the white eyes writhing in his face,
His hanging face, like a devil's sick of sin;
If you could hear, at every jolt, the blood
Come gargling from the froth-corrupted lungs,
Obscene as cancer, bitter as the cud
Of vile, incurable sores on innocent tongues, -
My friend, you would not tell with such high zest
To children ardent for some desperate glory,
The old Lie: Dulce et decorum est
Pro patria mori.
[1]

1. Expression latine du poète Horace qui signifie « Il est doux et glorieux de mourir pour sa patrie. »

(1917)

The Modern Abraham
- Osbert Sitwell -

His fingers clutch a large cigar -
Plump, mottled fingers, with a ring or two.
He rests back in his fat armchair. The war
Has made this change in him. As he looks through
His cheque-book with a tragic look he sighs:
'Disabled Soldiers' Fund' he reads afresh,
And through his meat-red face peer angry eyes -
The spirit piercing through its mound of flesh.

They should not ask me to subscribe again!
Consider me and all that I have done -
I've fought for Britain with my might and main;
I make explosives - and I gave a son,
My factory, converted for the fight,
(I do not like to boast of what I've spent),
Now manufactures gas and dynamite,
Which only pays me seventy per cent,
And if I had ten other sons to send
I'd make them serve my country to the end,
So all the neighbours should flock round and say
'Oh look what Mr Abraham has done.
He loves his country in the elder way;
Poor gentleman, he's lost another son!"

(Angleterre, circa 1917)

"Rhyfel" (Excerpt)
- Hedd Wyn -

Rhyfel means war in Welsh. The excerpt below
is followed by the English translation.


"Mae'r hen delynau genid gynt,
Yng nghrog ar gangau'r helyg draw,
A gwaedd y bechgyn lond y gwynt,
A'u gwaed yn gymysg efo'r glaw."

It translates as follows:

"The harps to which we sang, are hung
On willow boughs, and their refrain
Drowned by the anguish of the young
Whose blood is mingled with the rain."

(Pays de Galle, 1917)


Prelude: The Troops
- Siegfried Sassoon -

DIM, gradual thinning of the shapeless gloom
Shudders to drizzling daybreak that reveals
Disconsolate men who stamp their sodden boots
And turn dulled, sunken faces to the sky
Haggard and hopeless. They, who have beaten down
The stale despair of night, must now renew
Their desolation in the truce of dawn,
Murdering the livid hours that grope for peace.

Yet these, who cling to life with stubborn hands,
Can grin through storms of death and find a gap
In the clawed, cruel tangles of his defence.
They march from safety, and the bird-sung joy
Of grass-green thickets, to the land where all
Is ruin, and nothing blossoms but the sky
That hastens over them where they endure
Sad, smoking, flat horizons, reeking woods,
And foundered trench-lines volleying doom for doom.

O my brave brown companions, when your souls
Flock silently away, and the eyeless dead
Shame the wild beast of battle on the ridge,
Death will stand grieving in that field of war
Since your unvanquished hardihood is spent.
And through some mooned Valhalla there will pass
Battalions and battalions, scarred from hell;
The unreturning army that was youth;
The legions who have suffered and are dust.

(Angleterre, 1918)


Exposure
- Wilfred Owen -

Our brains ache, in the merciless iced east winds that knive us . . .
Wearied we keep awake because the night is silent . . .
Low drooping flares confuse our memory of the salient . . .
Worried by silence, sentries whisper, curious, nervous,
But nothing happens.

Watching, we hear the mad gusts tugging on the wire,
Like twitching agonies of men among its brambles.
Northward, incessantly, the flickering gunnery rumbles,
Far off, like a dull rumour of some other war.
What are we doing here?

The poignant misery of dawn begins to grow . . .
We only know war lasts, rain soaks, and clouds sag stormy.
Dawn massing in the east her melancholy army
Attacks once more in ranks on shivering ranks of grey,
But nothing happens.

Sudden successive flights of bullets streak the silence.
Less deadly than the air that shudders black with snow,
With sidelong flowing flakes that flock, pause, and renew,
We watch them wandering up and down the wind's nonchalance,
But nothing happens.

Pale flakes with fingering stealth come feeling for our faces -
We cringe in holes, back on forgotten dreams, and stare, snow-dazed,
Deep into grassier ditches. So we drowse, sun-dozed,
Littered with blossoms trickling where the blackbird fusses.
- Is it that we are dying?

Slowly our ghosts drag home: glimpsing the sunk fires, glozed
With crusted dark-red jewels; crickets jingle there;
For hours the innocent mice rejoice: the house is theirs;
Shutters and doors, all closed: on us the doors are closed, -
We turn back to our dying.

Since we believe not otherwise can kind fires burn;
Now ever suns smile true on child, or field, or fruit.
For God's invincible spring our love is made afraid;
Therefore, not loath, we lie out here; therefore were born,
For love of God seems dying.

Tonight, this frost will fasten on this mud and us,
Shrivelling many hands, and puckering foreheads crisp.
The burying-party, picks and shovels in shaking grasp,
Pause over half-known faces. All their eyes are ice,
But nothing happens.

(1918)

Base Details
- Siegfried Sassoon -

If I were fierce, and bald, and short of breath,
I'd live with scarlet Majors at the Base,
And speed glum heroes up the line to death.
You'd see me with my puffy petulant face,
Guzzling and gulping in the best hotel,
Reading the Roll of Honour. 'Poor young chap,'
I'd say - 'I used to know his father well;
Yes, we've lost heavily in this last scrap.'
And when the war is done and youth stone dead,

I'd toddle safely home and die - in bed.

(1918)

Attack
- Siegfried Sassoon -

At dawn the ridge emerges massed and dun
In the wild purple of the glow'ring sun,
Smouldering through spouts of drifting smoke that shroud
The menacing scarred slope; and, one by one,
Tanks creep and topple forward to the wire.
The barrage roars and lifts. Then, clumsily bowed
With bombs and guns and shovels and battle-gear,
Men jostle and climb to, meet the bristling fire.
Lines of grey, muttering faces, masked with fear,
They leave their trenches, going over the top,
While time ticks blank and busy on their wrists,
And hope, with furtive eyes and grappling fists,
Flounders in mud. O Jesus, make it stop!

(1918)

Aftermath
- Siegfried Sassoon -

Have you forgotten yet ?...
For the world's events have rumbled on since those gagged days,
Like traffic checked while at the crossing of city-ways:
And the haunted gap in your mind has filled with thoughts that flow
Like clouds in the lit heaven of life; and you're a man reprieved to go,
Taking your peaceful share of Time, with joy to spare.
But the past is just the same - and War's a bloody game...
Have you forgotten yet ?...
Look down, and swear by the slain of the War that you'll never forget.

Do you remember the dark months you held the sector at Mametz -
The nights you watched and wired and dug and piled sandbags on parapets?
Do you remember the rats; and the stench
Of corpses rotting in front of the front-line trench -
And dawn coming, dirty-white, and chill with a hopeless rain?
Do you ever stop and ask, 'Is it all going to happen again ?'

Do you remember that hour of din before the attack -
And the anger, the blind compassion that seized and shook you then
As you peered at the doomed and haggard faces of your men ?
Do you remember the stretcher-cases lurching back
With dying eyes and lolling heads - those ashen-grey
Masks of the lads who once were keen and kind and gay ?

Have you forgotten yet ?...
Look up, and swear by the green of the Spring that you'll never forget.

(1918)

A Dirge Of Victory (Sonnet)
- Lord Dunsany Edward Plunkett  -

Lift not thy trumpet, Victory, to the sky,
Nor through battalions nor by batteries blow,
But over hollows full of old wire go,
Where among dregs of war the long-dead lie
With wasted iron that the guns passed by.
When they went eastwards like a tide at flow;
There blow thy trumpet that the dead may know,
Who waited for thy coming, Victory.

It is not we that have deserved thy wreath,
They waited there among the towering weeds.
The deep mud burned under the thermite's breath,
And winter cracked the bones that no man heeds:
Hundreds of nights flamed by: the seasons passed.
And thou last come to them at last, at last!

(Angleterre/Irlande, 1919)

Of the Great White War
- Thomas Burke -

During the years when the white men fought each other,
I observed how the aged cried aloud in public places
Of honour and chivalry, and the duty of the young;
And how the young ceased doing the pleasant things of youth,
And became suddenly old,
And marched away to defend the aged.

And I observed how the aged
Became suddenly young;
And mouthed fair phrases one to the other upon the Supreme Sacrifice,
And turned to their account books, murmering gravely:
Business as Usual;
And brought out the bottles of wine and drank the health
Of the young men they had sent to fight for them.

(Angleterre, 1920)

L'Emballement (extraits)
- Apollinaire Gingras -

Un foyer, une patrie

Devant cet ouragan qui là-bas se déchaîne,
De nos traditions pourquoi rompre la chaîne ?
Ne quereller personne, et borner nos efforts
À défendre au besoin la frontière et nos ports :
À ce pacte sensé dix fois la métropole
N'a-t-elle pas donné sa royale parole ?
Notre patrie est jeune ; elle espère grandir.
Elle est belle et sourit, les yeux sur l'avenir.
Pourquoi lier son sort ,au sort d'un vieil empire ?
Épouser un géant quand peut-être il expire ?
Noble vierge, elle est fière, et veut avoir son tour.
Elle espère être aussi majeure quelque jour.

Des guerres de l'empire accepter le partage ?
Vraiment, nous serions pris dans un bel engrenage !
Il l'est toujours, en guerre, et c'est en égorgeant
Qu'il peint le globe en rouge et se gorge d'argent.
Ce contrôle des mers, ces continents, ces îles,
Qu'il les garde à ses frais, et nous laisse tranquilles.
Jeune peuple exilé dans ces vierges forêts,
C'est la paix qu'il nous faut : la vie et le progrès !
Mais comptez-vous pour rien d'être d'un grand empire
Beau sort, d'être attaché derrière un gros navire !
À lui la gloire ; à lui la riche cargaison. .
À nous les soubresauts et l'écume à foison.
De manoeuvrer à bord pas même l'avantage.
Mettons donc au drapeau : Canot de sauvetage.
Zélande, Transvaal, Australie, Canada :
D'avortons de pays quelle fière Armada !
Libre à qui veut d'errer ainsi de grève en grèves :
Mais pour nous, Canadiens, nous avons d'autres rêves
Oui, nous rêvons un jour , comme tout oisillon,
De tracer dans le ciel notre libre sillon.
Pays d'espoir à qui sourit la Providence,
Notre envol naturel, c'est vers l'indépendance.
Arbrisseau détaché pour refleurir ailleurs,
C'est lui, notre pays : à lui nos bras, nos coeurs !
Défendons la frontière, et nos champs, et nos villes, —
Et nous serons loyaux, mais sans être serviles.
Qu'on ait un souvenir pour l'ancestral berceau ;
Mais que l'on s'enracine à son pays nouveau !
Hybrides citoyens, ceux dont le coeur balance,
Oscillant follement vers l'Empire ou la France.
Anglais comme Français, frères pour l'avenir,
Nos destins sont ici, — pour y vivre et mourir...

(Québec, 1920)

Island Lights
- Geoffrey Fyson -

On the battlefield tourists

VIMY RIDGE
From Arras, on the straight white road
where all marched up, where some limped back,
now, motor-load on motor-load,
the tourists mass for the attack.
Over each splintered track we trod,
over each shelving trench we made,
over each grass-grown space, - Ah God! -
where dust of my friends in dust is laid.
Cheerful, loud-voiced battalions pass,
gorging the sights their money buys
while you who are sleeping 'neath the grass,
you who have waked beyond the skies,
keep everlasting silence. Yet
are glad, maybe, when eve draws on,
when still'd the turmoil is, and fret,
and Arras chants her carillon,
when round-eyed children, with soft tread,
draw near, and frame a diadem
of glowing poppies, that are red
because your blood has watered them.


(Angleterre, 1925)

The White Poppy
- Tom Lashley -

A cold morning on the eleventh of November,
Destruction taints all the world's splendour,
Pastoral fields now trenches with mice,
Only we could make the same mistake twice.

Millions dead and billions affected,
'Wear red and we'll all be protected!'
Instead the red reminds us of pleas,
To be rid of this war, death and disease.

The red poppy is just a fundraising tool,
The white is not to insult or fool,
White signifies no more war,
Red signifies the death of the poor.

We are reminded of war every day,
It causes rupture, death as well as dismay,
Why should we remember it again ?
Peace and love is what to attain.

The link between red and peace is tenuous,
The red poppy's message is disingenuous,
People wear it without reason or rhyme,
Reminding themselves of a deadly time.

So don the white poppy instead of the red,
You don't need to be told to think of the dead,
And for those who say 'lest we forget' in November,
I'll be sure to tell them 'lest we remember'.

(Angleterre, 2015)



Le Canard, Montréal, 24 juin 1917







GRANDE ENTREPRISE (aux travailleurs généreusement) : « Mes chers amis, vous serez bien payés pour votre action patriotique à soigner cette glorieuse plante, vous aurez tous les fruits qui pousseront au-dessus du sol et je ne prendrai que les racines! »)

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