Forum ouvrier

2 mai 2019

Le ministre du Travail du Québec intervient
pour le compte d'un monopole mondial

Alcoa et le gouvernement rejettent
la voie de la négociation avec les travailleurs en lockout d'ABI


Les travailleurs d'ABI amènent leurs revendications à l'Assemblée nationale à Québec
lors de la Marche de l'énergie, le 27 mars 2019. (Syndicat des Métallos)

Un geste inacceptable du gouvernement pour imposer aux travailleurs d'ABI les concessions demandées par Alcoa
Alcoa et le gouvernement du Québec travaillent ensemble à s'attaquer aux droits des travailleurs
De fausses concessions et de vraies concessions

Grève à la fonderie Brunswick de Glencore à Belledune, au Nouveau-Brunswick
Les travailleurs défendent leurs droits et leur dignité

La lutte pour des conditions de travail en santé qui sont acceptables aux personnes qui font le travail
Les infirmières intensifient leur lutte contre le temps supplémentaire obligatoire et sur d'autres questions brûlantes

Jour commémoratif du 28 avril
Pleurer les morts, lutter pour les vivants
Beaucoup de blessures et de décès liés au travail demeurent non signalés - Nick Lin
Jour commémoratif en 2019 - photos

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Reportage sur le Premier Mai et la lutte pour défendre les soins de santé publics en Ontario


Le ministre du Travail du Québec intervient
pour le compte d'un monopole mondial

Alcoa et le gouvernement rejettent
la voie de la négociation avec les
travailleurs en lockout d'ABI

Le ministre du Travail du Québec a présenté son hypothèse de règlement, qui est en fait la proposition d'Alcoa et du gouvernement, et il demande que les travailleurs l'acceptent comme la façon de mettre fin à l'impasse causée par le lockout injuste des travailleurs de l'aluminerie. Cette demande d'accepter ce qui est inacceptable depuis 16 mois démontre une fois de plus que le gouvernement refuse d'intervenir pour que le lockout cesse d'une façon que les travailleurs peuvent accepter dans la dignité.

Dès le début du lockout, les travailleurs ont demandé et ils demandent encore au gouvernement de faire pression sur les propriétaires pour qu'ils négocient avec les travailleurs une convention collective que ceux-ci jugent acceptable ou qu'ils acceptent à tout le moins l'arbitrage exécutoire. C'est le syndicat qui a proposé l'arbitrage comme une mesure de dernier recours pour dénouer l'impasse.

Pourquoi le gouvernement Legault et son ministre considèrent-ils si impensable et indigeste l'idée même que les travailleurs d'ABI aient le droit de négocier leurs conditions de travail ou à tout le moins de présenter leurs revendications et leurs préoccupations à un arbitre ? Depuis le début, aucune des offres du cartel n'a été le fruit de négociations avec la section locale 9700 des Métallos. Ses propositions pour régler et mettre fin au lockout, y compris cette proposition en fait commune d'Alcoa et du gouvernement, sont toutes une négation de la négociation. Rien dans ces propositions ne provient d'une prise de parole des travailleurs au sujet de leurs conditions, de leurs préoccupations et de leur juste réclamation à la richesse immense qu'ils produisent. Comment le gouvernement peut-il considérer une proposition déjà rejetée comme une solution à l'impasse ? Cette proposition constitue une négation du droit des travailleurs et de leurs représentants élus de négocier une convention collective. La proposition unilatérale du gouvernement et d'Alcoa est une entente de coulisses qui vise à faire taire la voix des travailleurs, cette voix qui s'est exprimée avec force lors de leur assemblée et de leur vote le 11 mars. En demandant un vote sur quelque chose auquel les travailleurs et leurs représentants n'ont jamais contribué, le ministre Boulet démontre qu'il ne respecte pas la voix des travailleurs et le droit de leurs représentants syndicaux de négocier une entente, que les travailleurs peuvent ensuite discuter et adopter ou non par un vote.

(Photo: Syndicat des Metallos)

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Un geste inacceptable du gouvernement
pour imposer aux travailleurs d'ABI les
concessions demandées par Alcoa

Le 17 avril dernier, le ministre québécois du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale, Jean Boulet, a remis une hypothèse de règlement et un protocole de retour au travail à la direction de l'Aluminerie de Bécancour inc. (ABI) et à la section locale 9700 du Syndicat des Métallos qui représente les travailleurs d'ABI. Il a présenté sa proposition bien qu'il sache très bien que les travailleurs d'ABI ont rejeté massivement une proposition presque identique il y a quelques semaines. On est en droit de présumer que le gouvernement du Québec est engagé dans une guerre d'information contre les travailleurs de l'aluminerie pour le compte d'Alcoa et qu'il cherche à justifier son refus de forcer le monopole à payer le montant prévu par son contrat hydroélectricité avec Hydro-Québec pendant ce long lockout et à conclure un accord négocié avec les travailleurs que ceux-ci jugent acceptable.

Par cette manoeuvre trompeuse, le gouvernement semble se faire le partenaire d'Alcoa et de son lockout injuste de 16 mois pour imposer des concessions aux travailleurs qui vont briser le syndicat et nuire sérieusement au bien-être de leur communauté. Cette duplicité a été confirmée quelques jours plus tard lorsque la direction d'ABI a accepté l'hypothèse de règlement en tant que « cadre de travail » pour en arriver à une entente finale, mettre fin au lockout, et redémarrer l'usine.

La section locale 9700 des Métallos a dénoncé l'hypothèse de règlement comme étant un « copier-coller de la dernière offre de l'employeur rejetée par nos membres », le 11 mars dernier. Comme il l'avait fait de l'offre d'Alcoa, la section locale 9700 considère la proposition du gouvernement comme une attaque inacceptable sur les enjeux principaux de l'organisation du travail, des horaires de travail, du régime de retraite, du respect de l'ancienneté, du recours à la sous-traitance et des abolitions de postes. Le syndicat a déclaré qu'il va informer ses membres du contenu de l'hypothèse mais n'organisera pas d'assemblée générale avec la tenue d'un vote sur quelque chose que les travailleurs ont déjà rejeté à 82 % dans une réunion, avec un taux de participation au vote de 90 % des membres.

Suite à l'assemblée générale du 11 mars et au vote de rejet de l'offre semblable d'Alcoa et de son protocole de retour au travail, le président de la section locale 9700 du Syndicat des Métallos, Clément Masse, avait fait les commentaires suivants à Forum ouvrier, qui semblent très bien s'appliquer au contenu de l'hypothèse sans valeur du gouvernement :

« Les travailleurs ont dit que ce n'est pas une entente négociée et que si on accepte une entente comme celle-là, c'est comme dire qu'on n'a plus de syndicat. L'employeur va faire ce qu'il veut. L'entente que l'employeur a présentée démontre un manque de respect pour nous et c'est la même chose en ce qui concerne le protocole de retour au travail. Nous avons bâti notre syndicat et nous avons bâti notre convention au cours de toutes ces années-là, ce n'est pas vrai qu'on va tout perdre parce que l'employeur veut casser le syndicat. C'est ce qui est ressorti des interventions au micro. Qu'on est capable de se tenir debout et ce n'est pas vrai qu'on va accepter n'importe quoi même après 14 mois. Ce n'est pas vrai que l'employeur va nous imposer sa façon de faire. Il va devoir s'asseoir et négocier dans le respect des travailleurs. Les travailleurs ont aussi tapé sur le clou de l'entente énergétique avec Alcoa qui nous nuit et ne fait rien que prolonger le conflit. »

Le président du syndicat avait réitéré sa position dans un communiqué publié par le Syndicat des Métallos dans la soirée du 11 mars.

« Cette offre est une série de reculs. ABI ne voulait pas négocier, ne voulait pas d'un arbitrage neutre et comptait imposer en misant sur l'épuisement de 14 mois de lockout. La réponse des membres est claire : ça ne passe pas. Ils ne veulent pas rentrer à genoux. Alcoa méprise le Code du travail en négociant de mauvaise foi, méprise les Québécois en leur faisant payer pour son lockout et méprise les travailleurs en fermant la porte à la négociation et à l'arbitrage. Le gouvernement du Québec doit intervenir. Le déséquilibre des forces est inacceptable tout comme le comportement de cette multinationale. »

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Alcoa et le gouvernement du Québec travaillent ensemble à s'attaquer aux droits des travailleurs


Lors d'une assemblée générale des membres le 11 mars 2019, les travailleurs ont rejeté massivement l'offre et le protocole de retour au travail d'Alcoa, qui sont presque identiques à ce que propose le gouvernement du Québec. (Syndicat des Métallos)

Au lieu de se tenir aux côtés des travailleurs du Québec, en solidarité contre cette attaque injuste d'un puissant oligopole mondial, le ministre du Travail Jean Boulet se livre à une mise en scène pour s'en prendre aux travailleurs en lockout d'ABI à Bécancour, membres de la section locale 9700 des Métallos. Le ministre se promène maintenant partout, déclarant sa « déception » que le syndicat ne capitulera pas et ne présentera pas cette hypothèse du gouvernement/Alcoa en assemblée générale pour y tenir un vote.

Le ministre Boulet refuse de reconnaître que les travailleurs ont rejeté massivement une proposition semblable le 11 mars. Il essaie de dépeindre le syndicat sous des traits négatifs, allant jusqu'à suggérer qu'il est antidémocratique parce qu'il ne soumettra pas cette proposition à un vote des travailleurs. Boulet essaie de camoufler le refus du gouvernement de forcer Alcoa à respecter son contrat avec Hydro-Québec et de payer pour son bloc d'hydroélectricité pendant le lockout et de faire pression sur la compagnie pour qu'elle négocie une convention collective ou accepte l'arbitrage.

Boulet veut que les travailleurs votent une nouvelle fois sur ce qu'ils ont déjà rejeté. Il ne respecte pas la prise de position ferme des travailleurs, exprimée le 11 mars, qu'Alcoa, malgré son grand pouvoir et son comportement dictatorial, va devoir respecter leurs droits et négocier une convention collective qu'ils jugent acceptable ou soumettre la dispute à l'arbitrage.

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De fausses concessions et de vraies concessions

Le ministre du Travail Jean Boulet prétend qu'avec son hypothèse de règlement pour mettre fin au lockout à ABI, il demande des concessions aux deux parties. Comme l'a fait Alcoa depuis le début, le ministre Boulet prétend que des concessions demandées aux deux parties, sans les échanges de part et d'autre qui sont propres aux discussions et aux négociations, rendent son hypothèse juste, équilibrée et digne d'appui.

Les travailleurs doivent garder à l'esprit qu'aucune des concessions demandées par la compagnie ou le gouvernement, et encore moins les diverses propositions, n'ont été le résultat de négociations avec les représentants syndicaux des travailleurs d'ABI. Dans une convention collective négociée, les échanges de part et d'autre et les compromis entre les parties font partie des négociations. Le fait de simplement proclamer une solution finale et demander aux travailleurs de voter parce que les deux parties ont soi-disant fait des concessions, montre que le gouvernement et la compagnie ne veulent pas  d'échanges et encore moins de négociations qui respectent le droit des travailleurs et de leurs représentants de trouver une solution aux différends qui existent.

Radio-Canada dit avoir reçu une copie de l'hypothèse de règlement et le ministre lui-même a décrit certains de ses aspects. Le fait de rendre la proposition publique et d'encourager la spéculation est une forme de guerre d'information qui vise à faire passer quelque chose qui est inacceptable et nie la négociation et les droits des travailleurs.

En l'absence de tout forum avec les travailleurs dans le cadre de négociations sérieuses, Boulet parle publiquement de deux concessions qu'il demande aux propriétaires.

Le ministre veut d'abord que la direction d'ABI abandonne son grief en dommages de 19 millions de dollars contre la section locale 9700 et ses officiers. Elle a déposé ce grief en avril pour soi-disant sabotage des opérations dans les mois qui ont mené au lockout en janvier 2018.

Qualifier le retrait de ce grief mensonger et inventé par la direction de concession dans le cadre de négociations d'une convention collective est entièrement frauduleux. Le syndicat a souligné depuis longtemps que la compagnie n'a jamais mentionné quelque geste de sabotage que ce soit pendant la période où ils sont censés avoir été commis. Les plaintes des directions d'entreprise au sujet de la sécurité des opérations et de soi-disant menaces de sabotage pendant les négociations sont devenues une propagande constante et des prétextes pour justifier des lockouts. Le retrait du grief en dommages n'est pas une concession mais un changement de tactique. Un retrait ne change rien aux demandes de concessions d'Alcoa en ce qui concerne les conditions de travail, la sécurité des travailleurs et les droits syndicaux. Le syndicat n'a même jamais demandé le retrait du grief dans tous ses efforts pour avoir des discussions avec la compagnie. En plus, il est courant, à la fin d'une négociation, que les deux parties renoncent à leurs poursuites dans le cadre d'une convention négociée. Le ministre Boulet l'a lui-même admis quand il a dit ceci à la presse :

« Quand j'ai écrit le protocole de retour au travail, c'est l'une des concessions que j'ai demandées à la compagnie en lui disant : quand on fait un protocole de retour au travail, on fait table rase, on renonce à tous les recours qui ont été entamés avant ou pendant le conflit, reliés directement ou indirectement au conflit. »

L'autre concession demandée à la compagnie, selon le ministre, c'est la modification du protocole de retour unilatéral que le cartel a voulu imposer et que les travailleurs ont rejeté avec mépris lors de l'assemblée générale et du vote le 11 mars. Selon le ministre, la réintégration des travailleurs se fera maintenant sur 6 mois et non plus dix mois.

Le syndicat a déjà rejeté une période de 10 mois ou 6 mois avant la réintégration des travailleurs comme étant sans précédent et inacceptable. Après la grève de 2004, il a fallu seulement deux mois pour réintégrer tous les travailleurs d'ABI. En plus, l'échéancier du protocole de retour au travail proposé, qu'il soit de 10 ou 6 mois, demeure soumis à ce que les propriétaires vont définir comme conditions de sécurité du retour au travail. Également, selon Clément Masse, le président du syndicat, l'hypothèse de règlement parle d'un « objectif » de réintégration et de relance plus rapide des activités, et non d'une « obligation ». La prétention du ministre qu'un changement de 10 à 6 mois est une concession de la part de la compagnie, alors que son imposition unilatérale d'un protocole de retour au travail rétrograde avait été universellement dénoncée, est de la propagande hypocrite pour imposer le diktat de la compagnie, entériné par le gouvernement, qui s'attaque aux droits des travailleurs et à leur dignité.

Les concessions réelles qui sont demandées dans l'ici et le maintenant, depuis le début du lockout et même avant, sont celles que les oligarques exigent des travailleurs dans tous les aspects de leur vie au travail et à la retraite. En fait, toute cette période de non-négociation a été une série de diktats unilatéraux pour des concessions et des offres finales de la direction d'ABI. Les travailleurs d'ABI n'ont même pas pu présenter de demandes pour défendre leurs conditions de travail telles qu'elles existent maintenant et encore moins pour les améliorer. Tous leurs efforts ont visé à préserver ce qu'ils ont. Clément Masse a dit que le syndicat aurait même accepté que la convention collective soit simplement reconduite.

Dès le début de leurs efforts pour en arriver à une nouvelle convention collective, les travailleurs ont demandé l'élimination de certaines demandes de concessions de la compagnie ou encore la réduction de leur portée. C'est le cas par exemple des abolitions de postes syndiqués. Le gouvernement suggère que l'opposition du syndicat à des concessions est en fait une série de nouvelles demandes mises de l'avant par le syndicat, qui mettent à mal la compétitivité d'Alcoa sur les marchés mondiaux et risquent de faire fermer l'usine.

Le syndicat a mentionné qu'un professeur de relations de travail de l'Université du Québec à Trois-Rivières, qui a lu l'hypothèse de règlement, a écrit que le ministre est préoccupé de la compétitivité mondiale d'Alcoa et a même ajouté un nouveau libellé dans son hypothèse de règlement qui va faciliter encore plus le recours à la sous-traitance pour éliminer les emplois syndiqués réguliers et abaisser les conditions de travail à l'usine.

Le gouvernement poursuit sa campagne inacceptable contre les travailleurs de l'aluminium pour le compte d'une puissance mondiale. Il refuse d'accomplir son devoir en tant que gouvernement de défendre le bien-être et la sécurité de son propre peuple. Cette voie désastreuse accentue encore plus le déséquilibre entre des oligopoles comme Alcoa et leurs travailleurs, les communautés et les sociétés dans lesquelles ces géants mondiaux mènent leurs activités. Le gouvernement offre lâchement le Québec sur un plateau d'argent à ces grands intérêts privés supranationaux au lieu de défendre les travailleurs et le peuple en restreignant le pouvoir de ces oligopoles et en travaillant à établir un équilibre qui sert le peuple et est approuvé et contrôlé par lui.

(Photo : Syndicat des Métallos)

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Grève à la fonderie Brunswick de Glencore à Belledune, au Nouveau-Brunswick

Les travailleurs défendent leurs droits et leur dignité

En début de soirée le 24 avril, les 281 travailleurs de la production et de l'entretien de la fonderie Brunswick de Glencore, à Belledune, au Nouveau-Brunswick, se sont mis en grève. Les travailleurs ont déclenché leur grève pour se défendre contre les demandes de concessions du monopole minier et métallurgique Glencore. Les travailleurs de la fonderie sont membres de la section locale 7085 du Syndicat des Métallos.

Avec un taux de participation de près de 100 %, les travailleurs se sont réunis les 4 et 5 avril pour discuter de la situation et décider d'une ligne de conduite. Quatre-vingt-seize pour cent ont voté en faveur du retrait de leur capacité de travail à compter du 24 avril à 18 heures. Lorsque les travailleurs du quart de jour sont arrivés le matin avant la grève prévue le soir, les contremaîtres de l'entreprise les ont empêchés de force de pénétrer dans l'usine, sous prétexte que la sécurité des opérations était menacée.

Deux jours plus tard, la Cour du Banc de la Reine du Nouveau-Brunswick a rendu, au nom des oligarques de Glencore, une ordonnance limitant le nombre de piqueteurs à six à l'entrée ou à la sortie de la fonderie et dans tout autre lieu géographique au Nouveau-Brunswick où Glencore exerce ses activités. Le tribunal a également ordonné aux travailleurs de n'exercer aucune entrave aux mouvements des employés, des clients, des fournisseurs et d'autres personnes qui entrent à l'usine ou en sortent, et de ne pas les « harceler », interdisant même de les photographier. Le tribunal a également ordonné aux travailleurs de ne gêner d'aucune manière la circulation des wagons de trains à destination et en provenance de l'usine qui emploie au total 450 personnes.

Le président de la section locale 7085, Bart Dempsey, a dit que le principal différend avec l'entreprise concernait la santé et la sécurité. Glencore demande que le poste rémunéré à temps plein du représentant syndical qui copréside le comité conjoint sur la santé et la sécurité soit transformé en un poste à temps partiel. Le poste à temps plein a été créé après une grève en 1991, au cours de laquelle la santé et la sécurité étaient un enjeu.

Le président Dempsey a dit à Forum ouvrier : « Ils essaient de se débarrasser de notre représentant à la sécurité à plein temps. Ils veulent éliminer son bureau. C'est un problème majeur pour les travailleurs. Il y a beaucoup de problèmes liés à la santé et la sécurité dans une fonderie comme la nôtre. Nous travaillons avec du métal en fusion, des zones de circulation intense d'équipements, des ponts roulants, etc. Il y a également tous les produits chimiques avec lesquels vous travaillez. C'est un endroit de travail dangereux. »

Les travailleurs sur les lignes de piquetage ont déclaré aux médias que, sous la direction de Glencore, la fonderie était devenue un lieu de travail encore plus dangereux. Dans cette situation, les travailleurs disent qu'il est important d'avoir un représentant syndical à temps plein sur le site, qu'ils peuvent consulter pour déterminer s'il est dangereux ou non d'effectuer un travail.

Dans une autre attaque au droit des travailleurs d'avoir une présence syndicale importante sur le lieu de travail, Glencore veut cesser de payer à plein temps le président de la section locale. En diminuant la présence syndicale, l'entreprise ne veut payer qu'un certain nombre d'heures pour les activités syndicales du président, en dehors de ses heures normales de travail.

Selon le syndicat, Glencore demande aussi des concessions en ce qui a trait aux régimes de retraite et aux avantages sociaux. Le pire coup que devraient encaisser les travailleurs en ce qui concerne le retraite serait l'élimination de la préretraite volontaire, qui permet aux participants du régime de retraite à prestations déterminées (PD) de prendre leur retraite avant d'avoir 65 ans, après un certain nombre d'années de travail, et de recevoir leur pleine pension. Si le programme est éliminé, les participants au régime PD qui choisissent de prendre leur retraite anticipée seraient soumis à une réglementation provinciale réduisant leur montant de pension de 6 % par an avant la date prévue de leur départ à la retraite. Pour recevoir leur pension complète, ils devraient travailler jusqu'à l'âge de 65 ans, quel que soit le nombre d'années passées à la fonderie, lesquelles ont de lourdes conséquences sur la santé des travailleurs.

L'élimination du processus actuel de préretraite serait un autre coup dur pour les travailleurs après que l'entreprise eut imposé un changement majeur à leur régime de retraite au cours des négociations précédentes. Pour la durée de quatre ans de la convention actuelle qui est entrée en vigueur en 2015, l'entreprise a fermé la porte au régime à prestations déterminées aux employés ayant moins de 12 ans d'ancienneté à la fonderie et les a transférés vers un arrangement à cotisations déterminées de moindre qualité.

Glencore souhaite également réduire la couverture des employés en matière de santé, de soins dentaires et de médicaments.

Les travailleurs revendiquent fermement la dignité et le respect qu'ils méritent pour le dur travail qu'ils accomplissent dans cette fonderie de plomb, d'argent et de cuivre. Les concessions sur la santé et la sécurité et les retraites sont inacceptables. Les travailleurs portent des pancartes sur leurs lignes de piquetage qui disent : « Ne touchez pas à nos représentants syndicaux ! », « Ne touchez pas à nos pensions ! » et « L'intimidation doit cesser ! ».

Le président Dempsey a dit à Forum ouvrier que depuis la signature de la dernière convention collective en 2014, Glencore a licencié 32 travailleurs pour diverses raisons, la plupart d'entre eux en vertu de la doctrine juridique inhumaine de l' « impossibilité de l'exécution du contrat de travail », ce qui se traduit par une cessation d'emploi pour cause d'accident ou de maladie pour les travailleurs qui sont en congé d'invalidité prolongée. Ceci est une marque de commerce de Glencore en ce qui a trait aux relations de travail et c'est ce que les travailleurs cherchent à arrêter avec leur grève, a dit Dempsey.

(Photo: District 6 du Syndicat des Métallos)

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La lutte pour des conditions de travail en santé qui sont
acceptables aux personnes qui font le travail

Les infirmières intensifient leur lutte contre
le temps supplémentaire obligatoire et
sur d'autres questions brûlantes


Les professionnelles de la santé en Mauricie participent à la journée d'action
« Sans travail supplémentaire obligatoire » du 8 avril 2019. (FIQ)

Les infirmières partout au Canada s'attaquent à la crise des conditions de travail dans le secteur de la santé. Ces conditions de travail ont de graves répercussions sur la santé et la sécurité des travailleurs de la santé et sur les patients dont ils sont responsables. Les infirmières en ont assez des paroles et exigent des mesures concrètes du gouvernement et des administrations des institutions de santé pour qu'ils remédient à la situation. En ce moment, leurs actions sont concentrées sur l'opposition au temps supplémentaire obligatoire, que les gouvernements et les administrations ont imposé aux infirmières en tant que système permanent de gestion de crise.

La Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ)

Le 8 avril, près de 76 000 infirmières, infirmières auxiliaires, inhalothérapeutes et perfusionnistes cliniques, membres de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) ont tenu une journée d'action réussie « Sans temps supplémentaire obligatoire » (TSO). Les membres de la FIQ n'ont pas fait de temps supplémentaire obligatoire pendant cette journée. La FIQ en conclut que la journée réussie sans incident majeur montre que le système de santé peut fonctionner sans TSO.

Peu après cette journée de mobilisation, la direction de la FIQ a rencontré la ministre québécoise de la Santé et des Services sociaux pour faire progresser la revendication des infirmières pour le rehaussement des postes. Cela veut dire, par exemple, transformer un poste de deux jours en un poste plus stable, à temps plein ou à quatre jours semaine. Cela doit se faire sans imposer une rotation des infirmières par laquelle les infirmières sont constamment déplacées d'une institution à une autre, parfois sur une grande distance.

Une entente a été conclue en vertu de laquelle la ministre s'est engagée à ce que les PDG des établissements de santé convoquent sous peu les syndicats locaux pour commencer le travail de rehaussement des postes afin qu'un plan d'action précis soit élaboré avant l'été. Il y a aussi eu une entente pour faire le bilan des projets pilotes de ratios infirmières/patients qui ont été mis en place dans un certain nombre d'unités de la santé de différentes institutions à l'échelle du Québec. Cette évaluation faite en commun contribuera à déterminer les paramètres des ratios devant être déployés dans les institutions où les besoins sont particulièrement criants.

Le Syndicat des infirmières du Nouveau-Brunswick (SINB) s'attaque au temps supplémentaire obligatoire

Le SINB s'attaque au problème de l'impossibilité pour les infirmières de quitter le travail à la fin de leur quart de travail. Celles-ci sont forcées de travailler des quarts de travail dont la durée peut aller jusqu'à 24 heures sous prétexte d' « abandon du patient » . Cela crée un milieu de travail non sécuritaire et compromet la sécurité des soins aux patients, ce qui est inacceptable, selon le syndicat des infirmières.

Le syndicat rappelle que les infirmières et infirmiers immatriculés sont régis par la Loi sur les infirmières et infirmiers, par le Code de déontologie des infirmières et infirmiers (le « Code ») et par l'Association des infirmières et infirmiers du Nouveau Brunswick (« AIINB »), comme organisme de réglementation. En tant que professionnelles immatriculées, les infirmières doivent être autorisées à déterminer elles-mêmes leur aptitude à pratiquer leur profession. Le Code prévoit ce qui suit :

« Les infirmières doivent maintenir leur aptitude à exercer la profession. Si elles savent qu'elles n'ont pas la capacité physique, mentale ou affective nécessaire pour pratiquer de façon sécuritaire et compétente, elles doivent cesser de fournir des soins après avoir consulté leur employeur. [...] »

Étant donné la gravité de la question, le syndicat a collaboré avec l'AIINB à la création d'une trousse de sécurité qui contient les Directives aux infirmières et infirmiers immatriculés à qui l'on demande de travailler au delà d'un relais prévu à l'horaire et une Lettre concernant la sécurité au travail au-delà d'un relais prévu à l'horaire.

La lettre se lit ainsi :

« La présente lettre confirme que le _____ (date), dans l'unité/l'établissement suivant : ________, vous, ______, ma surveillante (mon surveillant) avez demandé que je, ________, demeure
en poste au-delà du relais prévu à mon horaire. Je vous ai dit que je considérais professionnellement qu'il n'était pas sécuritaire de travailler au-delà du relais prévu à mon horaire pour des questions de santé personnelles, y compris la fatigue, et je vous ai demandé de faire tout votre possible pour trouver une relève.

« La convention collective qui régit mon emploi ne prévoit pas des heures supplémentaires obligatoires. Sachez aussi que, selon les directives professionnelles de l'Association des infirmières et infirmiers du Nouveau-Brunswick, les situations suivantes ne sont pas considérées comme un abandon : refuser de travailler des heures ou des relais supplémentaires au-delà de l'horaire affiché et l'avoir indiqué à temps ou se retirer des soins en raison de préoccupations reliées à l'aptitude à exercer la profession (questions de santé personnelles, y compris la fatigue) en donnant un avis approprié.

« Veuillez confirmer votre décision par écrit.

« Autorisation de quitter

« J'atteste que j'ai lu et que je comprends ce qui précède, et que vous m'avez avisée (avisé) que vous considérez qu'il n'est pas sécuritaire de travailler pendant les heures supplémentaires que je vous ai demandé de faire. Je trouverai un remplaçant. Vous pouvez partir à_______.

« Signature de la surveillante ou du surveillant

« ou

« Obligation de travailler

« J'atteste que j'ai lu et que je comprends ce qui précède, et que vous m'avez avisée (avisé) que vous considérez professionnellement qu'il n'est pas sécuritaire de travailler pendant ces heures supplémentaires. Malgré tout, je vous demande de travailler de ______à _____.

« Signature de la surveillante ou du surveillant »

La lettre vise à contrer les menaces et les pressions exercées sur les infirmières qui font en sorte qu'elles ne puissent quitter à la fin de leur quart de travail.

Le Syndicat des infirmières et infirmiers autorisés de Terre-Neuve-et-Labrador (SIIATNL)

Le SIIATNL mène présentement une campagne en opposition à l'insuffisance des niveaux des effectifs infirmiers. Le syndicat souligne que les problèmes de manque d'effectifs mènent à des situations où les infirmières sont obligées de travailler parfois des quarts de travail de 24 heures, ou cinq quarts de travail dans une semaine qui peuvent se prolonger jusqu'à 16 ou 20 heures de travail et parfois jusqu'à 7 quarts de travail consécutifs de 12 heures.. À cause de cela, il arrive que des patients doivent être transportés par avion hors de la province afin de recevoir les soins dont ils ont besoin. Le SIIATNL exige le retrait de la règle implicite selon laquelle le système de santé doit fonctionner sur la base de l'épuisement des infirmières et de leur travail dans des conditions non sécuritaires, ce qui les met en danger et met en danger leurs patients. Le syndicat revendique l'embauche immédiate de plus d'infirmières pour que le secteur connaisse des niveaux d'effectifs adéquats.

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Jour commémoratif du 28 avril

Pleurer les morts, lutter pour les vivants

Comme à chaque année, le Jour commémoratif des personnes décédées ou blessées au travail a été marqué à l'échelle du pays. Comme à chaque occasion, on a commémoré les vies perdues par le passé et on leur a donné toute leur signification, et on a en particulier commémoré les vies perdues l'an dernier. Les données de 2018 ne sont pas encore disponibles mais l'Association des commissions des accidents du travail du Canada a signalé qu'il s'est produit 951 décès liés au travail en 2017, soit 46 de plus qu'en 2016. Ces décès n'incluent pas ceux des travailleurs qui ne sont pas couverts par les régimes provinciaux d'indemnisation des accidents du travail comme les travailleurs autonomes, les aides domestiques, les employés de banque et les agriculteurs.

Un grand nombre des blessures et des décès liés au travail ont été causés par les politiques négligentes des gouvernements fédéral et provinciaux visant à éliminer la réglementation et le signalement des blessures et décès en milieu de travail. C'est une pratique liée à l'offensive antisociale néolibérale. Au nom d'éliminer les formalités administratives, d'ouvrir le Canada aux affaires et de ne pas entraver la réalisation du profit privé, on s'attaque à la santé et à la sécurité des travailleurs. C'est le cas des trois travailleurs ferroviaires dans la force de l'âge qui sont décédés en février à cause de l'objectif des sociétés ferroviaires d'augmenter leurs marges de profits au détriment du facteur humain/conscience sociale.

Une autre préoccupation sérieuse est celle des camionneurs d'un bout à l'autre du pays qui font de longues heures de travail pour joindre les deux bouts et dont les conditions de travail se sont détériorées au point de devenir un problème qui doit être traité d'urgence. Les travailleurs de la santé, les enseignants et les travailleurs de l'éducation, qui souffrent de graves problèmes de santé liés au stress et au stress post-traumatique, tant les conditions de travail sont intenables, luttent pour changer la situation. Le traitement par les gouvernements des travailleurs blessés est aussi une source de traumatisme. La sous-traitance, la privatisation et la restructuration dans le secteur public et dans l'économie dans son ensemble causent aussi beaucoup de stress. Le travail irrégulier est devenu un phénomène grandissant et dangereux qui affecte maintenant 31 pour cent des travailleurs qui vont souvent d'un emploi à l'autre sans stabilité ou sécurité d'emploi et sans que leur droit à des conditions de travail saines et sécuritaires soit défendu par une lutte organisée. Le système de paie Phoenix, qui n'a jamais fonctionné correctement depuis sa création en 2016, cause un stress énorme aux travailleurs qui ne sont jamais certains de recevoir leur salaire à temps pour payer leurs factures.

La question de la santé et de la sécurité a dépassé de beaucoup les endroits de travail où elle pouvait auparavant être traitée par les syndicats et les lois du travail, du moins dans les endroits de travail syndiqués et couverts par ces lois. Cette question est devenue un problème politique qui requiert que le pouvoir décisionnel passe aux mains de ceux pour qui les décisions vont servir la vie elle-même et non la recherche du profit. Dans ce sens, le mouvement ouvrier s'attaque au problème de comment rendre les entreprises redevables lorsque la législation du travail ne soutient plus un régime reposant sur le concept d'équité entre parties aux intérêts opposés, le capital d'un coté et le travail de l'autre. Pendant ce temps, les gouvernements interviennent ouvertement dans l'économie pour criminaliser l'opposition à un diktat inacceptable en prétendant qu'elle endommage l'intérêt national.

La chose la plus importante est que la prise de décision sur la direction de l'économie et sur qui elle sert doit revenir aux travailleurs et non aux riches. Il est inadmissible que les travailleurs n'aient aucun moyen de décider des politiques en leur propre nom. À l'heure actuelle, un des traits principaux de la situation est que les travailleurs n'ont aucune raison de faire confiance aux partis politiques qui appartiennent à un cartel au sein duquel ils se font concurrence pour former des gouvernements de partis. Les travailleurs sont soumis à un système électoral où ils sont supposés choisir ceux à qui ils vont confier la tâche d'agir en leur nom. Cette prétendue liberté de choix est qualifiée de démocratie, dans laquelle on fait de personnes appelées des représentants des mandataires qui agissent en notre nom. C'est une fraude qui a des conséquences très sérieuses, y compris en ce qui concerne la santé et la sécurité des personnes aux endroits de travail.

Le mot d'ordre « Pleurer les morts, lutter pour les vivants » guide de manière appropriée les travailleurs à l'occasion du Jour commémoratif, pour qu'ils identifient et prennent en main les luttes qui leur permettront d'exercer un contrôle sur leur vie.

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Beaucoup de blessures et de décès liés
au travail demeurent non signalés

Mobilisation pour le 1er juin, la Journée
des travailleurs accidentés en Ontario

Les données annuelles officielles sur les décès liés au travail au Canada se situent généralement entre 900 et 1 000, des chiffres qui sont compilés à partir des données des agences d'indemnisation des accidentés du travail. Le nombre réel est sans aucun doute plus élevé car les chiffres de ces agences d'indemnisation ignorent de nombreux décès de travailleurs. Une étude récente souligne ces lacunes et montre plus que jamais la nécessité que les travailleurs s'investissent de pouvoir afin que leur droit à des conditions de travail saines et sécuritaires puisse se réaliser de manière significative.

Les auteurs de l'étude écrivent que leur objectif est d'élargir la discussion sur les problèmes auxquels les travailleurs sont confrontés, qui contribuent aux maladies et au décès. L'étude, intitulée « Work-Related Deaths in Canada », publiée en novembre 2018 dans Labour, the Journal of Canadian Labour Studies, mentionne ceci dans son résumé :

« Ce document examine de manière critique les statistiques officielles sur les décès au travail au Canada. Chaque année, l'Association des commissions des accidents du travail du Canada fait rapport sur le nombre de travailleurs décédés des suites d'une blessure ou d'une maladie liées au travail. Le problème est que ces données indiquent le nombre de décès acceptés comme sujets à une indemnisation et ne constituent pas un système de suivi de tous les décès liés au travail. Nous nous sommes inspirés de diverses sources et nous avons employé une définition large de ce qui constitue un décès au travail afin de tenter de produire une estimation plus précise du nombre des décès liés au travail. Notre objectif n'est pas de produire un nombre définitif de décès annuels au travail, ce qui est impossible à cause de la pauvreté des sources de données, mais plutôt de contester les méthodes dominantes de conceptualisation de ce qui constitue un décès lié au travail et de contribuer aux efforts en cours pour sensibiliser les universitaires, les responsables politiques et le grand public à cette question importante. Dans ce sens, notre objectif est de nous demander si les statistiques officielles sur les décès au travail sont complètes lorsqu'elles sont confrontées à une compréhension plus large de ce qui constitue un décès au travail. »[1]

L'étude souligne qu'en raison de cette source d'information limitée, des milliers de décès ne figurent pas dans les statistiques sur la santé et la sécurité au travail, notamment en ce qui concerne les travailleurs non couverts par un système public d'indemnisation des accidents du travail, ou les décès par suicide causé par le stress, ou les décès survenus lors des trajets vers les endroits de travail ou au retour du travail et les maladies professionnelles. Selon les provinces, seulement 70 à 98 % de la main-d'oeuvre est couverte par un système public d'indemnisation des travailleurs, ce qui représente plus de deux millions de travailleurs au Canada dont les blessures ou les décès au travail ne seraient pas inclus dans les statistiques officielles. Cela comprend les travailleurs autonomes, les aides domestiques, les employés de banque et les agriculteurs, ainsi que les secteurs les plus vulnérables de la classe ouvrière dont les conditions de travail sont parmi les plus dangereuses, les travailleurs migrants et sans papiers.

« Cette situation s'apparente aux statistiques criminelles ne comprenant que des homicides résolus, ce qui donne l'impression que les tentatives de meurtre, les meurtres non résolus ou les morts suspectes ne sont pas un sujet de préoccupation », écrivent les auteurs de l'étude. Steven Bittle, professeur agrégé de criminologie à l'Université d'Ottawa et responsable de la recherche, a expliqué au réseau CBC : « Notre notion de ce qui constitue un accident mortel en milieu de travail est trop étroite et c'est une erreur de comptabiliser les accidents mortels liés au travail à partir de nos régimes d'indemnisation. » Bittle et les autres auteurs estiment qu'un chiffre plus précis serait d'entre 10 000 et 13 000 décès par année.

Les auteurs de l'étude proposent que les décès lors des déplacements entre le domicile et le travail fassent partie des statistiques sur les décès liés aux endroits de travail, un chiffre qu'ils évaluent à environ 460 par année. « Nous vivons dans une culture de présentéisme, où on s'attend à ce que les gens soient au travail, en vertu de cette culture ou par des pressions sur la main-d'oeuvre, peu importe s'ils sont malades ou si les conditions météorologiques sont telles qu'ils ne devraient pas être au volant à ce moment précis », a dit Bittle à CBC.

Une autre catégorie de décès qui, selon les auteurs, devraient faire partie des données sont les personnes qui ne sont pas des travailleurs mais qui meurent de façon collatérale, et dont le décès peut être directement attribué à un endroit de travail. C'est le cas par exemple lorsque la conjointe d'un travailleur meurt de mésothéliome après avoir été exposée à l'amiante à chaque fois qu'elle lavait l'uniforme de travail de son partenaire, ou que des passants sont tués par une grue ou à la suite de l'écrasement d'un échafaudage à proximité d'un site de construction.

Les auteurs examinent aussi les situations de stress extrême engendrées par des conditions de travail qui ont peu de chance d'être couvertes par les arrangements actuels. Ils donnent l'exemple d'un homme en Saskatchewan qui travaillait pour une petite municipalité et qui en 2017 a mis fin à ses jours, aux prises avec des problèmes de santé mentale aggravés par son travail. Dans ce cas particulier, la Commission des accidentés du travail de la province a reconnu que son décès était en grande partie liée à son employeur. Cependant, on souligne dans l'étude que les réclamations liées à des suicides sont grandement sous-estimées. Bittle évalue qu'à chaque année entre 10 et 17 % des suicides au Canada pourraient être classés comme étant liés au travail, ce qui représente entre 400 et 800 décès par année.

En guise de conclusion, les auteurs de l'étude affirment que la catégorie de décès la plus sous-estimée est celle liée aux maladies professionnelles. Présentement, alors qu'entre 500 et 600 décès attribués aux maladies industrielles sont signalés par les régimes d'indemnisation des accidentés du travail à l'échelle nationale, Bittle estime que le nombre réel serait plus près de 8 000. De telles situations sont bien connues des travailleurs, de leurs familles et de leurs organisations, qui depuis des décennies se battent bec et ongle pour que les cancers liés au travail et d'autres maladies soient reconnus par les régimes d'indemnisation.

Pour ce qui est de certains emplois, les organisations de défense des travailleurs ont réussi à changer la situation. Selon CBC, l'Île-du-Prince-Édouard a adopté en janvier la Loi sur les indemnisations des travailleurs qui a accordé aux pompiers la présomption de maladie professionnelle pour certains types de cancer et d'autres maladies. L'Île-du-Prince-Édouard est la dernière province à prévoir de telles dispositions.

Un autre exemple que connaissent les lecteurs de Forum ouvrier est la lutte des travailleurs de General Electric à Peterborough, en Ontario, pour la reconnaissance des demandes d'indemnisation des travailleurs exposés aux produits chimiques toxiques pendant des années, pour eux et leurs survivants.[2] Un autre exemple est le McIntyre Power Project dans le Nord de l'Ontario, qui réclame justice pour les mineurs des mines d'or et d'uranium de l'Ontario qui, dans années 1950, ont été forcés de respirer une poudre d'aluminium avant chaque quart de travail prétendument pour se protéger de la silicose. Un grand nombre d'entre eux ont plus tard souffert d'importants troubles neurologiques, dont la maladie de Parkinson et l'Alzheimer.[3]

L'étude souligne le caractère juste de la campagne du Réseau ontarien des groupes de travailleurs accidentés, « L'indemnisation des travailleurs accidentés est un droit » et de sa lutte pour un système d'indemnisation qui est vraiment universel, afin qu'aucun accident ou décès ne soit dissimulé, et pour que les causes de ces accidents et décès soient identifiées et éliminées et que les victimes reçoivent une indemnisation. L'étude confirme la justesse de la lutte de la classe ouvrière pour la dignité du travail, en commençant par la lutte pour mettre fin aux conditions de travail qui mettent en péril la vie et la santé des travailleurs.

Notes

1. « Work-Related Deaths in Canada », Steven Bittle, Ashley Chen, Jasmine Hébert, Labour, Journal of Canadian Labour Studies, Vol. 82 (2018)

2. Voir : « Les travailleurs de General Electric à Peterborough en butte à des injustices », entrevue avec Sue James, présidente du Comité consultatif en santé au travail des retraités de GE, Ontario Political Forum, le 10 mai 2018

Voir aussi « Les propositions des retraités de General Electric de Peterborough pour une réforme de l'indemnisation des travailleurs », Forum ouvrier, 5 juin 2018

3.Voir : « À la défense des travailleurs accidentés dans le Nord de l'Ontario - Quatre journées d'action réussies en appui aux droits des travailleurs accidentés », Ontario Political Forum, le 31 mai 2018

(Source : CBC)

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Jour commémoratif 2019 - photos

Québec



Drummondville, Québec



Ottawa, Ontario


Kingston, Ontario


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Toronto, Ontario



Mississauga, Ontario


Hamilton, Ontario


Oakville, Ontario; St. Catharines, Ontario


London, Ontario


Windsor, Ontario


Winnipeg, Manitoba


Calgary, Alberta


Edmonton, Alberta


Vancouver, Colombie-Britannique


Prince George, Colombie-Britannique

(Photos: FO, FTQ, M. Brault, TAWC, HLC, MFL, VBTC.)

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Reportage sur le Premier Mai et la lutte pour défendre les soins de santé publics en Ontario


Manifestation pour des soins de santé publics, à Queen's Park, le 30 avril 2019,
dont LML fera un reportage dans son numéro du 4 mai

Chaque semaine, LML produit des reportages et une analyse en profondeur de sujets d'intérêt pour le corps politique canadien et traite des développements importants au pays et à l'étranger. Il exprime les préoccupations des travailleurs et fournit une cohérence à tous ceux qui participent au mouvement pour la paix, la justice et pour s'investir du pouvoir politique.

Le prochain numéro de LML, qui sera publié le 4 mai, comprendra un reportage des activités organisées au Canada et dans le monde à l'occasion du 1er Mai, Journée internationale d' unité et de lutte de la classe ouvrière, dont un vaste reportage photo.

Il y aura aussi un reportage sur la manifestation du 30 avril en Ontario pour des soins de santé publics, qui a réuni des travailleurs de la santé et d'autres secteurs dans le cadre de la vaste résistance à l'offensive antisociale du gouvernement Ford contre les soins de santé publics et d'autres programmes sociaux qui assurent le bien-être du peuple.

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