Le
                              Marxiste-Léniniste

Numéro 128 - 24 août 2013

La lutte pour l'affirmation des droits
de tous demeure la pierre angulaire
de la quête de liberté et de justice
de l'humanité


L'historique marche sur Washington, le 28 août 1963

50e anniversaire de la Marche sur Washington
Un lien incassable entre la lutte pour l'affirmation des droits
et le mouvement contre la guerre


La «Journée du Ruban noir» anticommuniste
Barrons la route à la glorification du nazisme!
Défendons les droits de tous!

À titre d'information - Dougal MacDonald
Usage officiel de désinformation au sujet du Pacte de non-agression
L'Union européenne, les États-Unis et le Canada restent
silencieux devant la glorification des collaborateurs
nazis en Estonie
- Margus Tegleb

Rappel historique
Le prétexte d'Hitler: sauver le monde du communisme
Le recours à des mesures d'exception au Canada pour
attaquer les communistes, les syndicalistes et
les Ukrainiens antifascistes
- George Allen


50e anniversaire de la Marche sur Washington

Un lien incassable entre la lutte pour l'affirmation
des droits et le mouvement contre la guerre

Le 24 août, des milliers d'Américains marcheront à Washington à l'occasion du 50e anniversaire de la Marche sur Washington de 1963. Tout comme en 1963, les participants proviendront de toutes les régions des États-Unis et marcheront pour l'affirmation de leurs droits aujourd'hui.


Pendant plus d’un an, en 1955-1956, près de 50 000 Afro-
Américains de Montgomery, en Alabama, ont participé
à un boycott des autobus ségrégés, se déplaçant par tous
les moyens sauf l’autobus.

En 1963, au comble du mouvement pour les droits civils et alors que le mouvement contre la guerre se mettait en branle, le président John F. Kennedy voulut s'en faire le champion pour le détourner vers des objectifs acceptables pour l'élite dominante. De même aujourd'hui, le président Obama fait tout en son pouvoir pour faire croire qu'il est le champion des droits, surtout des droits des jeunes afro- et latino-américains, et ce alors même que les droits de tous subissent un assaut sans précédent partout aux États-Unis et que le pays et sa jeunesse sont entraînés dans des guerres d'ampleur encore plus grande que la guerre du Vietnam il y a 50 ans.

La Marche sur Washington de 1963 exprimait la demande du mouvement pour l'égalité et contre la guerre du Vietnam, soit la demande que le gouvernement fédéral soit imputable pour ses agissements. Réunissant principalement la jeunesse et les étudiants noirs américains mais aussi de nombreux travailleurs, notamment des secteurs de l'automobile et de l'acier, la marche s'est terminée le 28 août avec un rassemblement de plus de 250 000 personnes à Washington. Plus de 2 000 autobus, 21 trains nolisés, 10 avions nolisés et des milliers d'automobiles convergèrent sur Washington. Tous les moyens de transport en provenance des États du sud et du nord étaient utilisés à capacité. Les rapports font état de nombreux déplacements toute la nuit à la gare d'autobus de New York et les services de police du Maryland rapportaient qu'« à compter de 8 heures, il y avait une moyenne de 100 autobus à l'heure qui passaient dans le tunnel du port de Baltimore » en route pour le District de Columbia. Des dizaines de milliers de personnes sont venues des États du sud, mobilisés par la jeunesse et les étudiants. L'ampleur et l'esprit de l'action exprimaient l'impatience des participants face aux appels « à la patience » des autorités qui leur demandaient d'attendre que d'autres lois soient adoptées. Sur les pancartes et par les chants, les participants à la Marche sur Washington proclamèrent : nos droits maintenant !


Manifestation au monument de Washington en
1969 contre la guerre au Vietnam

Alors que certains des leaders officiels de la marche rencontraient des congressistes, les manifestants décidèrent de quitter le Monument de Washington sans eux et se rendirent au Monument Lincoln. Le parc était rempli de manifestants qui scandaient leurs demandes d'égalité. Ce fut la plus grande manifestation jusqu'alors à Washington et rien ne pouvait arrêter sa préparation, pas même les multiples tentatives de détournement de l'administration Kennedy.

Le président Kennedy avait pressé les leaders officiels de la marche, comme A. Phillip Randolf (président de la Brotherhood of Sleeping Car Porters, président du Negro American Labor Council et vice-président de la AFL-CIO), Martin Luther King Jr (président de la Southern Christian Leadership Conference), Roy Wilkins (président de la National Association for the Advancement of Colored People) et Whitney Young (président de la National Urban League), d'annuler la marche. Mais ces derniers n'avaient pas de contrôle sur le mouvement qui s'en prenait au gouvernement fédéral. Les médias tentèrent de créer la panique en parlant d'« émeutes » et de « violence » durant les jours précédant la marche tandis que le Pentagone avait mobilisé 19 000 soldats dans les banlieues de Washington et vidé les prisons en prévision d'arrestations massives. Parmi les jeunes organisateurs tant du sud que du nord se trouvaient de nombreux activistes du mouvement contre la guerre. Ils refusèrent de se laisser intimider ou provoquer et répondirent aux demandes d'annulation en déployant un gigantesque effort de mobilisation et d'organisation pour une participation nombreuse et une action unie.

La Marche sur Washington a réalisé un exploit historique en unissant les forces du sud et du nord dans la lutte pour l'égalité des droits. Jusqu'à ce moment-là, la lutte était surtout concentrée dans le sud, notamment en Alabama, en Géorgie et au Mississippi. De nombreuses batailles avaient été menées dans les années 1950 et au début des années 1960 contre le lynchage, la terreur du KKK, la brutalité policière, pour le droit de vote et contre la discrimination dans les écoles, dans l'emploi et dans le logement. Cela comprend les campagnes de boycottage des autobus à Montgomery, Alabama, en 1955, la lutte pour l'égalité des droits en éducation et contre la ségrégation des écoles secondaires et des universités et les Freedom Rides, les jeunes noirs qui montaient à bord d'autobus inter-État pour contester le non-respect de l'arrêt de la Cour suprême interdisant la ségrégation dans les transports publics. Des étudiants du nord, noirs et blancs, se joignirent à cette bataille pour les droits. Beaucoup avaient connu le racisme et la brutalité policière, aux mains des corps policiers municipaux et d'État mais aussi du gouvernement fédéral et du FBI, qui organisa, incita et protégea les actions provocatrices du KKK.

La marche de 1963 concentrait toute cette expérience acquise dans la lutte pour les droits et en fit un mouvement national pour tenir le gouvernement fédéral responsable des inégalités et des attaques racistes grâce à la participation de la jeunesse et des étudiants du nord. Les participants rejetèrent la demande des cercles officiels, notamment ceux du président Kennedy, d'attendre les tribunaux et l'intervention du gouvernement fédéral pour régler les problèmes.

La marche de 1963 est aujourd'hui présentée comme étant la marche de Martin Luther King Jr. et son discours « I Have a Dream ». Cette interprétation de l'histoire exprime le désir des pouvoirs en place de présenter le mouvement pour les droits de l'époque comme étant limité à la demande de lois garantissant les droits civiques et le droit de vote, lois qui furent adoptées en 1964 et 1965. Il ne fait pas de doute que l'adoption de ces lois est en grande partie attribuable aux batailles rangées qui ont été menées, mais l'importance historique de ces événements est qu'ils ont permis de politiser et d'unir le mouvement et de renforcer la conviction que le peuple doit s'appuyer sur ses propres efforts et tenir le gouvernement fédéral responsable des grandes inégalités. Les efforts d'organisation dans ce sens se sont poursuivis tout au long des années 1960 et 1970, pour mener plus loin la lutte pour les droits. C'est un fait que le mouvement pour l'affirmation des droits se poursuit aujourd'hui malgré les nombreuses tentatives de désinformation et de manipulation pour l'amener à soutenir une section ou une autre de l'élite dominante. Celles-ci veut s'accrocher à son pouvoir et s'arroger de nouveaux pouvoirs pour perpétuer un système qui n'est possible que par des formes toujours plus brutales d'oppression, d'exploitation et d'inégalité.

Le Marxiste-Léniniste tient en haute estime la classe ouvrière américaine dont la lutte pour la défense des droits de tous a empêché la classe dominante de causer encore plus de tort au pays et à l'étranger. Nous saluons plus spécifiquement les contingents afro-américains et latino-américains de la classe ouvrière américaine qui ont été de toutes les luttes importantes aux États-Unis. Ceux qui se battent au même rythme que les peuples du monde ont arrêté maintes et maintes fois le bras destructeur de l'impérialisme américain aux États-Unis et à l'étranger. Il n'y a rien de plus pressant que ce mouvement aujourd'hui.

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La «Journée du Ruban noir» anticommuniste

Barrons la route à la glorification du nazisme! Défendons les droits de tous!

Le 23 août, le gouvernement Harper a sali une fois de plus la réputation du Canada en annonçant l'octroi d'un financement fédéral allant « jusqu'à 1,5 millions $ sur deux ans » à une organisation haineuse appelée Tribute to Liberty (TTL). Ces fonds sont destinés « à un monument commémoratif national aux dizaines de millions d'innocentes victimes de régimes communistes partout dans le monde », lit-on dans le communiqué du gouvernement. En fait, la raison pour laquelle le gouvernement Harper donne cet argent est que cette organisation haineuse n'arrive pas à recueillir les fonds nécessaires pour ledit monument puisque personne ne soutient ce projet abominable.


Des combattants antifascistes de l'Armée populaire polonaise
en 1944. Dans toutes les régions occupées par les nazis,
les partisans ont lutté avec l'Armée rouge soviétique
pour vaincre les nazis.

Le gouvernement Harper a manoeuvré pour que le conseil d'administration de la Commission de la capitale nationale (CCN), nommé par lui, donne un terrain de premier choix sur la rue Wellington, à Ottawa, pour y ériger ce monument. Les administrateurs de la CCN n'ont absolument aucune expertise pour juger si le projet de Tribute to Liberty est digne d'une quelconque reconnaissance. L'octroi d'un emplacement dans le « Jardin des Provinces et des Territoires » proche de l'édifice de Bibliothèque et Archives Canada et de la Cour suprême du Canada est irresponsable et répréhensible. En annonçant que le gouvernement du Canada finance officiellement ce monument, le gouvernement Harper adopte officiellement la propagande hitlérienne qui accuse l'Union soviétique d'être responsable de la Deuxième Guerre mondiale et de la mort de millions de citoyens soviétiques et de citoyens des pays européens.

En fait, le monument est une insulte à la contribution faite par les Canadiens d'un océan à l'autre, de tous les horizons et de pays de tous les coins du monde à la lutte pour vaincre le nazisme, le fascisme et le militarisme japonais avant, pendant et après la Deuxième Guerre mondiale.

Dans sa déclaration à l'occasion de la journée du Ruban noir, le 23 août, proclamée « Journée nationale de commémoration des victimes du communisme et du nazisme en Europe » par le Parlement canadien en décembre 2009, le premier ministre Stephen Harper a dit:

« La journée du Ruban noir marque le triste anniversaire du Pacte Molotov-Ribbentrop conclu par l'Union soviétique communiste et l'Allemagne nazie. Ce pacte a directement mené à l'occupation de nombreux pays européens ainsi qu'à l'assassinat et à l'oppression de leurs citoyens. Cette journée rappelle à quel point il est important de protéger la démocratie et la liberté et d'expliquer aux générations d'aujourd'hui et de demain les crimes contre l'humanité qui ont été commis durant le chapitre le plus sombre de l'histoire. »


Un groupe de partisans juifs de la brigade Chkalov,
en Biélorussie en 1943
.

Le très mal nommé ministre responsable du Multiculturalisme, Jason Kenney, a déclaré lorsqu'il a annoncé ce financement du fédéral:

« C'était en ce jour de 1939 que l'Union soviétique communiste et l'Allemagne national socialiste signaient le Pacte Molotov-Ribbentrop, le traité de non-agression notoire ayant mené à la Deuxième Guerre mondiale.

« Le pacte a tracé la voie à la collaboration des Nazis et des Soviétiques dans le cadre de l'occupation violente des terres de nombreux pays du centre et de l'est de l'Europe. Les souffrances infligées au peuple de ces pays par les deux régimes étaient si horribles que de nombreuses personnes désignent, depuis ce temps, cette région de l'Europe sous l'appellation ‘terres de sang'. [...]


Des pilotes de la Royal Canadian Air Force à la base de
Torbay, à Terre-Neuve, en 1942. Plus d'un million de
Canadiens se sont enrôlés pour combattre le fascisme
durant la Deuxième Guerre mondiale.

« C'est pourquoi aujourd'hui, le gouvernement du Canada a annoncé qu'il établira un partenariat avec l'organisme Tribute to Liberty en vue d'ériger, dans la région de la capitale nationale, un monument commémoratif à la mémoire des victimes du communisme. Ce monument servira à rappeler aux générations futures qu'une telle perversion ne doit jamais se reproduire. »

« Une fois terminé, ce monument commémoratif enseignera aux générations futures le contexte dans lequel des millions de personnes ont perdu la vie et souffert dans des conditions inhumaines sous le joug de régimes communistes. »

« Il servira également à rappeler à tous les Canadiens que la célébration de symboles communistes est une insulte à la mémoire de ces victimes et que nous ne devons jamais considérer comme acquises nos valeurs fondamentales que sont la liberté, la démocratie, les droits de la personne et la primauté du droit. »

Blâmer l'Union soviétique pour l'assaut nazi est d'un sans-scrupules extrême. Pas un mot sur le massacre de millions de personnes par les nazis. Pas un mot sur l'occupation nazie en Europe ou sur le blitzkrieg dans les îles britanniques. Pas un mot sur les camps de la mort et les camps de travaux forcés. Pas un mot sur les exploits héroïques des peuples d'Union soviétique, de toute l'Europe et du monde, y compris du Canada, dans l'effort titanesque pour arrêter l'assaut hitlérien. La Deuxième Guerre mondiale serait la faute de l'Union soviétique!

Ce que le Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste) a indiqué quand ce projet commémoratif a été annoncé il y a quelques années devient de plus en plus évident: ce n'est pas un monument aux victimes de « régimes totalitaires », mais une glorification anticommuniste du nazisme. C'est pourquoi le projet de monument reprend le cri de ralliement des hitlériens et de leurs conciliateurs, l'appel à vaincre le communisme à tous prix.

Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration du Canada, Chris Alexander, a fait savoir que son gouvernement ne représente pas tous les citoyens et immigrants, seulement certains:

« Le Canada est aujourd'hui terre d'accueil de diverses et nombreuses communautés touchées par le communisme dans leur pays d'origine, et le gouvernement est heureux de contribuer à l'édification d'un monument commémoratif canadien aux victimes de ce régime. »


Des déportés d'Auschwitz libérés par
l'Armée rouge soviétique
.

Le Marxiste-Léniniste est d'avis que les Canadiens ne vont pas tolérer que soient entachées de cette manière les contributions des antifascistes canadiens à la cause de la liberté, la démocratie, la paix et la justice pendant la grande guerre antifasciste. Ils ne permettront pas que les 25 millions de Soviétiques qui sont morts pour défendre leur liberté et celle des peuples du monde soient rayés de l'histoire par des gens comme ces propagandistes hitlériens. Ils ne toléreront pas que le premier ministre et le ministre responsable du Multiculturalisme et que les pouvoirs réunis du gouvernement du Canada, de l'État et des médias monopolisés falsifient l'histoire de façon aussi pitoyable. Et quelles victimes le ministre Kenney défend-il quand il affirme que glorifier les symboles communistes est une insulte à leur mémoire ? S'agirait-il des nazis et de leurs collaborateurs qui ont été vaincus durant la Deuxième Guerre mondiale ? Voilà à la défense de qui se portent Tribute to Liberty et ses supporteurs.

Pour ce qui est de la motivation du gouvernement Harper, il est clair qu'il s'empresse de mettre en place les mesures nécessaires pour criminaliser l'opinion politique et l'organisation communistes au Canada avant d'être chassés du pouvoir. Si ce n'est pas suivre les traces d'Hitler, alors qu'est que c'est ? Les travailleurs au Canada ne doivent pas laisser passer cela. C'est également une tentative de détourner l'attention de ce que le gouvernement prépare avec son offensive antisociale et la participation du Canada à la guerre. La classe ouvrière et le peuple du Canada doivent intensifier leur lutte pour battre cette rétrogression une fois pour toutes.

Que la mémoire des communistes qui se sont battus comme des lions pour sauver le monde du nazisme et du fascisme vive à jamais ! Que la jeune génération s'empare de cet héritage et barre la route à la glorification du nazisme aujourd'hui afin d'empêcher les catastrophes que préparent les hitlériens ! Que tous les Canadiens qui ont eux-mêmes combattu ou ont des membres de leurs familles qui ont combattu dans la grande guerre antifasciste agissent pour barrer la route à ces infamies commises au nom de la lutte contre le communisme et de la défense de la démocratie. Cela ne doit pas passer!

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À titre d'information


L’une des innombrables atrocités nazies - les cadavres de
800 travailleurs esclaves tués par les gardiens SS près
de Namering, en Allemagne, pour servir d’avertissement
à la population du village.

La signification historique réelle du 23 août 1939, qui est délibérément occultée, est que c'est l'anniversaire du Traité de non-agression germano-soviétique de 1939 (pacte Molotov-Ribbentrop) qui a donné à l'Union soviétique vingt-deux mois de plus pour renforcer ses défenses face à l'invasion imminente de l'Allemagne nazie. En septembre 1939, l'Allemagne occupait l'Autriche et la Tchécoslovaquie. L'Union soviétique avait demandé à la Grande-Bretagne et à la France de signer un traité d'assistance mutuelle et collective, qui aurait pu sauver l'Europe de la Deuxième Guerre mondiale ou, du moins, l'abréger et la rendre moins dévastatrice. Les impérialistes anglo-français ont rejeté ces propositions de sécurité collective parce qu'ils espéraient pouvoir pousser


De gauche à droite : Chamberlain, Daladier, Hitler, Mussolini
et Ciano à l’occasion de la signature de l’accord
de Munich en 1938.

Hitler à attaquer l'Union soviétique. Déjà, en septembre 1938, la Grande-Bretagne et la France avaient signé avec les nazis les accords de trahison à Munich, qui donnaient le feu vert à Hitler pour son invasion de l'Europe. L'Union soviétique a déjoué le plan anglo-français en signant le pacte de non-agression germano-soviétique, lequel déclarait simplement que l'Allemagne n'attaquerait pas l'Union soviétique et que l'Union soviétique n'attaquerait pas l'Allemagne. L'Union soviétique n'avait pas d'illusions sur les plans d'Hitler. Quand l'Allemagne nazie a attaqué l'Union soviétique le 22 juin 1941, le pacte a été immédiatement annulé, et, comme le montre l'histoire, l'Union soviétique, bien préparée, a joué un rôle majeur dans la défaite des nazis et de leur folle ambition de conquérir le monde, et ce au prix de grands sacrifices pour les peuples soviétiques.


Le monument anticommuniste

Le prétendu « Monument commémoratif aux victimes du communisme » que financent Harper et Kenney est le projet louche, soutenu par l'État, monté par un groupe du nom de « Tribute to Liberty » (TTL). Il veut construire un monument officiellement appelé « Monument commémoratif aux victimes du communisme totalitaire — Le Canada, terre d'accueil ». Ce projet de monument au Canada est basé sur un analogue aux États-Unis, le « Victims of Communism Memorial Project » inauguré en 2007, dont le président honoraire est le criminel de guerre George W. Bush et qui compte parmi ses donateurs le monopole de défense et de sécurité Lockheed Martin et l'entreprise dominioniste Amway Corporation. Au Canada, le projet de TTL a été approuvé en 2009, pratiquement en secret, par la Commission de la capitale nationale (CCN), une institution du gouvernement fédéral qui supervise l'utilisation et le développement des propriétés et des terrains fédéraux de la région de la capitale nationale. Jason Kenney veut que le monument soit construit à Ottawa et la CCN a choisi le Jardin des Provinces et des Territoires, un emplacement très prisé en face de l'édifice de la Cour suprême du Canada.


Le Jardin des Territoires et des Provinces - il a été approuvé
par la CCN en tant que site pour le monument
anticommuniste proposé.

Cette entreprise privée de TTL a été transformée en projet public par Stephen Harper et plusieurs de ses ministres et députés, notamment Jason Kenney, Peter Kent et Peter Van Loan, ainsi que le député libéral Irwin Cotler, la sénatrice conservateur Yonah Marti et l'ancien chef du Parti libéral Bob Rae, qui ont tous donné leur caution à ce projet et l'appuient activement. Le 5 mars 2013, Jason Kenney a posé pour une séance photo avec le nouveau président de TTL, Ludwik Klimkowski, sur le site du Mur de Berlin en Allemagne. Mais malgré tout ce soutien officiel et cette promotion, jusqu'à présent, ce projet reste un échec lamentable. En octobre 2012, l'ancienne présidente de TTL Alide Forstmanis a annoncé que Ludwik Klimkowski, un planificateur d'investissements, était nommé président de TTL pour remédier à la collecte de fonds infructueuse.

Le 7 décembre 2012, Ludwik Klimkowski a organisé un premier dîner de levée de fonds pour TTL à la résidence de la sénatrice conservateur de l'Ontario, Linda Frum[1], une professionnelle de levée de fonds du Parti conservateur, ce qui semble indiquer que la nouvelle stratégie de TTL est d'aller chercher directement les dons dans le secteur privé tout en renforçant ses liens avec le gouvernement. Les liens plus directs avec l'entreprise privée sont évidents aussi dans la composition du conseil d'administration de TTL. Avec Klimkowski siège à ce conseil un avocat de Stikeman Elliott, une des sept principales firmes de Toronto en droit des sociétés. Parmi les hôtes et les invités au dîner du 12 décembre 2012 figuraient le mari de la sénatrice Frum, Howard Sokolowski, fondateur de l'Ontario Real Estate Corporation Metropia, James Temerty, président de Northland Power, et Fred Waks, président et chef des opérations du géant des centres commerciaux RioCan et important collecteur de fonds pour Israël. Or, s'ils parviennent à recueillir des fonds directement des groupes pro-nazis, ils auront sans doute moins de succès auprès de la communauté juive qui ne pourra pas réconcilier sa haine des hitlériens et de leurs crimes contre l'humanité avec la glorification du nazisme par les promoteurs du monument.

La situation financière actuelle du projet de monument n'est pas claire, mais un article de juillet 2012 nous apprenait que les documents déposés auprès de l'Agence du revenu du Canada montraient que TTL était loin d'avoir atteint son objectif de collecte de fonds, qui est de 1,5 million $, et n'avait recueilli qu'un piètre 140 000 $, dont la plus grande partie avait été dépensée en coûts opérationnels et administratifs. À la fin de l'année 2011, TTL avait seulement 9 600 $ en banque. La CCN devait organiser au printemps 2012 le concours de design du monument, mais elle exige que les deux tiers de l'argent des coûts de construction, environ 650 000 $, soient d'abord recueillis par TTL. Dans le bulletin de TTL du 4 juin 2013 (le plus récent), dans l'offre d'emploi pour un chef de projet, il est mentionné que le projet a besoin de 4 millions $, dont seulement 40 % a été recueilli jusqu'à présent.

En 2012, pour tenter de résoudre ses problèmes financiers TTL avait fait une demande de subvention de 750 000 $ auprès du gouvernement Harper. Le cabinet de Jason Kenney avait déclaré que le gouvernement travaille avec TTL et examinerait la demande de financement à une date ultérieure. Le secrétaire de presse de Kenney, Alexis Pavlich, a souligné que le gouvernement s'était engagé à construire le monument dans son discours du Trône de 2010 et à nouveau dans la plate-forme électorale du Parti conservateur en 2011. Que le gouvernement Harper accorde des fonds au projet de monument est une autre preuve de sa corruption, compte tenu que les conservateurs fédéraux coupent les subventions des organismes de bienfaisance au Canada qui ont un « ordre du jour politique » pour les faire taire. De toute évidence, un « ordre du jour politique » est tout ordre du jour qui s'oppose à la dictature Harper. Mais un organisme de bienfaisance comme TTL qui soutient l'anticommunisme et le fascisme peut sans doute se faufiler et obtenir une subvention importante. Et c'est exactement ce qui s'est produit ! Le 23 août 2013, Stephen Harper a annoncé que le gouvernement fédéral contribuera jusqu'à 1,5 million $ au financement du monument privé, sans consulter personne, surtout pas les Canadiens.


Des combattants antifascistes grecs

Une porte-parole de TTL explique ainsi le manque de fonds pour le projet de monument : « C'est un projet difficile à comprendre pour beaucoup de gens du public. » Une autre explication est que la classe ouvrière et le peuple du Canada comprennent très bien le projet et s'opposent décidément à son contenu violemment anticommuniste et profasciste. Beaucoup de gens, par exemple, se souviennent encore du rôle majeur joué par l'Union soviétique dans la défaite des nazis hitlériens. Beaucoup de travailleurs sont conscients du rôle clé joué par les communistes pour les aider à bâtir leurs syndicats au Canada. Au lieu d'un monument falsificateur de l'histoire contre le « totalitarisme », les Canadiens seraient sans doute plus favorables à un monument commémorant les vraies victimes, c'est-à-dire les millions de victimes de l'impérialisme assassinées au nom de la lutte contre le communisme et le « terrorisme » — les personnes tuées dans la guerre antifasciste par les nazis, les fascistes et les militaristes japonais.

Le Canada est constitué de gens venant d'Asie, d'Afrique, d'Europe, d'Océanie et des Amériques, en plus des Premières Nations. Cela comprend les peuples épris de liberté de Corée, du Vietnam, du Congo, d'Indonésie, de Grèce, d'Iran, de Cuba, du Guatemala, du Chili, d'Argentine, de Grenade, de Colombie, du Salvador, du Nicaragua, d'Afghanistan, d'Irak, de Palestine et de la Yougoslavie, et plus récemment de Libye et de la Syrie, pour n'en nommer que ceux-là. Ils ne sont pas servis par ce monument anticommuniste, pas plus que les populations du reste du monde.


À gauche: Un peloton de l'Armée populaire du Vietnam qui a vaincu l'agresseur étranger en 1975. On estime que plus de
trois millions de Vietnamiens sont morts durant la guerre et aujourd'hui les Vietnamiens continuent de souffrir des
conséquences des armes utilisées par l'armée américaine et ses alliés, y compris les armes chimiques. À droite: Le
renversement du gouvernement démocratiquement élu du Chili par un coup d'État orchestré par la CIA, durant lequel
d'innombrables personnes ont été portées disparues, des milliers ont été tuées et des dizaines de milliers torturées.
Beaucoup d'autres furent forcées à l'exil. Ce ne sont là que deux exemples de crimes commis par les États-Unis au
nom de la défense de la « liberté » et de la « démocratie ».

Note

1. En 2012, le ministre Jason Kenney a nommé Linda Frum coprésidente du conseil consultatif du Groupe de travail pour la coopération internationale en matière d'éducation, de mémoire et de recherche au sujet de l'Holocauste (ITF). Le frère de Linda Frum, David Frum, écrivait des discours pour George W. Bush.

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Usage officiel de désinformation au sujet
du Pacte de non-agression


Grande victoire de l'Union soviétique contre les nazis à Stalingrad (gauche). Des soldats de l’Armée rouge hissent le
drapeau rouge, le drapeau de la paix et de la démocratie, sur le Reichstag à Berlin le 2 mai 1945, marquant la victoire sur
le fascisme en Europe (droite)
.

Le 23 août 1939, l'Union soviétique signait ce qu'on a appelé le Pacte Molotov-Ribbentrop de non-agression avec l'Allemagne, qui stipulait que l'Allemagne n'attaquerait pas l'Union soviétique et que l'Union soviétique n'attaquerait pas l'Allemagne. Les événements qui suivirent démontrèrent la clairvoyance de Staline : le pacte était la meilleure des alternatives qui s'offraient. Le pacte donna à l'Union soviétique 22 mois de paix pour se préparer à l'inévitable invasion allemande et mettait un terme à la politique des Anglo-Américains et des Français consistant à inciter Hitler à avancer vers l'Est et à isoler complètement l'Union soviétique face aux forces massives de l'Allemagne.

Les historiens impérialistes ont longtemps prétendu que l'Union soviétique pensait que la signature du Pacte empêcherait les nazis de l'attaquer et que, par conséquent, les Soviétiques ont été pris complètement par surprise lorsque les nazis ont attaqué le 22 juin 1941. Rien n'est plus faux. À preuve les préparatifs de l'Union soviétique en vue d'une attaque. Pas moins que l'ambassadeur des États-Unis en Union soviétique de 1936-1938, Joseph Davies, a affirmé que l'Union soviétique était très bien préparée pour riposter à une attaque nazie. Il écrit dans un rapport officiel au Département d'État américain le 9 juillet 1941 que : « Le plan de campagne que les stratèges de guerre de l'Union soviétique avaient établi n'envisageait pas ou ne permettait pas une bataille décisive sur le front occidental, comme certains stratèges et commentateurs ici (note : aux États-Unis) ont semblé craindre. Le plan prévoyait une stratégie précise de retrait afin d'attirer l'ennemi à l'intérieur, d'étendre ses lignes de communication et d'approvisionnements, et graduellement l'affaiblir en lui faisant payer chèrement pour chaque avance ».[1] L'histoire a confirmé la justesse du plan soviétique.


Des unités de panzers avancent à Pruzhaney en Bélarus
occidental, en juin 1941. L’invasion nazie de l’URSS commence.

Avec le Pacte de non-agression, l'invasion allemande de l'Union soviétique a été repoussée jusqu'au 22 juin 1941. Cette offensive fut la plus grande opération militaire de l'Allemagne de toute la Deuxième Guerre mondiale. La résistance héroïque et prolongée des peuples soviétiques a conduit à la grande victoire de l'Union soviétique à Stalingrad le 2 février 1943, avec l'encerclement et la capitulation d'une armée allemande de 300 000 hommes. Cette victoire a été suivie d'une autre victoire décisive de l'Union soviétique à Kursk qui marquait le début de la puissante contre-offensive qui devait repousser les hitlériens jusqu'à la défaite du IIIe Reich à Berlin. Le 9 mai 1945, les forces antifascistes du monde, avec l'Union soviétique et les communistes de tous les pays à la tête du mouvement de résistance, proclamèrent la victoire sur les nazis. L'Allemagne fasciste fut forcée à la capitulation inconditionnelle.

Aujourd'hui, faisant fi de ces faits incontestés, les réactionnaires du monde utilisent l'anniversaire du pacte de non-agression non pas pour célébrer la grande victoire des peuples du monde sur l'Allemagne nazie, mais pour suivre leur mentor Goebbels avec des déclarations fascistes comme celle-ci : « Le 25 août 1939, l'Union soviétique et l'Allemagne signèrent le Pacte Molotov-Ribbentrop qui mena à la Deuxième Guerre mondiale, le massacre de millions de personnes et l'holocauste. »[2]

Ces mensonges grossiers ne doivent pas être traités avec indifférence parce qu'ils ne sont pas sans danger. Ils doivent être combattus. Le but est de créer aujourd'hui un climat favorable à la montée de forces semblables aux forces hitlériennes et fascistes. En fait, ceux qui font cette propagande aujourd'hui sont les descendants de ces mêmes forces fascistes.

Dire que la signature du pacte de non-agression par Staline est la cause de la Deuxième Guerre mondiale est de la pire bassesse. En premier lieu, il faut souligner que la Grande-Bretagne, la France et l'Allemagne s'étaient déjà entendues sur une déclaration commune de non-agression en 1938. De toutes les grandes puissances non agressives d'Europe, l'Union soviétique fut la dernière à accepter un pacte avec les Allemands. Deuxièmement, « les événements de 1938, avant et après la prise de l'Autriche par Hitler, en mars, montrent que, comme elle l'avait fait quelques années plus tôt, l'Union soviétique s'efforçait de persuader l'Angleterre et la France de maintenir une sécurité collective, et en particulier de prendre des mesures pour défendre la Tchécoslovaquie contre l'agresseur. Mais tous ses efforts échouèrent et, naturellement, le refus des Anglais et Français conduisit à la signature des Accords de Munich. L'Union soviétique était non seulement disposée à se joindre aux armées françaises pour défendre la Tchécoslovaquie, si la France avait tenu sa parole, mais aussi, dans le cas d'un refus de la France, elle était prête à défendre seule la Tchécoslovaquie. »[3]


Joseph Staline à la réunion du Soviet suprême en 1938

Tous ces efforts échouèrent : la Grande-Bretagne et la France refusèrent de signer un pacte d'assistance mutuelle avec l'Union soviétique. Par contre, elles signèrent le pacte de Munich avec l'Allemagne le 29 septembre 1938, lequel permit à l'Allemagne d'intégrer les Sudètes, ordonna aux Tchèques de ne pas résister à l'agression et donna aux nazis le feu vert pour lancer leurs attaques dans toute l'Europe.

Bien entendu, les réactionnaires ne veulent jamais discuter des Accords de Munich. Ils étaient une trahison si flagrante des peuples du monde que même Winston Churchill, au parlement britannique, a accusé le premier ministre Chamberlain : « Vous aviez le choix entre la guerre et le déshonneur. Vous avez choisi le déshonneur et vous aurez la guerre. »

Il est indéniable que face à la trahison britannique et française, l'Union soviétique n'avait d'autre choix que de prendre toutes les mesures en son pouvoir pour se défendre et défendre la cause de la paix.

Tous ces faits peuvent être vérifiés. Ils sont disponibles dans les rapports, les discours, les comptes rendus et les documents de l'époque. Pour donner un exemple, il y a le Mémorandum #8604 envoyé à Moscou de Prague par les services de renseignement russes quelques jours avant la signature des Accords de Munich : « Le 19 septembre, l'ambassadeur anglais Newton et l'ambassadeur français Delacroix ont transmis à Milan Hodza (premier ministre tchécoslovaque de 1935 à 1938), au nom de Chamberlain et de Daladier, les dispositions suivantes, respectueusement : « Guidés par les principes élevés de maintien de la paix en Europe, ils estiment nécessaire de rattacher les Sudètes à l'Allemagne. Un système de pactes d'aide mutuelle entre la Tchécoslovaquie et d'autres pays devraient être annulés. » »[4]

Les agissements abominables des Anglo-Américains et des Français dans le dos de l'Union soviétique, qui avait signé des accords d'assistance mutuelle avec la Tchécoslovaquie et la France, entraînèrent la destruction des éléments de résistance collective établis contre l'Allemagne nazie. Ce sont les Accords de Munich, l'acte de lâcheté ultime, qui ont mené à la Deuxième Guerre mondiale, au massacre de millions de personnes et à l'holocauste. Le verdict de l'histoire confirme la vérité au sujet de la trahison anglo-américaine et française des peuples du monde et au sujet du rôle héroïque de l'Union soviétique et de Staline dans la victoire contre les nazis. « La résistance des peuples soviétiques sous la direction de Staline et du Parti communiste vint à bout de l'agresseur nazi. Cinquante millions de personnes ont été tuées et 35 millions gravement blessées durant la Guerre antifasciste et ce sont les peuples de l'Union soviétique qui subirent le gros des pertes. »[5]

Notes

1. Davies, Joseph, Mission to Moscow. Pocket Book. 1941, P. 431.
2. Staline « avait prévu déployer un million de soldats contre Hitler si la Grande-Bretagne et la France acceptaient le pacte » : Staline était « prêt à déployer plus d'un million de soldats soviétiques à la frontière allemande pour bloquer l'agression hitlérienne juste avant la Deuxième Guerre mondiale », Nick Holdsworth, Telegraph UK, 18 octobre 2008. (Notre traduction — ndlr)
3. Hardial Bains, Les Causes et les leçons de la Deuxième Guerre mondiale, Institut MELS, Toronto, 1990, p. 59
4. « Accords de Munich de 1938 : Moscou ouvre ses archives secrètes », Valeri Iarmolenko, RIA Novosti, 30 septembre 2008
5. « Le renversement du système impérialiste est la seule garantie de paix », Le Marxiste-Léniniste, 11 mai 2010.

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L'Union européenne, les États-Unis et le Canada restent silencieux devant la glorification des collaborateurs nazis en Estonie

Le 27 juillet 2013 a eu lieu le rassemblement annuel des anciens combattants de la 20e Division de Grenadiers estoniens de la Waffen-SS nazie (Schutzstaffel ou « escadron de protection ») sur les collines Sinimae dans l'Est de l'Estonie. Les collines Sinimae ont été le lieu d'une bataille féroce en 1944 entre l'Armée rouge et les troupes nazies, dont la division SS estonienne. La victoire soviétique a permis de libérer le camp de concentration et de mort de Klooga et de sauver 2 000 prisonniers. Sinemae est un important rassemblement néonazi où sont brandis ouvertement des symboles nazis interdits comme la croix gammée. Il se tient depuis 1994 et des nazis de partout dans le monde y participent. Une des activités de ce rassemblement est la compétition militaire Erna, qui tient son nom d'un groupe de reconnaissance qui a fourni aux nazis des renseignements sur l'Armée rouge pendant la Deuxième Guerre mondiale. Les années précédentes, l'État estonien a activement protégé ce rassemblement des anciens combattants de Waffen-SS en interdisant les manifestations antinazies et en arrêtant des militants anti-nazis.

Les hitlériens ont créé des divisions non allemandes de la Waffen-SS dès 1940. À la fin de la Deuxième Guerre mondiale, elles composaient près de 60 % des effectifs de la Waffen-SS. Pendant la guerre, 80 000 Estoniens ont été enrôlés dans les armées nazies et 3000 autres se sont battus contre l'URSS dans l'armée finlandaise. Comme les autres divisions de la Waffen-SS, la division estonienne a commis d'innombrables crimes de guerre. Pourtant, depuis la soi-disant indépendance de l'Estonie en 1991, le gouvernement estonien n'a poursuivi aucun criminel de guerre nazi, dont certains, comme Martin Jensen (mort en 1992), ont fui vers le Canada et joui de la protection de l'État canadien. La Waffen-SS estonienne a commis des massacres de civils en Estonie, en Union soviétique, en Biélorussie, en Ukraine et en Pologne, attaqué des petits groupes de soldats de l'Armée rouge et assassiné des membres du Parti communiste et militants soviétiques. Elle a abattus des Juifs, des Russes, des prisonniers de guerre et des paysans qui appuyaient la réforme agraire ; elle surveillait et organisait le transport de civils vers les camps de concentration comme celui de Klooga où beaucoup ont été assassinés. Le président de l'Institut du Moyen-Orient, Yevgeny Satanovsky (et ancien président du Congrès juif russe), a déclaré que la Waffen-SS avait la même structure que les « escadrons de la mort », les groupes d'extermination qui ont assassiné, pendu et brûlé des vieillards, des femmes et des enfants dans les territoires occupés par les nazis.[1]

Les années précédentes, de hauts dirigeants du parti politique au pouvoir en Estonie ont participé officiellement à ce rassemblement nazi de juillet à Sinimae. En 2011, le premier ministre Andrus Ansip a déclaré que ce rassemblement n'avait rien à voir avec l'idéologie nazie, même si la Waffen-SS était la branche militaire de la SS, l'armée politique du parti nazi d'Hitler commandée par Heinrich Himmler. Cette année, l'État estonien a gardé un profil bas, aucun représentant du gouvernement n'y a assisté et le ministre de la Défense, Urmas Riensalu, s'est contenté d'envoyer un message de salutations à ce rassemblement. Le ministère russe des Affaires étrangères a envoyé une note de protestation, mais l'Union européenne n'a soulevé aucune objection.

Bien que le procès de Nuremberg ait clairement condamné la Waffen-SS comme une organisation criminelle, les cercles dirigeants estoniens continuent de défendre les criminels avec des mensonges éculés à l'effet qu'ils ont été enrôlés de force par les nazis ou que c'était des patriotes qui luttaient contre l'« occupation soviétique » pour indépendance de l'Estonie.[2] Ces fabrications sont démenties par le fait que 30 000 volontaires estoniens ont combattu aux côtés de l'Armée rouge contre l'occupant nazi, et qu'il est évident que, dans l'Allemagne hitlérienne, l'Estonie ne pouvait être qu'un État vassal du Troisième Reich.

L'orientation ouvertement pronazie des cercles dirigeants estoniens est devenue évidente peu après 1991. Le 26 juin 1999, sous le gouvernement de Matt Laar Matt, les restes du colonel estonien de la Waffen-SS, Alfons Rebane, ont été transférés d'Allemagne au cimetière Metsakalmistu de Tallinn, et ont reçu des funérailles nationales malgré de vives protestations.[3] En 2002, Mart Laar et le ministre des Affaires étrangères, Tirvimi Velliste, ont qualifié la bataille de Sinimae de « seconde guerre de libération ». En 2005, l'État estonien a financé la création d'un musée consacré à la Division Waffen-SS à Lagedi. En 2006, Matt Laar a déclaré qu'une loi qui reconnaît les Estoniens qui ont combattu pour l'Allemagne nazie serait bientôt adoptée. En avril 2007, les autorités estoniennes ont ordonné le démantèlement dans la capitale Tallinn d'un monument aux morts de l'armé soviétique qui commémore la victoire sur le nazisme. Des milliers de personnes ont tenté d'empêcher le démantèlement du monument, mais la police a arrêté plus de 1 000 militants et tué un ressortissant russe.


En 2007, le Soldat de bronze, un monument commémoratif
estonien honorant les soldats soviétiques qui ont libéré
la capitale, Tallinn, a été déplacé de sa place d’honneur
au centre de Tallinn à la suite des pressions exercées
par les forces antisoviétiques vers un cimetière militaire.

Quelle est la signification de cette renaissance nazie soutenue par l'État en Estonie et dans d'autres pays ? Les gens doivent comprendre que ce n'est pas une simple aberration se limitant à un ou deux endroits. Récemment, l'aile jeunesse du parti de l'Union démocrate chrétienne d'Angela Merkel en Allemagne a organisé une simulation de démolition de la statut du dirigeant communiste Ernst Thaelmann à Berlin. Thaelmann était le chef du Parti communiste d'Allemagne durant la majeure partie de la République du Weimar. Il fut emprisonné par Hitler en 1933, maintenu en régime cellulaire pendant 11 ans puis fusillé au camp de concentration de Buchenwald il y a 60 ans le 18 août 1944. Derrière cette tentative de salir la mémoire du peuple allemand, il y avait les manoeuvres d'une société immobilière qui veut s'emparer du terrain pour y bâtir des condominiums.

Ces forces veulent effacer de la mémoire collective le rôle héroïque joué par les communistes. Mais derrière cette attaque, il y a de toute évidence les manoeuvres des secteurs les plus réactionnaires des classes dominantes pour raviver l'anticommunisme, eux qui ont usurpé des positions de pouvoir en Europe et en Amérique du Nord. L'objectif visé est de briser la résistance de la classe ouvrière dans les pays capitalistes avancés et des peuples du monde à l'offensive antisociale néolibérale mondiale et aux plans des impérialistes américains pour un nouveau partage du monde. Les vestiges de la famille du tsar de Russie et de leur suite, les soi-disant familles royales d'Europe, cette même lie aristocratique qui a financé la montée du parti nazi, continuent de comploter pour récupérer les biens expropriés avec raison par le peuple lors de la Révolution russe et par le pouvoir populaire pendant et après la Deuxième Guerre mondiale.


Monument à Ernst Thaelmann à Berlin

C'est pourquoi ces représentants des monopoles et leurs gouvernements et partis politiques adoptent maintenant des résolutions ouvertement fascistes qui déclarent que les actes des communistes comme les grandes victoires de la Deuxième Guerre mondiale à Stalingrad et à Koursk étaient des crimes contre l'humanité « pires » que les crimes des nazis et qui banalisent les crimes des nazis, sous prétexte que leur but était de sauver l'humanité du bolchevisme. Mais les peuples du monde ne se réconcilieront jamais aux nouvelles guerres d'agression des impérialistes, ni aux autres crimes contre la paix et l'humanité au nom de la liberté, de la démocratie et des droits humains. Les peuples du monde méprisent les anciens et les nouveaux nazis. Tous les efforts doivent être faits pour s'opposer à ce que les actions des communistes soient mises sur le même plan que les crimes des nazis, sinon nous allons au-devant de grandes catastrophes. Nous devons également tirer les leçons de la politique anglo-américaine de conciliation avec les hitlériens qui a inexorablement conduit à la catastrophe de la Deuxième Guerre mondiale.

Notes

1. Pour plus de documentation sur ces crimes, consultez le livre : Estonia : The Bloody Trace of Nazism, 1941-44. Ce document se trouve à : http ://common.regnum.ru/documents/eston.pdf
2. En 1950, le Haut Commissaire américain en Allemagne, John J. McCloy, qui plus tard a gracié tous les criminels de guerre nazis emprisonnés après les procès de Nuremberg, a entamé la « réhabilitation » officielle des divisions de la Waffen de la Baltique en déclarant qu'elles étaient « séparées » de la SS nazie et donc n'étaient pas une organisation « hostile au gouvernement des États-Unis ». Comme cela est bien documenté, les impérialistes américains ont recruté des milliers de nazis après la Deuxième Guerre mondiale, entre autres par l'Opération Paperclip, pour travailler au programme de missiles balistiques américain.
3. Le dossier du réactionnaire Matt Laar est impressionnant. Il est membre du conseil international du Comité américain de la Fondation mémoriale aux victimes du communisme, qui a inspiré la campagne pour un monument anticommuniste au Canada par l'organisation Tribute to Liberty. Il est également membre du Comité international « pour la démocratie » à Cuba, de la Fondation des droits humains du milliardaire George Soros, de la Société du Mont Pèlerin, une organisation anticommuniste fondée par Friederich Hayek, et de nombreuses autres organisations similaires.

(Traduction : LML)

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Rappel historique

Le prétexte d'Hitler: sauver le monde du communisme

Nous reproduisons des extraits du chapitre portant sur la Deuxième Guerre mondiale du livre La Grande Conspiration : la guerre secrète contre la Russie soviétique de Michael Sayers et Albert E. Kahn.

* * *


Un champ de squelettes suite à un massacre japonais à
Nanking, en Chine, en 1937 - une autre illustration des crimes des
véritables ennemis des peuples du monde

La seconde guerre mondiale a commencé en 1931 par l'invasion de la Mandchourie par le Japon sous le prétexte de protéger l'Asie du communisme. Deux ans plus tard, Hitler renversait la République allemande sous le prétexte de protéger l'Allemagne du communisme. En 1935, l'Italie envahissait l'Éthiopie pour la protéger du « bolchevisme et de la barbarie ». En 1936, Hitler remilitarisait la Rhénanie ; l'Allemagne et le Japon signaient le pacte anti-comintern et les troupes allemandes et italiennes envahissaient l'Espagne sous le prétexte de la protéger du communisme.

En 1937, l'Italie donnait son adhésion au pacte anti-comintern ; le Japon attaquait de nouveau la Chine, s'emparait de Peiping [Pékin], Tientsin et Shanghaï. L'année suivante, l'Allemagne s'emparait de l'Autriche. L'axe Berlin-Rome-Tokio était constitué « pour protéger le monde du communisme ».

Prenant la parole à la session de la Société des Nations en septembre 1937, le commissaire aux Affaires étrangères soviétique Maxime Litvinov déclarait « Nous connaissons trois États qui, au cours de ces dernières années, ont commis des agressions contre d'autres États. Malgré toute la différence entre les régimes, les idéologies, les niveaux matériels et culturels, les trois États en question justifiaient leurs agressions par ce même motif : la lutte contre le communisme. Les dirigeants de ces États pensent naïvement ou font plutôt semblant de penser qu'il leur suffit de prononcer le mot « anticommunisme » et que tous leurs méfaits et crimes internationaux devront être pardonnés ! »

Sous le masque du pacte anti-comintern, l'Allemagne, le Japon et l'Italie marchaient vers la conquête et l'asservissement de l'Europe et de l'Asie.

Deux voies possibles s'ouvraient au monde : union de toutes les nations opposées aux agressions nazies, fascistes et japonaises et arrêt de la menace de guerre de l'Axe avant qu'il ne soit trop tard ; ou division, la capitulation devant chacune des agressions et l'inévitable victoire du fascisme. Les ministres de la propagande des pays de l'Axe, les agents de Trotski, les réactionnaires français, anglais et américains s'unirent dans une campagne fasciste internationale contre la sécurité collective. La possibilité d'une union contre l'agression fut attaquée comme étant de la « propagande communiste », dénoncée comme un « rêve utopique » et qualifiée de « provocation à la guerre ». À sa place, on proposa la politique de l'apaisement et le plan de faire de la guerre inévitable un assaut général contre l'U.R.S.S. L'Allemagne nazie prit la plus grande part à cette politique.

Le premier ministre britannique Neville Chamberlain, le porte parole de l'apaisement, déclara que la sécurité collective diviserait l'Europe en « deux camps armés ». Le journal nazi Nachtausgabe put dire en février 1938 : « Nous savons maintenant que le premier ministre anglais, comme nous-mêmes, considère que la sécurité collective n'est rien d'autre qu'un non-sens ».

Parlant à Manchester le 10 mai 1938, Winston Churchill répondit :

« On nous dit qu'il ne faut pas diviser l'Europe en deux camps armés. Ne doit-il y avoir qu'un seul camp armé ? Celui des dictateurs ; et une cohue de peuples dispersés, errant autour de lui, se demandant quel sera celui qui sera pris le premier et s'il sera asservi ou simplement exploité ? »

Churchill fut traité de « fauteur de guerre »...


Philippe Pétain, chef du régime collaborateur français de
Vichy, et Adolph Hitler, en octobre 1940 à Montoire-sur-le-Loir,
en France.

En septembre 1938, la politique de l'apaisement atteint son apogée. Les gouvernements de l'Allemagne nazie, de l'Italie fasciste, de la Grande-Bretagne et de la France signaient le pacte de Munich, la sainte-alliance antisoviétique à laquelle la réaction mondiale rêvait depuis 1918.

Le pacte privait l'U.R.S.S. de tout allié. Le pacte franco-soviétique, pierre d'angle de la sécurité collective européenne, était mort. Le pays des Sudètes tchèque était rattaché à l'Allemagne nazie. Le chemin de l'Est était ouvert devant la Wehrmacht.[1]

« Le pacte de Munich, a écrit Walter Duranty dans The Kremlin and the People (le Kremlin et le peuple), semble avoir été la plus grande humiliation qu'ait subie la Russie soviétique depuis le traité de Brest-Litovsk. »

Le monde attendait la guerre entre les nazis et les Soviets.

Revenant en Angleterre, agitant un morceau de papier qui portait la signature d'Hitler, Chamberlain s'écria :

« Il signifie la paix pour notre génération. »

Vingt ans plus tôt, l'espion anglais Reilly s'était écrié « À n'importe quel prix, cette absurde obscénité qui est née en Russie doit être anéantie... Paix avec l'Allemagne ! Oui, paix avec n'importe qui ! Paix, à n'importe quelle condition, et ensuite, un front uni conte les véritables ennemis de l'humanité ! »

Le 11 juin 1938, Sir Arnold Wilson, qui soutenait Chamberlain à la Chambre des Communes, déclara :

« L'unité est essentielle et le véritable danger pour le monde présent ne vient pas de l'Allemagne et de l'Italie... mais de la Russie. » Mais les premières victimes du pacte antisoviétique de Munich ne furent pas les peuples de l'U.R.S.S. Les premières victimes, ce furent les peuples démocratiques de l'Europe. Une fois de plus, la façade antisoviétique cachait une trahison de la démocratie.


Des communistes et antifascistes canadiens ont combattu
dans la Brigade internationaliste Mackenzie-Papineau durant
la Guerre civile en Espagne.

En février 1939, les gouvernements français et anglais reconnaissaient la dictature fasciste de Franco comme le gouvernement légitime de l'Espagne. Dans les derniers jours de mars, après deux ans et demi d'une lutte épique et épuisante contre des adversaires écrasants, la République espagnole devint une province fasciste.

Le 15 mars, la Tchécoslovaquie cessait d'être un État indépendant : les divisions blindées nazies avaient pénétré dans Prague. L'usine d'armement Skoda et vingt-trois autres fabriques d'armes, constituant une industrie d'armement trois fois plus importante que celle de l'Italie fasciste devenait la propriété d'Hitler. Le général pro-fasciste Jan Sirovy, qui avait commandé autrefois les armées interventionnistes tchèques en Sibérie soviétique, remit au Haut-Commandement allemand les arsenaux, les magasins, un milliers d'avions et tout l'équipement militaire de premier ordre de l'armée tchécoslovaque.

Le 20 mars, la Lituanie cédait à l'Allemagne son seul port, Memel.

Le Vendredi-Saint au matin, le 7 avril, Mussolini traversait l'Adriatique et envahissait l'Albanie. Cinq jours après, le roi Victor-Emmanuel acceptait la couronne de ce pays.

De Moscou, alors qu'Hitler occupait la Tchécoslovaquie, Staline avertit les politiciens de l'apaisement d'Angleterre et de France que leur politique antisoviétique les conduirait à un désastre, dans un discours qu'il prononça le 10 mars 1939 au 18e Congrès de l'U.R.S.S.


Les Nazis envahissent Prague, en Tchécoslovaquie,
le 15 mars 1939.

La guerre non déclarée, dit-il, que les puissances de l'Axe ont déjà commencée en Europe et en Asie sous le masque du Pacte anti-comintern n'était pas seulement dirigée contre l'Union soviétique mais aussi, et maintenant, en fait, avant tout, contre les intérêts de l'Angleterre, de la France et des États-Unis :

« Les États agresseurs font la guerre, dit Staline, en lésant de toutes les façons les intérêts des États non agresseurs et, en premier lieu, ceux de l'Angleterre, de la France, des États-Unis, qui, eux, reculent et se replient en faisant aux agresseurs concessions sur concessions... sans aucune tentative de résistance de leur part et même avec une certaine complaisance. Cela est incroyable, mais c'est un fait. »

Les politiciens réactionnaires des démocraties occidentales, notamment en Angleterre et en France, dit-il encore, ont renoncé à la politique de sécurité collective, ils rêvent encore d'une coalition antisoviétique camouflée par des phrases diplomatiques comme « apaisement » et « non-intervention ». Mais cette politique est déjà condamnée et Staline ajouta :

« Certains politiciens et représentants de la presse d'Europe et des États-Unis, ayant perdu patience à attendre la campagne contre l'Ukraine Soviétique », commencent eux-mêmes à dévoiler les dessous véritables de la politique de non-intervention. Ils parlent ouvertement et écrivent noir sur blanc que les Allemands les ont cruellement « déçus » ; car au lieu de pousser constamment vers l'Est, contre l'Union Soviétique, ils se sont retournés vers l'Ouest, voyez-vous cela, et réclament des colonies. On pourrait penser qu'on a cédé aux Allemands les régions de la Tchécoslovaquie pour les payer de l'engagement qu'ils avaient pris de commencer la guerre contre l'Union Soviétique, et que les Allemands refusèrent maintenant de payer la traite.

« Je suis loin de vouloir moraliser sur la politique de non-intervention, de parler de trahison, de félonie, etc. II serait naïf de faire de la morale à des gens qui ne reconnaissent pas la morale humaine. La politique est la politique, comme disent les vieux diplomates bourgeois rompus aux affaires. Toutefois, il est nécessaire de remarquer que le grand et périlleux jeu politique commencé par les partisans de la politique de non-intervention pourrait bien finir pour eux par un sérieux échec. »

L'U.R.S.S. voulait encore réaliser une coopération internationale contre les agresseurs et une politique réaliste de sécurité collective ; mais Staline le montra clairement, une semblable coopération doit être véritable et loyale. L'Armée Rouge n'avait pas l'intention de tirer les marrons du feu pour les politiciens de l'apaisement d'Angleterre et de France. En fin de compte, si le pire survenait l'Armée Rouge avait confiance dans sa force et dans l'unité et le loyalisme des peuples soviétiques, comme Staline le souligna :

« En cas de guerre l'arrière et le front de notre armée seront plus forts que ceux d'aucun autre pays. C'est un fait que des gens au delà de nos frontières qui aiment les conflits militaires feraient bien de se rappeler. »

Mais, on ne tint pas compte de l'avertissement sans détours et significatif de Staline.

En avril 1939, un sondage de l'opinion publique britannique révéla que 87 % de la population anglaise était favorable à une alliance anglo-soviétique contre l'Allemagne nazie. Churchill vit dans le rapprochement anglo-soviétique une « question de vie ou de mort ». Dans un discours qu'il prononça le 27 mai, il dit :

« Si le gouvernement de Sa Majesté, après avoir négligé notre défense, après avoir mis à bas la Tchécoslovaquie avec tout ce que ce pays signifie en puissance militaire, après nous avoir commis à la défense de la Pologne et de la Roumanie, rejette maintenant et renonce à l'aide indispensable de la Russie et nous conduit ainsi de la pire des manières dans la pire des guerres, il aura mal mérité la générosité avec laquelle il a été traité par ses concitoyens ».

Le 29 juin, Lloyd George appuyait la cause de Churchill en ces termes :

« M. Chamberlain a négocié directement avec Hitler. Il est allé vers Allemagne pour le voir. Lui et Lord Halifax ont fait des visites à Rome. Ils sont allés à Rome boire à la santé de Mussolini et lui ont dit qu'il était un bon garçon. Mais qui ont-ils envoyé en Russie ? Ils n'ont pas même envoyé le plus humble des membres du Cabinet ; ils ont envoyé un employé du ministère des Affaires étrangères. C'est une insulte... Ils n'ont pas le sens des proportions ou de la gravité de toute la situation, alors que le monde tremble au bord d'un grand précipice. »

On ne fit pas attention à la voix du peuple anglais ni à celle d'hommes d'État comme Churchill et Lloyd George.

« Une alliance étroite et solide avec la Russie », observe le Times de Londres, « gênerait d'autres négociations. »


Le premier ministre britannique Neville Chamberlain
serrant la main de Hitler après la signature du perfide
pacte de Munich en 1938.

Alors que l'été de 1939 s'avançait et que la guerre en Europe paraissait de plus en plus proche, William Strang, un petit fonctionnaire du ministère des Affaires étrangères britannique que Chamberlain avait envoyé à Moscou, demeurait le seul représentant de Londres menant des négociations directes avec le gouvernement soviétique. Le 11 août, une mission militaire britannique arriva à Moscou pour discuter avec l'état-major. La mission anglaise avait voyagé sur un bateau marchand à la vitesse de 13 noeuds, le moyen de transport le plus lent possible. À son arrivée, les Russes apprirent qu'elle n'avait pas plus le pouvoir que Strang de signer le moindre accord avec le gouvernement soviétique.

La Russie Soviétique devait être isolée et laissée seule en face d'une Allemagne nazie, soutenue passivement, sinon activement, par les gouvernements de l'Europe animés de l'esprit de Munich.

Joseph E. Davies a décrit par la suite le choix auquel le gouvernement soviétique était conduit. Écrivant à Harry Hopkins, conseiller du président Roosevelt, l'ancien ambassadeur des États-Unis en U.R.S.S., précisait, à la date du 13 juin 1941 :

« D'après mes observations et mes entretiens depuis 1936, je crois que, sauf le président des États-Unis seul, aucun gouvernement au monde n'a vu plus clairement la menace d'Hitler conte la paix et la nécessité de la sécurité collective et des alliances entre les nations non-agressives que le gouvernement soviétique. Il était prêt à se battre pour la Tchécoslovaquie. Il a annulé le pacte de non-agression avec la Pologne avant Munich parce qu'il voulait dégager le chemin de ses armées à travers la Pologne pour venir à l'aide de la Tchécoslovaquie, s'il était nécessaire de remplir les obligations de leur traité. Même après Munich et jusqu'au printemps de 1939, le gouvernement soviétique était prêt à s'allier avec l'Angleterre et la France en cas d'attaque de la Pologne ou de la Roumanie mais il insistait pour que soit convoquée une conférence des États opposés à l'agression, qui déterminerait objectivement et d'un point de vue réaliste ce que chacun d'eux aurait à faire et qui avertirait Hitler de leur résistance concertée... La suggestion fut repoussée par Chamberlain, qui prétexta de l'opposition que la Pologne et la Roumanie faisaient à la présence de l'U.R.S.S.

Durant tout le printemps de 1939, les Soviets essayèrent d'obtenir un accord défini qui déterminerait l'unité d'action et la coordination des plans militaires pour s'opposer à Hitler.

L'Angleterre refusa de donner les mêmes garanties de protection à l'U.R.S.S. par rapport aux États baltes que celles qu'on demandait à la Russie de donner à la France et à l'Angleterre en cas d'agression de la Belgique ou de la Hollande. Les Soviets se convainquirent, avec juste raison, qu'aucun accord effectif, direct, pratique et général ne pouvait être conclu avec la France et l'Angleterre. Ils furent amenés à conclure un pacte de non-agression avec Hitler. »

Vingt ans après Brest-Litovsk, les politiciens antisoviétiques d'Europe avaient forcé l'U.R.S.S. à conclure un traité qu'elle ne désirait pas, un traité de pure défense avec l'Allemagne.

Le 24 août 1939, l'Union soviétique signait un pacte de non-agression avec l'Allemagne nazie.

Note

1. Le 24 septembre 1938, tandis que les nazis pénétraient en Tchécoslovaquie, l'éditorial du Socialist Appeal, journal trotskiste de New York, déclarait : « la Tchécoslovaquie est un des avortons les plus monstrueux qu'ait produit l'infâme traité de Versailles. La démocratie tchécoslovaque n'a jamais été quelque chose de plus qu'un misérable voile, masquant l'exploitation capitaliste la plus poussée... Cette considération impose nécessairement la plus ferme opposition révolutionnaire à l'État bourgeois tchécoslovaque, dans n'importe quelles circonstances. »

Avec de tels pseudorévolutionnaires, les trotskistes dans toute l'Europe et en Amérique, entreprirent une campagne continue contre la défense des petites nations des agressions par les puissances de l'Axe et contre la sécurité collective. Tandis que l'Éthiopie, l'Espagne, la Chine du Nord et du Centre, l'Autriche et la Tchécoslovaquie étaient envahies l'une après l'autre par l'Allemagne, l'Italie et le Japon, les membres de la IVe Internationale répandaient dans le monde leur propagande, que la sécurité collective était une « provocation à la guerre ». Trotski affirmait que la défense de l'État national » était en fait une « tâche réactionnaire ». Dans sa brochure, La IVe Internationale et la guerre, qui servit de matériel de propagande fondamental aux trotskistes dans leur lutte contre la sécurité collective, Trotski a écrit :

« La défense de l'État national, en premier lieu dans l'Europe balkanisée, est au plein sens du mot, une tâche réactionnaire. L'État national, avec ses frontières, ses passeports, son système monétaire, ses douanes et son armée pour la protection de ses frontières, est devenu un obstacle effroyable au développement économique et culturel de l'humanité. La tâche du prolétariat n'est pas la défense de l'État national, mais sa destruction complète et définitive. »

Les partisans et les sympathisants de Trotski en Europe et en Amérique menèrent une lutte âpre contre le Front populaire en France, le gouvernement républicain espagnol et autres mouvements de masse patriotiques et antifascistes qui s'efforçaient de réaliser l'unité nationale dans leur propre pays et des pactes de sécurité collective avec l'U.R.S.S. La propagande trotskiste déclarait que ces mouvements ne feraient que conduire leur pays à la guerre. « La version stalinienne du front unique », déclarait C. L. James, un trotskiste anglais marquant, « n'est pas l'unité pour l'action, mais l'unité pour conduire tous les travailleurs à une guerre impérialiste. »

Trotski lui-même « avertissait » continuellement des « dangers qui résulteraient d'une défaite de l'Axe au profit des nations non agressives. « Une victoire de la France, de la Grande-Bretagne et de l'U.R.S.S. sur le Japon et l'Allemagne », déclara-t-il aux séances de la « Commission d'enquête » à Mexico, en avril 1938, « signifierait d'abord une transformation de l'U.R.S.S. en un État bourgeois et celle de la France en un État fasciste, parce que pour obtenir la victoire sur Hitler, un monstrueux appareil militaire est indispensable... Une victoire peut signifier la destruction du fascisme en Allemagne et l'instauration du fascisme en France. »

De cette manière, Trotski et ses propagandistes travaillèrent la main dans la main avec les partisans de l'apaisement et avec les ministres de la propagande des puissances de l'Axe, à persuader les peuples d'Europe que la sécurité collective était une provocation à la guerre et que ceux qui essayaient de la réaliser étaient des « instruments de Staline ».

(La grande conspiration, Chapitre XXII, La Seconde Guerre mondiale, Michael Sayers et Albert E. Khan, 1946. Traduit de l'Américain par Albert Germain.)

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Le recours à des mesures d'exception au Canada
pour attaquer les communistes, les syndicalistes
et les Ukrainiens antifascistes

« Une fois terminé, ce monument commémoratif enseignera aux générations futures
le contexte dans lequel des millions de personnes ont perdu la vie et souffert dans des
conditions inhumaines sous le joug de régimes communistes. Il servira également à rappeler
à tous les Canadiens que la célébration de symboles communistes est une insulte à la mémoire
de ces victimes et que nous ne devons jamais considérer comme acquises
nos valeurs fondamentales que sont la liberté, la démocratie, les droits
de la personne et la primauté du droit. »
- Le ministre Jason Kenney à propos
du monument anticommuniste, le 23 août 2013

Le gouvernement canadien a une longue tradition de recourir aux « moyens légaux » pour attaquer les communistes et les gens progressistes sous toutes sortes de prétextes. Un exemple bien connu est la promulgation des Mesures de guerre de Trudeau en 1970, sous prétexte d'une menace d'insurrection appréhendée.

La Loi sur les mesures de guerre a été adoptée en 1914 après le déclenchement de la Première Guerre mondiale et accorde des pouvoirs d'exception au conseil des ministres, l'autorisant à gouverner par décret advenant une menace de « guerre, d'invasion ou d'insurrection, réelle ou appréhendée ». Elle est restée en vigueur de 1914 à 1920. Avec la victoire de la Révolution bolchévique de 1917, de nouveaux règlements et ordonnances ont été ajoutés qui interdisent d'être membre d'organisations communistes et socialistes. La Loi sur les pouvoirs d'urgence, une ramification de la Loi sur les mesures de guerre, était en vigueur de 1951 à 1954, pendant l'agression dirigée par les États-Unis contre le peuple coréen.


L’internement de masse de Canadiens d’origine japonaise,
allemande et italienne, ainsi que de communistes et
d’autres, a été mené sous l’égide des Règlements
concernant la défense du Canada. Photo :
l’internement de Canadiens japonais en
Colombie-Britannique.

Le gouvernement fédéral de Mackenzie King a aussi mis les Mesures de guerre en vigueur au lendemain de la signature du Pacte de non-agression Molotov-Ribbentrop à Moscou le 23 août 1939. L'Union soviétique avait conclu ce pacte avec l'Allemagne dans le but de gagner du temps afin de se préparer dans l'éventualité d'une agression de la part des nazis hitlériens, ce qui arriva le 22 juin 1941 tel que prévu. En fait, le jour même de la signature du Pacte de non-agression, le gouvernement King annonçait que des dispositions de la Loi sur les mesures de guerre seraient à nouveau mises en vigueur au Canada, si besoin était. Deux jours plus tard, le gouvernement a déclaré un état de guerre appréhendée. C'est ainsi que les Règlements concernant la défense du Canada, préparés depuis à peine un mois, ont été mis en vigueur en vertu de la Loi sur les mesures de guerre. Comme l'avaient fait la Grande-Bretagne et la France, le Canada a déclaré la guerre contre l'Allemagne le 10 septembre 1939 suite à l'invasion de la Pologne par les Nazis le 1er septembre.

Les Règlements concernant la défense du Canada de 1939 (RCDC) légalisaient les mesures répressives de l'État telles la suspension du droit à l'habeas corpus et du droit à un procès, l'internement, l'interdiction de groupes politiques, les restrictions à la liberté de parole, y compris l'interdiction de certaines publications, et la confiscation des biens. L'article 21 des RCDC autorisait le ministre fédéral de la Justice à détenir sans accusations quiconque pourrait agir « de façon préjudiciable pour la sécurité publique et la sécurité de l'État ». La Loi sur les mesures de guerre est restée en vigueur au Canada jusqu'à la fin de 1945, lorsqu'elle fut remplacée par la Loi sur les pouvoirs transitoires résultant de circonstances critiques nationales jusqu'au 31 mars 1947. Le maintien de la Loi sur les pouvoirs transitoires a alors été adopté, maintenant ainsi certains ordres et règlements de temps de guerre jusqu'au 30 avril 1951, alors que le Canada était impliqué dans l'agression dirigée par les États-Unis contre la Corée comme partie intégrante de la stratégie de l'« endiguement du communisme ».


Le premier ministre Mackenzie King fraternisant avec le régime nazi d’Adolph Hitler, en juin 1937,
au stade olympique à Berlin, en Allemagne

La position officielle du gouvernement King était que les RCDC en temps de guerre visaient à empêcher quiconque d'entraver la mobilisation des Canadiens en appui à l'effort de guerre contre l'Allemagne. Cependant, le gouvernement a eu recours aux RCDC pour attaquer ceux qui étaient des antifascistes convaincus et pas du tout sympathiques à l'agression nazie. Pour ces antifascistes, jusqu'à l'invasion de l'Union soviétique par l'Allemagne nazie, cette guerre n'était qu'une autre guerre impérialiste pour la redivision du monde. Les personnes ciblées par l'État étaient principalement les communistes, les syndicalistes et les Ukrainiens antifascistes, pour la simple raison que King et d'autres dans les cercles dominants percevaient que le communisme représentait une menace beaucoup plus grande pour le Canada que le fascisme.[1] Le gouvernement King ne s'était jamais opposé au fascisme, Il n'avait pas réagi à l'invasion de l'Éthiopie par l'Italie fasciste en 1935, ni ne s'était-il opposé au soulèvement fasciste de Franco en Espagne. Il appuyait, par contre, la politique d'apaisement de la Grande-Bretagne et de la France envers Hitler. Bien que le Canada n'était pas formellement en guerre contre l'Union soviétique, celle-ci était pour les cercles dominants un ennemi « officieux » en raison de son projet socialiste. Pendant ce temps le Parti communiste canadien entretenait des relations étroites avec l'Union soviétique.

La répression des communistes en vertu des RCDC commença en novembre 1939 alors qu'on ferma de force les journaux communistes The Clarion et Clarté. L'internement des communistes commença en mai 1940 sur la base d'un jugement rendu devant les tribunaux, mais ce n'est que le 6 juin que le cabinet King émettait un décret formel interdisant le Parti communiste du Canada, la Ligue de jeunes communistes et treize autres organisations, dont le Ukrainian Labour Farmer Temple Association, une organisation antifasciste.[2] Des agents de la GRC, autorisés à émettre leurs propres mandats de perquisition, ont reçu l'ordre d'arrêter les membres des organisations interdites, ainsi que toute personne distribuant de la littérature ou s'exprimant publiquement. Quiconque se faisait le défenseur des principes et des politiques promus par les organisations saisies d'interdiction était présumé coupable jusqu'à preuve du contraire. La GRC, qui harcelait le Parti depuis sa fondation en 1921, s'est mis à arrêter tous ceux qu'on soupçonnait d'être des communistes et on en a fait des prisonniers dans des camps d'internement à Kananaskis, en Alberta, à Petawawa, en Ontario, et à Hull, Québec.[3] Suite à leur libération en 1942, les communistes ont à nouveau assumé un rôle de leadership dans la lutte antifasciste et plusieurs ont courageusement servi outremer dans les Forces armées. L'organisateur des métallos, Dick Steel, par exemple, a perdu la vie dans la poche de Falaise en août 1944 à l'occasion d'une victoire importante des alliés.

Les RCDC ont aussi servi à attaquer les dirigeants syndicaux. L'inflation due à la guerre de 1939 à 1941 rongeait les salaires des travailleurs et il y avait une pénurie de main-d'oeuvre, ce qui a donné un essor au mouvement syndical. L'État s'est servi des RCDC comme d'une arme pour entraver l'organisation et pour attaquer les grèves et les piquetages. À titre d'exemple, en décembre 1939 le secrétaire du COI canadien, C.H. Millard, a été arrêté parce qu'il avait dit aux métallos de Timmins, en Ontario, que « nous devrions commencer par avoir la démocratie ici au Canada avant d'aller la défendre à l'étranger ». Les syndicalistes communistes étaient visés par l'État en tant que principaux « agitateurs » dans le mouvement ouvrier, non seulement parce qu'ils étaient des membres actifs d'un syndicat, mais parce qu'ils étaient les dirigeants et les organisateurs de syndicats tels que le Canadian Seamen's Union (CSU), les Travailleurs unis de l'électricité (TUE), les Travailleurs forestiers de l'Amérique, les Travailleurs des mines et des usines de fusion, le Comité organisateur des métallos et les Travailleurs unis de l'automobile. Par exemple, le 20 juin 1941 la GRC a arrêté le président du TUE, C.S.Jackson, l'ordre venant directement du ministre du Travail, McLarty, et du ministre des Munitions et de l'Approvisionnement, C.D. Howe, parce que ce syndicat était en grève à l'usine General Electric de Toronto et organisait les travailleurs de Westinghouse à Hamilton.

Les RCDC a aussi servi à attaquer et à démanteler les organisations progressistes, en particulier l'association de l'Ukrainian Labour Farmer Temple (ULFTA) qui avait à l'époque environ 20 000 membres au Canada et qui exerçait une grande influence auprès de la communauté ukrainienne. Le 5 juin 1940 le gouvernement a interdit l'ULFTA. Il a fermé ses salles et a interné trente-six de ses dirigeants antifascistes les plus expérimentés sur la base de fausses accusations. Les temples du travail, qui avaient été bâtis et financés par les travailleurs ukrainiens, ont fait l'objet de descentes d'un bout à l'autre du pays, des presses à imprimer ont été volées et de nombreuses bibliothèques réduites en flammes ou saccagées, de façon très similaire aux autodafés nazis en Allemagne. Par la suite le gouvernement a tout simplement donné les principales salles et les biens de l'ULFTA aux profascistes, à la Fédération nationale ukrainienne antisoviétique, ou encore les a vendus aux rivaux des propriétaires pour moins que rien.[4] Il y a eu des manifestations de masse contre ces confiscations illégales et certaines salles ont simplement été cadenassées. C'est seulement à l'été de 1942 que les dirigeants antifascistes de l'ULFTA ont été « relâchés sous condition » tandis que leurs organisations et leurs publications restaient frappées d'interdiction. Les biens de l'ULFTA ne lui ont jamais été retournés.[5]


  Au sixième congrès de l’Association du Ukrainian Labour Farmer Temple du 26 au 28 janvier 1925,
devant le temple du travail ukrainien de Winnipeg, au Manitoba.

De nos jours, nous apprenons à l'occasion que le gouvernement canadien se livre à l'espionnage de ses citoyens sur une grande échelle. Prenez le cas de l'auteur bien connu Farley Mowat. En 1985, dans le cadre d'une tournée pour la promotion de son livre, il devait se rendre en Californie mais s'est vu interdit d'accès par les douanes américaines. On apprenait plus tard que son nom figurait sur une liste de surveillance dressée à partir de renseignements transmis aux autorités américaines par la GRC. Les médias font état depuis quelque temps de l'ampleur de l'espionnage des gens au Canada. On apprenait que la GRC avait mis sur pied un Programme d'ordre public au printemps 2001 pour échanger des renseignements secrets sur les manifestants en préparation pour le sommet du G8 à Kanaskis, en Alberta. On apprenait que les Raging Grannies, l'ancien chef du NPD Ed Broadbent, des gens d'Amnistie internationale et de la United Church of Canada étaient la cible de surveillance ou d'infiltration.

Aujourd'hui la dictature Harper suit les traces de Mackenzie King et d'autres de son acabit en ayant aussi recours aux « moyens légaux » pour attaquer ceux qui osent se dresser à la défense de leurs droits. La liste est longue, mais mentionnons : les arrestations de masse des manifestants du G8/G20 en juin 2010 qui ont été « justifiées » sur la base d'une loi obscure de temps de guerre; les lois de retour au travail contre les travailleurs des postes en grève le 15 juin 2011, les travailleurs en grève d'Air Canada le 12 mars 2012 et les travailleurs du rail en grève le 30 mai 2012. C'est sans parler des attaques continuelles contre les peuples autochtones et leurs alliés, dont l'arrestation de manifestants défendant leurs droits ancestraux contre les monopoles de l'énergie ainsi que le meurtre d'hommes autochtones, comme ce fut le cas pas moins de trois fois ne serait-ce qu'en août. Il est aussi bien connu que depuis le 11 septembre 2001, la surveillance « légale » des Canadiens est à la hausse. En décembre 2011, on apprenait par exemple qu'en 2007 la GRC avait mis sur pied un vaste réseau de surveillance pour espionner les Premières Nations, se rapportant régulièrement aux « partenaires de l'industrie » tels les monopoles de l'énergie. Un autre exemple est la participation du Canada au programme d'espionnage mondial de la National Security Agency des États-Unis, appelé ECHELON, depuis au moins 1971. Cela donne au Canada la possibilité d'espionner ses propres citoyens en obtenant des renseignements recueillis par les autres pays qui font partie du réseau. Il peut donc prétendre à l'innocence puisque ce n'est pas lui qui recueille les renseignements sur ses citoyens.

En somme, il est important de noter la fréquence à laquelle l'État canadien a eu recours à des lois d'exception d'une vaste portée visant à limiter par les moyens légaux les droits du peuple canadien. De telles mesures ont été en vigueur au Canada de 1939 à 1954, pour un total de 15 ans, et à nouveau en 1970. À ce rythme, il ne serait pas impossible que les cercles dominants y aient recours une fois de plus, avec leurs objectifs sinistres.

Notes

1. King avait rencontré le dirigeant nazi Adolph Hitler et avait été très impressionné. Il a écrit dans son journal : « Si je prends toute la mesure de l'homme, il est de ceux-là qui aiment véritablement leurs semblables et leur pays. Pour eux, il serait sans doute prêt aux plus grands sacrifices. (Journal de William Lyon MacKenzie King, le 29 juin 2937). À ses yeux, Hitler était « un homme d'une grande sincérité et un patriote authentique ». (Journal, le 29 juin 1937).
2. L'interdiction du Parti communiste a mené à l'appellation en 1943 de Parti du travail progressiste. En 1959, les membres lui ont à nouveau donné le nom de Parti communiste du Canada.
3. Pour le récit des expériences vécues dans les camps d'internement, voir William Repka et Kathleen Repka (1982) : Dangerous Patriots : Canada's Unknown Prisoners of War, Vancouver, New Star Books.
4. La Fédération nationale ukrainienne réactionnaire continue de jouir de l'appui de l'État. En novembre 2012, le gouvernement Harper lui a remis 40 050 $ pour la rénovation de son centre de Winnipeg nord.
5. Pour en savoir davantage, voir Raymond Arthur Davies (1943) : This is Our Land : Ukrainian Canadians Against Hitler, Toronto, Progress Books.

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