5 juin 2018
L'urgent besoin de renouveler le
processus démocratique
Un identificateur unique pour chacun des
électeurs sans leur consentement éclairé
- Anna Di Carlo -
L'élection ontarienne se déroule en vertu
de la nouvelle loi électorale adoptée en
décembre 2016. Malgré le battage médiatique
du gouvernement
libéral selon lequel la loi renforce le processus
démocratique et a
l'appui de tous les partis à la législature, les
changements à la loi
sont intéressés et ne garantissent aucunement les
principes démocratiques fondamentaux qui affirment le droit des
citoyens d'élire et d'être élus, sans parler d'un
vote éclairé.
Depuis juillet 2017, en vertu des nouveaux
articles du projet de
loi, le directeur des élections de l'Ontario (DEO) est dans
l'obligation d'attribuer un identificateur unique à chaque
personne
dans le Registre permanent des électeurs (le registre) en
vigueur.
C'est l'une des façons dont la Loi électorale
modifiée en
décembre 2016 a été renforcée pour
faciliter la surveillance du vote
des électeurs et le micro-ciblage. Cela est fait sans le
consentement
éclairé et préalable des électeurs.
Les partis politiques enregistrés
reçoivent depuis longtemps le
Registre permanent des électeurs. Ils ont le droit de l'obtenir
une
fois par année, et Élections Ontario doit le mettre
à jour à tous les
ans. Le registre est aussi mis à la disposition des membres de
l'Assemblée législative à tous les ans pour leur
circonscription
respective
seulement.
Le registre, cependant, est
de peu d'utilité pour la gestion de
données si les entrées pour chaque électeur n'ont
pas un identificateur
unique. Cet identificateur n'est pas requis par le registre
d'Élections
Ontario, puisque celui-ci fait constamment la mise à jour de ses
informations à partir de nombreuses sources telles que les
changements
d'adresse qui sont enregistrés au ministère des
Transports lorsque les
permis de conduire sont mis à jour et ainsi de suite. De
même,
Élections Ontario a accès à toute l'information
voulue sur les
changements d'adresse d'une personne suite à un
déménagement et sur la
date de naissance des électeurs qui sert d'identificateur
unique.
Élections Ontario
avait pour habitude d'attribuer des identificateurs à chaque
élection
afin de maintenir l'ordre dans sa propre base de données,
d'éviter les
répétitions, etc.
Par contre, les partis politiques qui entretiennent des
bases de
données sur les électeurs ont besoin d'un identificateur
unique afin
d'intégrer la liste des électeurs dans leur propre base
de données sans
perdre l'information qu'ils ont déjà recueillie durant et
entre les
élections. Ils ont besoin d'un identificateur unique afin de
pouvoir
constamment
ajouter de l'information d'élection en élection, y
compris en période
d'élections partielles. Par exemple, pour la seule ville de
Toronto, 25 % de la population a
déménagé au cours de la période de
cinq ans qui a précédé 2016 et pour la seule
année 2015 le pourcentage
de personnes ayant déménagé était
de 10 %. Les partis politiques ayant des bases de
données exhaustives
et coûteuses utilisent le numéro d'identification unique
pour suivre
ces personnes, peu importe où elles vont ou si elles se
déplacent dans
ou hors d'une circonscription spécifique. Il en va de même
lorsque
quelqu'un change de nom en raison d'un mariage, ou qu'un
nouvel électeur est ajouté avec le même nom qu'un
autre électeur.
Ce changement crée de l'inquiétude parce
qu'il facilite les
activités de surveillance des électeurs par les
médias sociaux et les
compagnies analytiques de données et les partis qui ont recours
à leurs
services. Cela montre clairement que toutes les belles paroles au sujet
de l'obligation des partis politiques de respecter la vie privée
des
électeurs
sont complètement vides de sens et une diversion. Les
électeurs ne sont
pas considérés comme des citoyens ayant le droit
d'élire et d'être élus
et de prendre part aux décisions qui affectent leur vie. Ils
sont
traités comme des consommateurs à cibler avec des
messages qu'ils
veulent soi-disant entendre afin qu'ils votent de la manière
souhaitée
par
les intérêts qui les ciblent.
Des cartes de bingo numériques à
intervalles de 30 minutes pour transmettre qui a voté
Un autre élément important pour
que la Loi électorale
réponde adéquatement aux besoins des partis
cartellisés de surveiller
et de micro-cibler les électeurs sont les « cartes de
bingo » appelées
ainsi parce qu'en format papier c'est ce à quoi elles
ressemblent. Un
développement important est que ces cartes seront disponibles
en version numérique.
La loi stipule que, la journée du vote, à
chaque demi-heure, le
directeur de scrutin doit fournir, sur demande, à chaque
candidat « un
document permettant d'identifier les électeurs qui ont
voté ou perdu
leur droit de vote durant cet intervalle » ou le fournir
à un parti
enregistré. Lorsqu'il est demandé par un parti
enregistré, il est
fourni
en version numérique. Les candidats peuvent le recevoir sous
forme
numérique ou en papier.
Le temps est révolu où les partis
politiques avaient des
volontaires en tant que scrutateurs » dans tous les bureaux
de vote de
la province. L'information qu'ils recherchent est alimentée
directement
vers un emplacement central et liée aux campagnes individuelles.
Cela
reflète aussi l'incapacité des partis politiques de
recruter maintenant
des membres ou supporters dont ils ont besoin aux bureaux de vote pour
dresser la liste des gens qui ont voté.
Mais ce n'est pas tout. Ces
partis sont maintenant libérés de la
tâche ardue d'inscrire manuellement les noms des électeurs
qui ont voté
et reçoivent ainsi une forme additionnelle d'assistance
financière
publique qui n'est pas comptabilisée comme bien en
espèces dans le
cadre des limites de dépenses de campagne électorale.
Avant la journée du scrutin du 7 juin, le
directeur de scrutin de
chaque circonscription doit aussi donner aux candidats une copie papier
de tous les électeurs qui ont voté ou perdu leur droit de
vote au cours
du vote anticipé. Le directeur général doit
fournir au parti enregistré
du candidat une version numérique.
Moins de neuf mois suivant l'élection, les
partis enregistrés
reçoivent une liste officielle de toutes les personnes qui ont
voté.
Des « listes électorales
officielles » numériques pour les partis
Depuis octobre 2017, un autre article de
la loi est entré
en vigueur qui exige du directeur général qu'il fournisse
aux partis
politiques enregistrés les « listes électorales
officielles » préparées
par les directeurs de scrutin dès que les élections sont
annoncées.
Auparavant, seulement les candidats les obtenaient. Ce changement
montre à quel point la gestion des campagnes électorales
est de plus en
plus axée sur la cueillette de données par des compagnies
dont les
services sont sollicités par les bureaux centraux des partis.
Interdiction de se servir des listes à des fins
commerciales
En vertu des règlements touchant
à l'utilisation de
l'information provenant du registre et de la liste électorale,
ceux-ci
doivent servir à des « fins électorales
seulement » et non à des fins
commerciales. En vertu de la Loi électorale ,
l'information ne peut être cédée à un tiers
parti sauf si celui-ci respecte les termes
d'utilisation
. C'est une contradiction en soi puisqu'une compagnie embauchée
par un
parti politique pour analyser des données d'électeurs
accomplit par
définition un travail à des fins commerciales, à
moins qu'elle ne
travaille bénévolement, ce qui en soi contreviendrait aux
lois liées
aux contributions. Mais l'intégration des électeurs
identifiés
de manière unique et de leurs adresses dans d'autres bases de
données
n'est pas bénigne, puisque la restriction que l'information peut
être
utilisée « à des fins électorales
seulement » est sous-entendue.
Une section de la loi interdit le
téléchargement du registre et
des listes électorales, ce qui semblerait prévenir leur
Intégration
dans des bases de données de partis. La loi dit : «
Une personne qui
obtient de l'information du registre en version numérique ne
doit pas
reproduire, magasiner ou transmettre aucune partie de l'information par
moyen numérique peu importe la raison. » Cependant,
dans le
sous-article qui suit, les partis politiques enregistrés et les
membres
de l'Assemblée législative sont exemptés de cette
interdiction. Est
exemptée aussi « toute personne ou
entité » qui a reçu la liste d'un
parti politique enregistré ou d'un membre de l'Assemblée
législative.
Aussi, pour compléter cette arnaque, en vertu
des lignes
directrices sur la vie privée d'Élections Ontario, les
données de base
des partis sur les électeurs sont exemptées des
règlements touchant à
la destruction des données selon un échéancier
précis. Dans la section
portant le titre « Exception aux principes de destruction
sécurisée »,
Élections Ontario informe que « les présentes
lignes directrices
n'exigent pas la suppression des renseignements intégrés
aux bases de
données créées par l'entité politique
à des fins électorales ».
En fin de compte, avec seulement l'information fournie
par
Élections Ontario, les partis politiques enregistrés
peuvent remplir
leurs bases de données d'informations précises sur qui a
et qui n'a pas
voté, qui a perdu son droit de vote, qui a voté par
anticipation, qui a
voté à l'extérieur du pays - le tout en fonction
de chacun des bureaux
de
scrutin. Avec l'aide de l'analytique de données, ils peuvent
intégrer
et établir une référence croisée de
l'information recueillie à partir
d'autres sources, y compris les sondages externes et les
enquêtes,
devenir détenteurs de cette information, et établir avec
une certaine
marge d'erreur qui a probablement voté pour qui.
Une fausse prémisse est mise de l'avant pour
justifier tout cela
afin de répondre aux objectifs des partis politiques de
l'establishment
qui seraient d'encourager la participation du peuple dans les affaires
politiques et même dans l'élaboration de politiques du
parti. De là est
créée cette autre fausse prémisse que les partis
politiques fournissent
au
peuple l'information dont il a besoin pour voter de façon
informée et
contribuer ainsi au maintien d'un corps politique sain. On
prétend que
sans l'identificateur unique, les partis politiques ne seraient pas en
mesure de communiquer avec les électeurs.
Personne n'a donné son consentement à de
telles choses. C'est fait
strictement à des fins intéressées et cela
confirme que le système de
gouvernement est corrompu d'un bout à l'autre.
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